2009-04-30

 

Suprématie — le livre

En France, on pourra bientôt mettre la main sur le nouveau roman de Laurent McAllister. Contrairement aux rumeurs, il ne compte que 662 pages et un prix de vente de 25 euros est indiqué sur la couverture. Au taux de change actuel, cela correspondrait à 39,95 dollars canadiens. Ce qui se compare au nouveau livre de Bernard Werber, la Nouvelle Encyclopédie du savoir relatif et absolu, qui compte 586 pages et se vend 36,95 $ chez Renaud-Bray, ou au nouveau roman de Stephen King, Duma Key, qui compte 656 pages et se vend 34,95 $. Évidemment, ce sont des auteurs de bestsellers dont les ouvrages se vendent au meilleur prix parce que le volume des ventes compensera les éditeurs. On attendra donc de voir quel sera le prix au Canada de Suprématie, quand le tome arrivera sur les tablettes en juin-juillet, mais il ne faut sans doute pas espérer des rabais à la King...

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2009-04-29

 

Les boisés d'Ottawa

Ottawa, capitale perdue dans les bois? À Montréal et ailleurs, on a fait des gorges chaudes quand la petite ville de bûcherons des années 1850 a été choisie pour devenir la capitale du Canada. Ottawa n'a pas exactement été la première capitale édifiée ab ovo, même si elle a précédé Brasilia ou Canberra, mais la capitale des États-Unis au bord du Potomac avait déjà donné l'exemple. Contrairement à Washington, toutefois, le site fournissait déjà des raisons d'exister à une agglomération puisque le canal Rideau débouchait à cet endroit sur la rivière des Outaouais. (En revanche, les Canadiens ont obéi aux mêmes motifs qu'aux États-Unis en optant pour une capitale à l'écart des métropoles existantes : l'incendie du Parlement à Montréal en 1849 avait disqualifié les capitales tournantes du Canada-Uni, tout comme l'attaque du Congrès fédéral à Philadelphie en 1783 avait poussé les législateurs étatsuniens à éliminer les grandes villes de l'époque.) De nos jours, toutefois, les photos ci-dessus que j'ai prises à quelques minutes des résidences du premier ministre et de la gouverneure-générale seraient plutôt des raisons de s'enorgueillir de la présence de la nature que la création de parcs (comme le parc de Rockcliffe où j'ai pris ces photos) et d'une ceinture de verdure a permis de conserver à l'intérieur des limites de la ville. Cette photographie de la résidence du premier ministre au 24 Sussex montre aussi que cette avenue bordée par l'ambassade de la France, le Haut-Commissariat du Royaume-Uni, la résidence du premier ministre et Rideau Hall bénéficie d'un écrin naturel de premier ordre, la plupart se dressant sur la falaise qui surplombe la rivière des Outaouais. Le feuillage est encore rare en ce début de printemps,mais cela permet de mieux apprécier les architectures contrastées sans rien enlever au cadre de verdure. Une autre façon d'évaluer l'importance du cadre naturel d'Ottawa, c'est de se rappeler que la ville est construite au confluent de deux importants cours d'eau, la rivière des Outaouais et la rivière Gatineau, comme on peut l'apprécier sur cette dernière photo (qui montre surtout les grands édifices de la ville de Gatineau, en face d'Ottawa, du côté québécois).

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2009-04-27

 

Prière de l'usager

Notre carte-mère qui êtes en silice
que votre fabricant soit authentifié,
que vos systèmes roulent sans s'ossifier
et que votre écran reste à jamais propre et lisse.

Que votre antivirus résiste à la malice
des programmes dont il nous faut se défier
comme de ceux auxquels on voudrait se fier
et que votre écran reste à jamais propre et lisse.

Que votre date de péremption vienne
pour qu'enfin les fabricants qui vous soutiennent
nous épargnent leurs si pesantes rustines,

supportez que nous travaillions en hamac
(mais sans offenser ou forcer nos rétines),
donnez-nous Linux et délivrez-nous du Mac!

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2009-04-26

 

L'oubli, la repentance et le pardon

La torture, tout comme les autres crimes contre l'humanité, soulève la question de la meilleure manière de régler le cas des coupables. Aux yeux des lois internationales actuelles, il n'y a pas d'échappatoires possibles... en théorie. Aux États-Unis, l'administration Obama semble pourtant pencher pour une amnistie de facto, qui partirait du principe que le président doit jouir d'une immunité presque sans limite, de sorte qu'il serait injuste de condamner les subalternes quand leur supérieur ne peut pas être inquiété.

Néanmoins, dans une démocratie, la perte du pouvoir reste une sanction possible — et pacifique. La véritable question, c'est en fait de savoir s'il faut choisir entre une sanction plus dure des coupables et la paix sociale. Après la Seconde Guerre mondiale, en Allemagne comme en France ou au Japon, il a été possible de juger les coupables, mais le prix du sang avait déjà été payé au cours des années de guerre — la paix sociale avait déjà été sacrifiée. L'Espagne post-franquiste a choisi une certaine forme d'amnésie, en optant pour l'oubli. Après certaines dictatures ou certains régimes, par contre, on a préféré passer l'éponge et ne pas exiger la punition ou la repentance des coupables, mais en s'assurant de ne pas oublier non plus ce qui s'était passé. Les Commissions de la vérité et de la réconciliation ont voulu aller plus loin, du moins en théorie, troquant la confession et le repentir des bourreaux pour le pardon des victimes. Mais que vaut la repentance quand elle est obtenue sous la menace de poursuites pour ceux qui refuseraient d'avouer leurs crimes?

Aux États-Unis, la situation est d'autant plus compliquée que les crimes en cause ont quand même été d'une envergure limitée du point de vue du nombre, sinon de la gravité des actes. De plus, la paix sociale qui a permis l'élection pacifique de Barack Obama existe bel et bien, de sorte qu'on va s'y prendre à deux fois avant de la sacrifier pour punir un petit nombre de criminels. Une Commission de la vérité et de la réconciliation serait-elle envisageable? Mais l'idée vient d'ailleurs, ce qui vaut condamnation immédiate aux États-Unis... Et puis, pour obtenir des avis et des repentirs, il faudrait pouvoir menacer de poursuites les personnes responsables sans que ce soit un bluff. Pour l'instant, les États-Unis voudraient pouvoir opter pour l'oubli et laisser à Barack Obama la tâche de défaire ce que Bush a fait sans jamais dire tout haut pourquoi cela mérite d'être fait.

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2009-04-25

 

Culture et torture

La culture du « tout est dû » est-elle le produit inéluctable de la prospérité ? Et mène-t-elle inévitablement à une plus grande approbation de la torture ?

La culture de l'entitlement en Occident est sans doute née d'excellentes intentions, dont celle de prendre au sérieux les déclarations reconnaissant des droits égaux à tous, hommes et femmes, riches et pauvres, jeunes et vieux, quelle que soit la couleur de la peau ou la nationalité. De plus, la prospérité des sociétés occidentales leur a permis de viser la culture du risque zéro. Ce qui n'est pas mauvais en soi, mais a pu conforter les citoyens dans la conviction qu'aucun risque n'était permissible, en quelque circonstance que ce soit. Après tout, la sécurité de l'individu est aussi un droit humain et il peut sembler logique qu'au nom de la sécurité de tous, on excuse les attentats à la dignité humaine.

Il y a déjà deux ans, je réduisais le problème à une question d'égoïsme pur, résumé aux États-Unis par une version particulièrement pernicieuse de l'aphorisme voulant que la fin justifie les moyens : « Winning isn't everything; it's the only thing ». De ce point de vue, la torture serait justifiée dès lors qu'elle obtiendrait des aveux. La culture (voire le culte) du résultat est telle aux États-Unis que même les plus progressistes (en commençant par Jon Stewart) ont considéré qu'il y avait là un dilemme potentiel...

C'est sans doute ce qui explique pourquoi le refus de la torture par la population aux États-Unis est sous la moyenne obtenue dans dix-neuf pays de la planète par un sondage de 2008. Avec 53% de répondants rejetant l'usage de la torture dans tous les cas, les États-Unis faisaient mieux que des pays comme la Turquie, l'Iran, la Russie, le Nigéria (où on ne tient sans doute pas la lapidation pour une forme de torture), la Corée du Sud, la Thaïlande et l'Inde. La proportion de la population favorable à l'usage généralisé de la torture était de 13% aux États-Unis; ce niveau n'était dépassé qu'en Turquie, au Nigéria et en Chine. C'est quand même stupéfiant : une personne sur 7 ou 8 aux États-Unis était en faveur d'un retour aux méthodes de l'Inquisition, et pas nécessairement pour lutter uniquement contre le terrorisme.

Sans doute que cette frange de la population était sur-représentée au sein de l'administration Bush... Dans un commentaire signé pour le New York Times, Frank Rich démonte le mécanisme probable (à la lumière des informations disponibles actuellement) du recours à la torture par l'administration Bush. Le soupçon qui se fait jour, c'est que la torture de certains individus n'a pas été justifiée par la peur d'un danger imminent, mais qu'elle a été dictée par le besoin d'obtenir un aveu susceptible d'associer l'Irak de Saddam aux terroristes du 11 septembre afin de justifier une invasion injustifiable... Mais pour 13% des habitants des États-Unis, ceci n'aura rien d'horrifiant en soi. Et c'est ce qui est vraiment horrifiant.

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2009-04-22

 

Traduire la science-fiction

On cite Yves Meynard dans cet article sur la traduction qui daterait de 2006. L'autrice de l'article s'émerveille du fait qu'on puisse traduire des histoires de science-fiction...

À mon avis, les défis de la traduction dans des langues autres que l'anglais sont parfois montés en épingle, car on fait souvent mine d'ignorer qu'en contrepartie, la science-fiction offre beaucoup de flexibilité aux traducteurs. Certes, les traducteurs d'ouvrages relevant de la science-fiction doivent disposer d'une grande culture scientifique et science-fictive pour réussir la transposition du texte d'origine dans la langue d'arrivée en évitant les fausses notes. Comme tous les traducteurs, idéalement, ils seront aussi sensibles aux exigences narratives de la fiction. L'écrivain doit savoir séduire ou surprendre, pas seulement communiquer efficacement.

Cela dit, comme le montre bien l'article, il existe plusieurs façons d'aborder les spécificités de la science-fiction puisque les traducteurs ne sont pas assujettis à la stricte fidélité au réel qui enchaîne les traducteurs de la littérature générale. Cet espace de liberté propre à la science-fiction n'est pas à dédaigner. Le véritable défi, c'est parfois de traduire les textes les plus ordinaires, car il n'existera parfois qu'une manière de le faire de la façon la plus juste dans le contexte de la culture d'arrivée...

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Boréal 2009, l'image...

Pour la vingt-sixième fois, il y aura un congrès Boréal, et un vrai, en 2009. La preuve...Certains se demandent pourquoi il aura lieu en même temps qu'Anticipation, le congrès mondial de science-fiction qui a lieu à Montréal du 6 au 10 août. Notons tout d'abord qu'il ne s'agit pas de concurrencer Anticipation (si ce n'est que parce que Boréal dure eux jours et Anticipation cinq) : contrairement aux congrès Boréal récents, celui-ci vise le retour à une certaine intimité puisqu'il se déroulera dans une seule salle de l'Hôtel Days. S'il y a une quarantaine d'inscrits, tout le monde sera content.

À la base, il s'agit de desservir un double, voire triple, public. Tout d'abord, il y a ceux qui ne peuvent pas se permettre d'assister à l'entièreté d'Anticipation et ceux qui trouvent l'événement trop anglophone, trop fanique, trop science-fiction, ou que sais-je. Boréal sera donc leur principale occasion de se rencontrer cette année pour parler de ce qui les passionne. Ensuite, il y a ceux qui, toujours pour des raisons financières et de commodité, peuvent souhaiter ne pas faire deux fois le voyage à Montréal dans l'année : en tenant Boréal la même fin de semaine qu'Anticipation, on leur donne l'occasion de voir tout le monde en quelques jours. Enfin, on peut espérer que les francophones qui viennent à Montréal uniquement parce que c'est le congrès mondial passeront aussi dire bonjour aux autres fans francophones présents à Boréal, dont les sympathiques organisateurs, ou apprendront l'existence de Boréal à l'occasion de la remise des Prix Boréal sur place à Anticipation le dimanche. C'est aussi un investissement à long terme.

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2009-04-21

 

Une nouvelle bibliothèque numérique

C'est aujourd'hui qu'ouvre la première bibliothèque numérique mondiale, qui s'inscrit un peu dans la lignée de Gallica pour la France et d'Europeana pour l'Europe. Mais la gestion des droits reste souvent gênante, tout comme pour le futur développement de l'édition électronique.

Bien entendu, il ne s'agit pas des seules bibliothèques en-ligne. J'aime beaucoup Canadiana, qui offre la recherche dans le texte et les pages en fac-similé, mais la collection est essentiellement historique et n'a pas vocation d'exhaustivité. En revanche, Google Books a des ambitions démesurées, prenant la relève du Projet Gutenberg et de l'Internet Archive...

Pour les classiques français, il y a la trompeuse bibliothèque universelle (ABU) du Conservatoire national des arts et métiers, qui a aussi numérisé plusieurs ouvrages français relatifs aux sciences, aux techniques et à la vulgarisation de celles-ci.

Pour d'autres classiques des sciences et des techniques, il y a le site berlinois Archimedes, une autre bibliothèque numérique berlinoise (qui offre des publications des anciennes académies allemandes, des versions numérisées des livres de Julien Offray de La Mettrie ainsi qu'une réponse d'Élie Luzac à La Mettrie en 1748, L'Homme plus que machine), le site des NIH sur les anciens ouvrages d'anatomie, le site de Harvard qui a numérisé de nombreuses publications astronomiques et qui héberge un excellent outil de recherche dans le domaine, le catalogue de livres numérisés de l'Université Louis-Pasteur, les ouvrages rares de l'Observatoire de l'Université de Vienne, la collection de Dresde et le site de Cornell des classiques de l'histoire des mathématiques. Ou encore le site florentin qui donne accès aux ouvrages de Galilée...

Pour des sources sur l'Antiquité, il y a l'Ancient Library, Lacus Curtius et, bien sûr, Perseus. Pour le Moyen Âge, ce catalogue de manuscrits numérisés semble donner accès à de nombreuses institutions, mais le lecteur sera obligé de réviser ses connaissances paléographiques...

Pour qui préfère les revues, ce site britannique offre plusieurs numéros de revues des XVIIIe et XIXe siècles. De nombreuses revues savantes en français sont hébergées par ce portail, dont la revue Féeries sur le conte merveilleux du XVIIe au XIXe siècles. Aux États-Unis, la presse périodique (et plus) du XIXe siècle est aussi accessible.

En histoire de l'art, j'ai trouvé ce site un jour, mais il y en a sûrement d'autres. On trouve de tout dans les collections numériques comme celles de l'Université de Toronto. Ainsi, l'Université de Californie a mis en-ligne des ouvrages savants et de nombreuses autres universités ont leurs propres répertoires. Si une bibliothèque mondiale pouvait inventorier tous ces ouvrages numériques et permettre aux internautes de les trouver, c'est clair que les rêves les plus fous des bibliothécaires d'Alexandrie seraient enfoncés !

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2009-04-20

 

De la Maison Shaughnessy à Saint-Henri

Hier, j'ai profité du beau temps pour me promener. Après la réunion douloureusement matinale pour l'organisation d'Anticipation, je me suis rendu à l'exposition d'Alexandre Robichaud, « Dessine-moi le cosmos », à la galerie Quartier Libre dans Saint-Henri. En chemin, j'ai pris quelques photos du jardin de sculptures de Melvin Charney qui fait partie du Centre canadien d'architecture, face à la maison Shaughnessy (ci-dessous), qui sert de corps de logis principal du CCA. Le jardin de sculptures (qui serait aussi appelé « Le Village Shaughnessy »?) se trouve au sud du boulevard René-Lévesque. Sa pièce maîtresse est une façade fragmentaire, qui rappelle l'existence de maisons disparues tout en reflétant très fidèlement la maison Shaughnessy. Il n'y a qu'à comparer la photo ci-dessus et celle ci-dessous...Cet élément baptisé l'Arcade n'est qu'un faux-semblant qui cache la partie la plus intéressante du petit parc, une esplanade qui surplombe le chemin de fer, l'autoroute et la basse-ville montréalaise, c'est-à-dire les débuts du quartier Saint-Henri, autrefois un village de tanneurs sur les bords du canal Lachine, puis une petite ville besogneuse reliée par chemin de fer au centre-ville, et aujourd'hui un des quartiers les plus authentiquement habités du centre-ville (et un des mieux desservis par le métro)... L'envers de l'Arcade révèle qu'il ne s'agit que d'une façade à la Potemkine, dont on a poussé la construction juste assez pour cacher le boulevard René-Lévesque, et une partie du CCA. Depuis l'Esplanade Ernest-Cormier, on ne voit plus que le haut de la Maison Shaughnessy, comme le montre la photo ci-dessous — un effet qui n'est pas inintéressant, d'ailleurs.Par contre, ce grand belvédère semé de gravillons est piqueté de Colonnes allégoriques censées évoquer l'histoire de la ville et de son architecture. Mais les sculptures sont parfois un tantinet énigmatiques : si on ne se donne pas la peine de se renseigner, que faut-il retenir de la paire ci-après? Un temple protestant et des silos portuaires? Une banque ou une place de la Bourse? À Montréal, tant les banques que l'ancienne Bourse ont adopté l'apparence des temples gréco-romains. Autrefois, les banques étaient nombreuses à investir dans une forme d'architecture qui rappelait les sanctuaires de l'Antiquité pour souligner leur souci de pérennité : peut-être qu'on n'aurait pas eu de crise financière si les banques anglo-américaines n'avaient pas abandonné cette préférence pour les édifices exprimant la plus grande durabilité possible dans notre civilisation... L'hésitation n'est pas de mise dans le cas de la colonne suivante, coiffée de ce qui pourrait être une maison de poupée, mais où on reconnaît d'emblée une maison comme on peut en voir plusieurs encore aujourd'hui à Montréal. En particulier, elle est dotée d'un escalier qui donne accès à l'étage principal sans empêcher les autres locataires d'accéder à l'appartement au rez-de-chaussée. À première vue, la sculpture superpose cette maison typique de la fin du dix-neuvième siècle avec une maison plus humble, surmontée d'une cheminée, que l'on peut associer sinon au Régime français du moins à l'architecture canadienne-française. Le message est clair : ceci a remplacé cela, mais ce n'est pas une raison pour oublier. Je me souviens...
Dans un genre plus ludique, la Colonne suivante porte un assortiment de formes métalliques dont émergent au moins deux poutrelles, la plus élevée servant de socle à une maisonnette qui fait plutôt penser à une dépendance, voire à une cabane de défricheur. Le reste de la sculpture est-il censé suggérer le renouveau de l'architecture qui a résulté des nouveaux procédés de fabrication de l'acier au dix-neuvième siècle? Quand il est devenu possible de produire de l'acier presque aussi facilement que de la fonte ou du fer forgé, les armatures et charpentes métalliques ont pu bénéficier des qualités de l'acier. C'est ce qui a permis de construire les premiers gratte-ciel, mais aussi d'améliorer la durabilité des rails de chemin de fer ou de concevoir des machines plus résistantes. En même temps, les atouts de l'acier permettaient d'élever des édifices plus audacieux... Mais que vient faire là-dedans la petite maisonnette au sommet de la sculpture? Et le piédestal a-t-il un sens particulier? Il rappelle par son apparence les façades des grands immeubles du centre-ville et la superposition des trois composantes (les façades, les poutres de la charpente, l'habitation réduite à sa plus simple expression) pourrait représenter une sorte d'effeuillage qui montre ce qu'il y a derrière une façade monumentale : des matériaux de construction et l'idée de base de l'abri... La dernière Colonne que j'ai prise en photo est particulièrement frappante au plan visuel. Quant à sa conception, elle pourrait s'interpréter de la même façon que la précédente puisqu'elle combine une façade (de style néo-classique), une structure (de pont, par exemple) et une simple chaise. J'ai quand mêmefini par visiter la galerie Quartier Libre. Comme l'indique le titre de l'exposition, l'artiste s'intéresse au cosmos, à la cosmologie et même à l'astronomie. Ses toiles ne sont ni purement figuratives ni entièrement abstraites. L'Amas de la Vierge, le Grand Attracteur, les comètes, la théorie des cordes et les « planètes vacantes » sont au nombre de ses sujets.

À quelques pas de la galerie, je suis tombé sur un édifice comme on en trouve parfois dans les parties de la ville où il fallait occuper les lots disponibles de la meilleure façon possible, même si cela donnait des résultats un peu surprenants... comme dans le cas de ce petit immeuble commercial, occupé par des logements à l'étage et par un commerce au rez-de-chaussée — du moins, je présume que cette grande devanture vitrée servait autrefois à un boutiquier quelconque. Mais cette photo permet de bien apprécier l'étroitesse de la façade sur la rue principale par rapport à la profondeur derrière, sur la rue latérale. Le cas est assez rare pour ne pas avoir convaincu Melvin Charney d'en faire le sujet d'une sculpture! La photo ci-après offre un point de vue légèrement différent et suggère, si on la compare à cette photo un peu plus ancienne de cette maison de 1910, que l'édifice a fait l'objet d'une rénovation au moins partielle. (En particulier, la vitrine semble avoir profité d'une réfection.) En tout cas, pour les amateurs d'architecture, l'ensemble vaut le détour au même titre que la maison Shaughnessy du CCA.

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2009-04-19

 

Ballard, un monde noyé

Avec la mort de James G. Ballard (1930-2009), c'est tout un monde (et plusieurs univers) qui sombre sous la surface des eaux. La vie de Ballard lui avait permis de prévoir plus d'une forme d'engloutissement — je songe ici à sa description de la chute de Shanghaï dans Empire of the Sun (1984), un roman plutôt bien rendu au cinéma par Spielberg (malgré quelques touches de mièvrerie dont on auait pu se passer). Comme chez d'autres écrivains de science-fiction qui ont fait dès leur jeunesse l'expérience d'une certaine aliénation, mais à un degré beaucoup plus élevé, Ballard était conscient de la fragilité des choses que l'on tient pour acquises même si la force de l'habitude ne suffit pas à justifier leur existence... Certains de ses premiers romans avaient sans doute transcrit cette expérience sous une forme métaphorique, mais la sensibilité du véritable auteur de science-fiction ne se borne pas à l'évocation de l'instabilité des existences. Dans plusieurs romans de sa période tardive, dont Crash et Concrete Island (1974), Ballard braquait le regard d'un observateur désabusé et formidablement lucide sur les traits caractéristiques de notre civilisation moderne que nous faisons de notre mieux pour ignorer. De ce point de vue, l'histoire de Concrete Island, de ce naufragé contemporain sur un coin de terre isolé du reste du monde par des autoroutes et des bolides, est assez emblématique pour que j'en reproduise la couverture ici.

Sans surprise, Radio-Canada a mentionné la mort de Ballard en citant d'abord Empire of the Sun, puis Crash, avant d'admettre qu'il avait « également » été auteur de science-fiction (une étiquette que Ballard lui-même trouvait réductrice, mais pas au point de la renier, je crois). Mais comme j'ai fait de même, je ne leur lancerai pas la pierre. Mais je vais me commander Super-Cannes, que je n'avais pas encore lu, et je vais relire Vermilion Sands, un recueil qui m'a permis de passer par Vermilion Bay, Ontario, en imposant un vernis de science-fiction aux paysages visibles de la voiture...

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2009-04-18

 

Anticipation en couleurs

Cette année, le congrès mondial de science-fiction, dénommé Anticipation, a lieu à Montréal du 6 au 10 août. Pour l'essentiel, les événements auront lieu au Palais des Congrès (qui est presque entièrement occupé par le congrès) et à l'Hôtel Delta Centre-Ville. Ironiquement, même un Montréalais comme moi ne connaîtra pas nécessairement le Palais des Congrès de l'intérieur (les espaces publics du rez-de-chaussée à part, évidemment) et ce sera donc l'occasion de découvrir l'envers... du vitrail!Les espaces intérieurs seront caverneux et les perspectives vertigineuses. Au gré des réunions successives des organisateurs (et je participe à l'une d'elles en ce moment à l'Hôtel Delta), j'ai visité deux fois les principaux niveaux du Palais des Congrès afin de me familiariser avec la disposition des lieux. Les inscrits ne verront pas la salle des vendeurs comme je l'aurai vue, dans la photo ci-dessous qui ne donne pas une idée entièrement juste des dimensions de cet espace... On peut s'inscrire jusqu'au 15 juillet; ensuite, il faudra s'inscrire à la porte et les frais seront encore plus élevés. Dans moins de quatre mois, les salles et les couloirs du Palais des Congrès seront remplis, et les longs balcons accueilleront de nombreuses conversations face au paysage urbain, la grande verrière offrant un magnifique point de vue sur la ville et le Mont Royal.(Le premier congrès mondial de science-fiction quelque peu francophone est par là...)

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2009-04-16

 

Le raton-laveur qui fait le printemps

Une question grave : les ratons-laveurs hibernent-ils? Il semblerait que non, à strictement parler : l'hiver, ils se contentent de passer la saison froide dans leur repaire en état de torpeur, inactifs et assoupis mais sans hiberner à proprement parler puisque la température de leur corps reste élevée.

Ce qui explique pourquoi je n'avais pas vu de ratons-laveurs dans les rues de Montréal depuis octobre dernier. Certes, je passe sans doute moins de temps à les arpenter l'hiver, à cause de la température, de la gadoue et des trottoirs glacés, mais ils seraient d'autant plus faciles à remarquer que la neige est blanche. Mais si le chat noir du collège Notre-Dame a bravé les intempéries, le ou les ratons-laveurs du quartier sont restés discrets. Mais l'autre soir, en allant faire des recherches à la bibliothèque centrale de l'Université de Montréal, j'ai croisé mon premier raton-laveur de l'année, qui allait faire ses emplettes dans les poubelles de l'université... Je suis allé lui dire bonjour, mais c'est clair que je le dérangeais et qu'il n'appréciait pas qu'on vînt faire la lumière sur ses activités nocturnes. À toutes mes interrogations, il opposait un regard si blasé, si vide d'expression, que j'ai fini par me décourager et prendre congé...

2009-04-15

 

Des robots dans la ville

Val me signale le compte-rendu d'une expérience intéressante sur la coexistence des gens et des machines dans les rues de New York. Un petit robot orné d'un visage souriant a été lancé dans la rue, brandissant un fanon qui indiquait sa destination et qui priait les passants de le remettre dans le droit chemin au besoin. Des expériences répétées auraient démontré la serviabilité du public qui a toujours aidé le petit robot à poursuivre sa route. Ce qui peut surprendre de la part des New Yorkais, qui ont parfois mauvaise réputation...

Mais il faudrait en savoir plus. Tout d'abord, il s'agissait d'un petit robot assimilable à un jouet, et sa mission affichée avait tout du jeu. Par conséquent, l'expérience pourrait en dire moins sur la tolérance des humains pour les robots, et beaucoup plus sur leurs instincts ludiques. D'ailleurs, la seule mission décrite sur le site consistait à traverser un parc, un endroit où, par définition, les gens sont plus portés à se détendre.

De plus, je connais le parc en question puisque je l'avais fréquenté en assistant au congrès de la SLSA à New York en 2006. Il se trouve dans un quartier plutôt huppé, à proximité des principaux pavillons de l'Université de New York. Par conséquent, l'échantillonnage de la population new-yorkaise pourrait être un peu biaisé... Néanmoins, on peut imaginer que l'humanité future ne serait pas hostile aux robots si certaines conditions sont remplies.

Cela dit, quand je tombe sur une pièce d'art urbain à Montréal, j'ai de plus en plus tendance à chercher la caméra cachéee... De sorte que je me demande si les gens qui ont aidé le petit robot en question (ou qui se sont abstenus de lui flanquer un coup de pied pour le voir revoler!) l'ont fait parce qu'ils craignaient d'être filmés. Il aurait fallu les identifier et les interroger après-coup pour connaître leurs motivations — mais ceci aurait sans doute exigé des collaborateurs additionnels dont ne disposait pas la personne responsable de l'expérience.

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2009-04-14

 

De la qualité des étudiants d'aujourd'hui...

La confédération des associations facultaires des universités de l'Ontario (OCUFA) vient de publier les résultats de deux enquêtes. La première (.PDF) porte sur l'évolution de la qualité de l'éducation universitaire en Ontario; la seconde (.PDF) porte sur l'évolution du niveau des étudiants de première année. La seconde étude a beaucoup fait parler d'elle dans les médias, qui sont toujours à l'affût d'un signe de plus de la déchéance des jeunes générations.

Qui donc aura remarqué que la première étude laisse planer certains doutes sur la validité des conclusions de la seconde? En effet, selon la première enquête, plus de 60% des personnes sondées doivent gérer des groupes plus nombreux dans les salles de classe tandis que 40% d'entre elles croient que les universités n'offrent plus le même niveau d'enseignement. Afin d'illustrer cette détérioration, les répondants ont cité:

— Oversubscribed courses without enough seats for students
— Less student-faculty interaction
— Fewer labs and individualized assignments – greater emphasis on multiple choice assignments to ease marking workload

Du coup, si les profs doivent gérer des classes qui débordent, s'ils ont de moins en moins le temps d'apprendre à connaître leurs étudiants et s'ils sont obligés d'assigner des devoirs standardisés, dans quelle mesure peuvent-ils se prononcer avec confiance sur le niveau des étudiants de première année?

Cela dit, si je ne crois pas nécessairement que le niveau baisse tant que ça, le sentiment le plus partagé chez les profs, c'est que les étudiants croient de plus en plus que la réussite est un dû. En anglais, on parle d'entitlement, mais je ne trouve pas d'équivalent évident en français. Cette conviction que tout leur est dû à l'université se manifeste de plusieurs façons. Deux enquêtes menées dans une université (probablement) californienne ont permis de cerner le phénomène, selon un article d'Ellen Greenberger et cie paru dans le Journal of Youth and Adolescence en 2008. Si on peut se fier à la franchise des étudiants (et si on en doute, cela voudrait dire que les réponses sont en-deçà de la vérité!), les étudiants se sont dits d'accord avec les affirmations ci-dessous dans les proportions suivantes (c'est moi qui traduis, grosso modo) :

66.2% : si j'ai expliqué à mon professeur que je fais de mon mieux, je crois qu'il devrait en tenir compte et que ma note finale devrait le refléter
40.7% : si j'ai lu la plupart des textes requis pour un cours, je mérite un B dans ce cours
34.1% : si j'ai assisté à la plupart des classes, je mérite au moins un B dans ce cours
31.5% : les professeurs me donnent souvent une note inférieure à celle que je mérite pour mes essais, dissertations ou rapports
29.9% : les professeurs qui ne me permettent pas de rédiger un examen quand cela m'arrange en raison de mes propres plans (p. ex. des vacances ou un voyage que je juge important) sont trop sévères
25.4% : les professeurs me donnent souvent une note inférieure à celle que je mérite pour un examen
23.5% : j'aurais une mauvaise opinion d'un prof qui ne répond pas à mes courriels le jour même
17.7% : si je ne suis pas content de la note que j'ai reçue pour un devoir, le professeur devrait me laisser lui soumettre un autre devoir
16.8% : les professeurs n'ont aucunement le droit de s'offusquer si je tends à arriver en retard pour le cours ou à quitter tôt
16.5% : un professeur n'a pas à se vexer si je reçois un appel important pendant que je suis en classe
15.3% : j'aurais une mauvaise opinion d'un prof qui ne répond pas rapidement à un message téléphonique
9.5% : un professeur devrait me laisser soumettre un devoir en retard si l'échéance entre en conflit avec mes projets de vacances

En Ontario, je ne suis pas sûr qu'on en soit rendu là, mais un de mes étudiants a réclamé cette année d'écrire son examen de mi-session à son retour de vacances au Costa Rica et il a laissé tomber le cours quand j'ai refusé de lui garantir cette possibilité...

Qu'est-ce qui explique ces attitudes chez les étudiants? L'article de Greenberger n'a pas décelé de facteur déterminant. Tout au plus observe-t-on une corrélation modérée de l'égocentrisme étudiant et du niveau général d'égoïsme (c'est-à-dire de ce qu'on appelle psychological entitlement et exploitive entitlement, et que l'on diagnostique si le sujet répond affirmativement qu'il croit honnêtement être plus méritant que les autres, ou que s'il est pressé, il a le droit de passer avant les autres). Ce n'est guère surprenant, mais la corrélation n'est qu'un peu plus forte que la corrélation avec certaines formes de pressions parentales.

Du coup, les auteurs de l'article se bornent à émettre des hypothèses. Ils suggèrent que l'emploi croissant du courriel abolirait la distance nécessaire entre les profs et les étudiants, que les évaluations de l'enseignement par les étudiants favorisent la conviction de ceux-ci que leur point de vue a autant sinon plus d'importance que celui des professeurs et que la tendance à distribuer plus volontiers des notes élevées ou à offrir des cours plus faciles conforterait les étudiants dans leur conviction que la réussite leur est due...

Les auteurs, pour la plupart étatsuniens, omettent toutefois de mentionner un facteur évident : les frais de scolarité. Quand les étudiants (et leurs parents) paient des milliers de dollars par semestre, ils ont sûrement le droit d'avoir l'impression qu'ils ont acheté quelque chose, c'est-à-dire un diplôme universitaire et les notes qu'il faut pour l'obtenir. Mais la remise en question de la hausse des frais de scolarité en Amérique du Nord n'est pas à l'ordre du jour.

Cela dit, des frais de scolarité particulièrement bas, comme au Québec, et des pratiques universitaires comme l'approbation des plans de cours par un vote des étudiants (à l'UQÀM, par exemple) peuvent également conforter les étudiants dans la conviction tacite qu'ils sont des êtres d'exception qui ont droit à un traitement particulier. Cela aussi, je l'ai constaté...

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2009-04-11

 

La bataille pour le savoir

Dans tous les pays, la crise semble donner un coup de pouce aux gouvernements qui entendent privilégier toutes les dépenses possibles sauf celles qui encourageraient la culture, l'éducation ou les sciences. Au Canada, la fermeture possible de l'Observatoire du Mont Mégantic reste mystérieuse — et particulièrement blessante quand on se rappelle qu'elle faisait fi des meilleurs avis et qu'elle a lieu en pleine année mondiale de l'astronomie. Outre le fait évident qu'elle est sans doute une conséquence des coupures infligées par le gouvernement Harper aux conseils de recherche (mais la résistance s'organise), on peut d'ailleurs se demander si quelqu'un a eu le machiavélisme de se dire qu'une telle coupure avait des chances d'être compensée par un autre palier de gouvernement ou une autre source de financement parce que, justement, on menaçait le dernier grand observatoire dans l'est du Canada en pleine année mondiale de l'astronomie...

En France, on se mobilise plutôt pour sauver le Palais de la Découverte. La menace est moins brutale, car la bureaucratie française excelle à brouiller les cartes pour jouer les choses en douceur. Mais l'incorporation à la Cité des sciences et de l'industrie de ce grand musée des sciences, et surtout de la science pour tous, fondé en 1937, pourrait entraîner la dissolution de l'institution, ou du moins la perte de sa spécificité. C'est la tactique de la bouteille à l'encre, et si réussie que je n'ai pas encore réussi à décider si je veux appuyer ceux qui veulent sauver le Palais de la Découverte, même si j'ai signé la pétition, en partie pour honorer la mémoire de mon grand-père qui m'y avait emmené en visite quand j'étais petit. S'il était encore vivant, je lui demanderais sans doute s'il l'avait visité à son ouverture en 1937. Mais il n'est plus temps. Et sans doute faut-il savoir se battre pour le savoir et la culture, sinon on se dira aussi un jour qu'il est trop tard...

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2009-04-10

 

Tous des primates!

En cette année consacrée (aussi) à la mémoire de Charles Darwin, les nouvelles sont là pour nous rappeler à l'occasion que le lien de parenté entre les humains et les chimpanzés est attesté de plus d'une façon. Outre la morphologie et la génétique, il y a le comportement. Cet article récemment paru dans The Independent en Grande-Bretagne rapporte que les femelles dans une bande de chimpanzés sauvages échangent leurs faveurs sexuelles pour des morceaux de viande offerts (avec préméditation) par les mâles.

Or, la chronique judiciaire canadienne de la semaine inclut le plaidoyer de culpabilité d'un jeune homme que sa petite amie (condamnée avant lui pour le même crime) avait poussé au meurtre en lui marchandant ses faveurs sexuelles. Comme quoi, la nature des primates refait surface de temps en temps pour nous rappeler, si on sait lire les nouvelles, que l'Homo sapiens pourrait bien être le troisième chimpanzé. La seule question que l'on peut se poser, c'est de savoir si, comme il a osé s'auto-proclamer, c'est bien le plus sage des trois... Car si la viande d'une proie a pris dans la plupart des sociétés modernes la forme d'une sortie au cinéma ou au restaurant, voire d'une voiture ou d'un condo, il reste à déterminer avec quelle fréquence les femelles Pan troglodytes poussent leurs mâles à les débarrasser d'une rivale — et combien de ces derniers acceptent!

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2009-04-09

 

Le goût des ruines modernes

Le goût des ruines est fort ancien, mais l'accélération des rythmes économiques modernes engendre son lot d'édifices abandonnés ou condamnés, sans qu'on ait besoin d'imaginer le monde sans nous. Et on peut les explorer, comme je l'évoquais dans ce billet et comme le décrit plus longuement Mario Tessier dans son article « Les ruines du futur », dans Solaris 169. Ces ruines modernes sont partout... À Blackburn Hamlet, en banlieue d'Ottawa, l'exploitation d'une série de serres a cessé il y a déjà un moment. Ayant manqué l'autobus pour me rendre à l'université, j'ai profité de l'attente de l'autobus suivant pour aller prendre quelques photos de ces serres dont la couverture (en verre ou en plastique) a disparu, et qui émergent de l'hiver finissant dans un état pitoyable. Et comme la végétation n'a pas encore commencé à bourgeonner, la nudité des lieux abandonnés est d'autant plus soulignée. Cette porte qui donne sur une serre ouverte à tous vents et des pavés descellés ne vaut-elle pas les entrées de certaines ruines antiques, du moins pour ce qui est de l'atmosphère d'abandon et d'oubli?Et pourtant, l'existence même d'une ruine ne témoigne-t-elle pas d'une espérance encore vivace? Si les propriétaires de ces serres se résignaient à admettre qu'il n'y a plus aucune espoir de relancer leur exploitation (commerciale ou autre), ne les abattraient-ils pas? Mais pour détruire, il faut aussi avoir une idée en tête et avoir conçu une utilisation nouvelle du site. Paradoxalement, donc, l'existence de ruines est aussi le signe d'une impossibilité de concevoir une espérance quelconque face au futur. Espoir dans le passé, désespoir face au futur : voila une alternative qui contient toute la décadence des civilisations.

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2009-04-08

 

Suprématie : la couverture

Pause publicitaire — Le nouveau roman de Laurent McAllister, Suprématie (La vengeance d'Alcaino) en donnera aux lecteurs pour leur argent : plus de 700 pages d'action, d'idées et de surprises, le tout sous une couverture que l'on peut désormais admirer sur le site des Éditions Bragelonne.

Un recueil de nouvelles (titre provisoire : Les leçons de la cruauté) de Laurent McAllister doit aussi paraître cette année aux Éditions Alire et complète, pour l'instant, son programme de publications en 2009. L'auteur est d'ailleurs en train de mettre les dernières touches à la traduction d'une nouvelle inédite en français, « Kapuzine and the Wolf: A Hortatory Tale », mais déjà parue en anglais (dans l'anthologie Witpunk réunie par Claude Lalumière et Marty Halpern) et en russe (dans l'édition moscovite de la même anthologie).

Selon la rumeur, Laurent McAllister doit également inaugurer un site internet cette année pour faire la promotion du roman... En tout cas, je serai aux Imaginales d'Épinal pour défendre le livre, même si je ne sais pas encore dans quelles circonstances exactement.

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2009-04-07

 

Histoires astronomiques

La fermeture possible de l'Observatoire du mont Mégantic suite à des coupures (encore!) du gouvernement Harper, cette fois dans le financement des sciences, a donné une coloration étrange à cette journée de l'astronomie organisée par l'Université d'Ottawa. J'ai tenu une table où j'avais mis en vedette mes romans de science-fiction pour jeunes avec un titre à saveur astronomique (Les Bannis de Bételgeuse, Le Revenant de Fomalhaut, Le Perroquet d'Altaïr) et j'ai d'ailleurs reçu quelques visites de fans de sf (pas tous francophones, malheureusement), outre celle d'un soucoupiste.

En soirée, j'ai livré une conférence sur « L'histoire de l'astronomie au Canada, de Champlain à Garneau ». Le thème est devenu, un peu accidentellement, celui de l'abandon du Canada comme plate-forme d'observation par les astronomes canadiens. L'Observatoire David Dunlap a fermé. L'Observatoire du Mont Mégantic étant menacé, il ne restera plus (pour l'astronomie optique de grande envergure) que l'observatoire de Victoria, lui-même de plus en plus affecté par la pollution lumineuse. Par conséquent, les astronomes canadiens travaillent de plus en plus souvent à l'étranger : observatoire Canada-France-Hawaii, observatoires Gemini, accès au Hubble...

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2009-04-06

 

Rues montréalaises

Hier, après avoir fait le saut de l'autre côté de la ville afin d'encaisser un loyer pour ma petite sœur, je suis revenu à pied, au soleil. Le fond de l'air pourtant printanier était assez cinglant, mais une bonne marche m'a réchauffé, en partant du magasin de vélos qui appartient pour moitié au locataire en question. Cette boutique bénéficie d'une devanture qui a de quoi attirer l'attention comme on peut le voir dans la photo ci-contre : on ne peut certainement pas nier que ce soit voyant! Il le faut sans doute puisqu'elle a pignon sur rue à quelques pas du carrefour, sur une artère plutôt résidentielle. Et l'édifice lui-même n'a sans doute pas été conçu pour accueillir un commerce au rez-de-chaussée, d'où une absence de vitrine, etc. Le choix des propriétaires s'explique-t-il aussi par une volonté de rejoindre la communauté des cyclistes à Montréal, qui se perçoivent souvent comme des esprits indépendants, voire des marginaux? (Ce qui ne va pas sans ironie quand on compare les voies réservées pour cyclistes à Montréal avec les efforts parfois nettement moins probants dans les autres grandes villes canadiennes.) J'ignore si les propriétaires rangent la nuit certains éléments de leur décor ou s'ils font confiance à l'honnêteté des passants — ou à leur désintérêt pour ce qu'ils pourraient prendre pour de simples bricolages? Non loin de là, j'ai croisé sur mon chemin une boutique utopique (ci-dessus). Mais l'utopie à Montréal, si on y regarde d'un peu plus près, c'est la coiffure, la pose d'ongles, l'épilation et les soins des pieds... Un peu plus loin, j'ai pris en photo une boutique nettement plus vénérable, Uniformes Trans-Canada (photo ci-contre). Ce commerce d'uniformes pour les travailleurs remonte à 1958, ce dont témoigne le style des grandes affiches vitrées, éclairées la nuit et posées sur les façades de l'immeuble. Les automobilistes sur la rue Saint-Denis ont le plus souvent l'occasion d'observer la devanture, mais j'ai choisi d'immortaliser la façade latérale, que l'on voit en remontant la rue vers le nord, mais pas vraiment dans l'autre direction (à moins de risquer l'accident). Quelques rues plus loin, c'est un tout autre style qui s'exhibe dans le cas de la cour à bois et centre de rénovation L. Villeneuve, qui a ouvert ses portes en 1973. Admirons le totem qui est sans doute censé illustrer l'art de tailler le bois, mais qui jure un peu dans un décor urbain si loin de l'océan Pacifique... Les rues de Montréal, ce sont aussi des maisons et des habitations d'une grande variété. Les édifices pourvus de balcons et d'escaliers extérieurs sont bien connus des visiteurs qui ont découvert Montréal pour la première fois, et parfois c'est tout ce dont ils se souviennent. Mais il existe des résidences en tous genres, y compris des maisonnettes (comme celle dans la photo ci-dessous) qui remontent à une époque de budgets familiaux nettement plus modestes... Depuis la ville s'est enrichie et on a construit des logements un peu plus spacieux, s'élevant sur un étage supplémentaire ou deux, mais certains pavillons d'autrefois subsistent encore.Tout ceci m'a inspiré l'idée de voir ce qu'on disait des rues de Montréal dans les ouvrages du début du XIXe s. Certes, Montréal n'était guère plus que le Vieux-Montréal à cette époque, mais on peut obtenir ainsi des impressions contrastées. Ainsi, dans une édition de 1843 des lettres de Catharine Parr Traill, une note en bas de page évoque une ville lugubre et sinistre, en particulier le dimanche : « « Il est impossible (dit M. Talbot, dans son livre intitulé Cinq ans de résidence), de se promener dans les rues de Montréal un dimanche ou un jour de fête, quand les boutiques sont fermées, sans recevoir les plus sombres impressions ; la ville entière paraît une vaste prise » — Il fait ainsi allusion aux volets des fenêtres et aux portes extérieures, qui sont en fer, et dont l'emploi a été adopté pour prévenir les effets du feu.» Le 21 mai 1844, un journal montréalais, Mélanges religieux, scientifiques, politiques et littéraires (un ancêtre en quelque sorte de Culture des futurs) annonce : « Le porte-manteau ou la caisse de livres dont nous avons annoncé la trouvaille dans notre avant-dernier numéro, n'a pas encore été réclamé. Comme les livres et les papiers sont en langue anglaise, les journaux de cette langue rendraient sans doute service au propriétaire s'ils avaient la complaisance de reproduire les lignes suivantes : Un porte-manteau, rempli de livres et de papiers, a été trouvé das les rues de Montréal. Le propriétaire le retrouvera en s'adressant au bureau des Mélanges religieux. » Le 9 mai 1849, dans L'Ami de la religion et de la patrie, les nouvelles sont moins bénignes, deux semaines à peine après l'incendie du Parlement (que l'on voit dans cette aquarelle de Charles William Jefferys) par les conservateurs (qui ont garanti ainsi qu'on ne songerait plus jamais à faire de Montréal une capitale) : « Les journaux tories publient, proclament hardiment et impunément les rapports et les sentiments les plus séditieux, se faisant aussi les échos de la rue. Une correspondance des plus actives se poursuit par la voix même du département de la Poste de Sa Majesté avec toutes les parties de la ville où règne de la sympathie pour le parti mécontent. Un maître de Poste d'une de nos paroisses au sud du fleuve, rapportait avec alarme l'autre jour, que par la même malle il était arrivé de Montréal 80 et quelques lettres à l'adresse des tories de sa paroisse, une pour chacun d'eux, et que depuis ce temps ces gens ont l'air de comploter ensemble. Dans les rues de Montréal on semble remarquer des signes d'intelligence, on croit entendre des mots de reconnaissance entre ceux dune certaine coterie.» Le 12 août 1854, un autre journal, Le Scorpion, de tendance plus humoristique (il se présente comme le « Journal des morsures publiques ») lance des colles sur les artères montréalaises : « En combien d'années pourrait-on réparer les rues de Montréal, sachant que pour paver celle appelée Great St. James, l'on travaille depuis le printemps et qu'on espère avoir terminé avant l'hiver? » ou « Pourquoi les rues de Montréal sont-elles, parfois éclairées au gaz durant le jour, et ne le sont presque jamais la nuit? »... (Réponse à la devinette : les rues sont encore en réparation cent cinquante-cinq ans plus tard!) En octobre 1860, le Journal de l'Instruction publique décrit plutôt les nouvelles qu'on se criait dans la rue : « d'abord, notre Gracieuse Souveraine et le Prince son époux, lord John Russell et l'aînée des princesses royales, et toute une suite que l'on peut imaginer, viennent de parcourir l'Allemagne, où, tous ensemble, ils ont été sur le point d'être broyés sur un chemin de fer, dans une collision qui parut un moment inévitable, et cela sans préjudice à une chûte de voiture dans laquelle quelques jours auparavant, le Prince Albert avait failli éprouver le sort funeste du dernier Duc d'Orléans. Le soir de l'embarquement du Prince de Galles à Portland [Maine], on criait dans les rues de Montréal la première de ces nouvelles, et il n'est personne qui n'ait frémi en songeant que, sans la présence d'esprit d'un ingénieur, le récit d'une aussi terrible catastrophe aurait attendu le jeune Prince au retour de sa tournée triomphale! »

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2009-04-05

 

Le Romantisme magique

En 2004, le roman de fantasy par Susanna Clarke intitulé Jonathan Strange and Mr Norrell a été compté au nombre des sensations littéraires de l'année. Gros pavé lourd de 782 pages dans l'édition que j'ai reçue en cadeau, l'ouvrage renoue avec un rythme d'écriture comme on n'en trouve plus guère. Comme dans les romans anglais du XIXe siècle, on rencontre une série de personnages, dont on présente parfois toute l'histoire familiale, ou parfois non. Leurs aventures nous retiennent un instant, puis l'auteur reprend le fil d'une intrigue antérieure, avant de revenir beaucoup plus tard pour faire le lien et nous montrer la convergence de destins que l'on croyait distincts. Mais, bien entendu, dans les romans de Dickens et des autres écrivains britanniques contemporains, les mondes les plus éloignés sont condamnés à se rencontrer... Malgré l'emploi de personnages historiques et les références littéraires surabondantes, il s'agit toutefois d'une uchronie puisqu'il s'agit d'une Grande-Bretagne dont toute l'histoire porte l'empreinte de la magie.

L'uchronie n'est certes pas très rigoureuse. Logiquement, on aurait pu s'attendre à des bouleversements de l'histoire majeurs en raison de l'existence pendant plusieurs siècles d'un royaume d'Angleterre du Nord gouverné par un roi-magicien immortel, John Uskglass, le « Raven-King » qui a également asservi un royaume en terre de féerie et un autre au-delà des enfers... Mais, au début du XIXe siècle, l'Angleterre réunifiée après la disparition du roi-magicien est en guerre avec la France de Napoléon. Comme d'habitude. Un des derniers magiciens anglais, Jonathan Strange, va d'ailleurs participer à la campagne d'Espagne de Wellington et lui donner plusieurs coups de pouce magiques — ainsi qu'à Waterloo, d'ailleurs. (Napoléon ne s'en remettra pas.) De nombreux personnages parfaitement historiques hantent d'ailleurs les pages du roman, y compris Byron, Shelley et quelques autres Romantiques.

Toutefois, c'est la mise en scène de la magie qui est l'ingrédient le plus fascinant du roman. Dans un sens, c'est une version de la magie chez J. K. Rowling, mais pour adultes. C'est-à-dire que les sorts, sortilèges et enchantements se trouvent également dans de vieux livres et manuscrits, signés par des magiciens des siècles passés. Et Norrell convoque un être féerique au moyen d'une incantation latine, composée dans un latin élémentaire mais quand même plus authentique que le pseudo-latin de Rowling. Par contre, Susanna Clarke a travaillé fort pour nous montrer des emplois de la magie plus originaux que la moyenne. Et la magie reste un phénomène plus indiscipliné que dans les romans pour jeunes de Rowling.

Le roman traîne parfois en longueur, malgré toute la verve de Clarke et son génie pour camper des personnages bien typés, et souvent surprenants. Le problème, c'est qu'on trouve difficilement des personnages sympathiques, et tout aussi difficilement des personnages antipathiques. L'ennemi désigné, c'est l'être magique que Norrell appelle pour lui demander de faire revivre une femme morte; en échange, ce seigneur de féerie réclame la moitié de la vie de la ressuscitée et il va en profiter pour lui imposer sa volonté et l'appeler dans son palais ruiné toutes les nuits. (Même si Norrell a été berné, on s'interroge sur le respect des conditions de l'entente puisque la jeune femme sacrifie non seulement ses nuits mais ses jours au plaisir de son maître.) Ce seigneur de la magie tourmentera d'autres victimes, mais sans jamais qu'on sache s'il est tout à fait conscient de les faire souffrir. Clarke semble suggérer que la toute-puissance magique du personnage l'a corrompu jusqu'à la moelle.

Or, le fait est, justement, que les deux magiciens du titre trahissent déjà quelques signes de l'arrogance et de la corruption favorisées par les pouvoirs qu'ils maîtrisent et portées à leur comble dans le personnage de leur antagoniste. Du coup, le roman se termine essentiellement par accident, grâce au genre de coïncidences qui caractérisaient d'ailleurs la littérature anglaise du XIXe siècle. Bref, un peu comme dans certains de ces romans, on goûte moins l'ouvrage comme un tout organique et une création artistique en soi, et plus comme un voyage en terre étrangère qui nous a permis de faire la connaissance de personnes intéressantes — tout en sachant qu'on pourra revenir chez soi une fois le livre refermé.

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2009-04-04

 

Et si la culture contre-attaquait?

Après l'offensive conservatrice, il est temps de penser à la contre-attaque. On peut certes signer des pétitions pour déplorer les coupures à Radio-Canada et mobiliser les artistes pour qu'ils s'expriment sur toutes les tribunes disponibles, on peut même former l'union sacrée au Québec pour stopper les Conservateurs de Harper, mais ceci n'aura qu'un effet limité hors de certains milieux, et de certaines frontières. Alors, comment faire?

Il y a déjà deux ans et demi, quand Harper avait commencé à s'en prendre à la culture (en ciblant les musées, par exemple), j'avais écrit en septembre 2006 que cela lui coûterait des voix, mais qu'il fallait se demander si cela lui coûterait la prochaine élection. Et j'avais répondu :

« Pas si sûr. Les Libéraux ont commis l'erreur, durant leurs dernières années au pouvoir, de se montrer également peu réceptifs aux priorités plus culturelles ou sociales. On se souviendra de la promesse de dernière minute d'augmenter le budget du Conseil des Arts du Canada... Par conséquent, ils sont mal placés pour bénéficier d'un rejet des Conservateurs de Harper sur ce front. Quant au Québec, tant que le Bloc continue à jouer le blocage, il ne pourra pas vraiment peser dans la balance. Son importance va diminuer, d'ailleurs, maintenant que l'Alberta et la Colombie-Britannique ont le même poids démographique ensemble que le Québec. »

Depuis, les Conservateurs de Harper ont clairement fait une croix sur le Québec. Ils se contenteront de rafler quelques sièges dans les circonscriptions qui votent par esprit de contradiction et ils cibleront les autres provinces, ou se résigneront à enchaîner les gouvernements minoritaires. Le fait est que la crise parlementaire de décembre dernier a montré que la voie est étroite pour les Libéraux comme pour les Conservateurs. Impossible de renverser le gouvernement en chambre et d'espérer prendre le pouvoir avec une coalition : Harper a démontré qu'il est prêt à attiser les tensions entre anglophones et francophones de sorte qu'un gouvernement avec l'appui des Bloquistes serait discrédité à l'extérieur du Québec. Et l'électorat du Bloc serait plus que réticent à soutenir un gouvernement fédéral, et forcément fédéraliste. Par conséquent, le gouvernement ne sera battu que s'il le veut ou que si les trois autres partis jugent de leur intérêt — au même moment — d'aller en élection. Ce n'est pas impossible, mais c'est suffisamment improbable pour assurer aux minorités conservatrices une durabilité surprenante.

Certes, depuis 2006, je crois que le secteur culturel s'est plus ou moins réconcilié avec les Libéraux. Mais si la culture compte pour beaucoup dans l'économie du Québec, ce n'est pas nécessairement le cas ailleurs au Canada. Par conséquent, tant que le Bloc dominera au Québec, le gouvernement Harper pourra se permettre de sabrer presque impunément dans la culture et dans tout ce qui touche le Québec, et plus que jamais puisqu'il est maintenant établi que le Bloc est un tigre de papier qui peut empêcher un parti de gagner au Québec, mais pas de remporter suffisamment de sièges ailleurs pour former un gouvernement. Et tant que le Bloc ne pourra pas appuyer un gouvernement de rechange en chambre, une minorité à l'échelle du pays deviendra une majorité dans la Chambre des Communes.

Bref, si le secteur culturel québécois voulait contre-attaquer de manière efficace, peut-être devrait-il cibler le Bloc...

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2009-04-01

 

Entrer et sortir du marché du travail

Dans plusieurs métiers, on réserve les boulots les plus ingrats aux jeunes qui débutent. (En anglais, on parle de « entry-level jobs ».) Stagiaires, contractuels, employés à temps partiel sans droit de parole, ils forment souvent une main-d'œuvre corvéable à la merci de leurs aînés dans le domaine, qui exploitent sans vergogne (et sans toujours payer grand-chose) tant leur énergie que leurs connaissances parfois plus à jour. S'ils sont sous-payés, c'est au nom de leur manque d'expérience et de la sacro-sainte hiérarchie construite en fonction de l'ancienneté.

Cela peut sembler juste : l'expérience est un bien précieux, qui se monnaie, et les employés qui ont dépassé la trentaine ont souvent charge de famille. Ils méritent les salaires qu'on leur verse, et ils en ont un besoin réel.

Néanmoins, quand on réfléchit au vieillissement de la société, on réfléchit nécessairement à l'équité entre les générations. Est-ce juste qu'un âge de la retraite fixe profite de plus en plus à des retraités jouissant d'une plus grande espérance de vie? Est-ce juste que l'employé en fin de carrière, doté d'une plus ou moins grande énergie et d'une plus ou moins grande maîtrise des nouveaux outils techniques, obtienne souvent les meilleurs salaires? Est-ce juste que le quasi-retraité, qui n'a probablement plus d'enfants à charge et qui a eu tout le temps voulu pour s'acheter une maison et se ménager un régime de retraite, continue à décrocher la timbale?

Symétriquement, il semblerait plus juste qu'il y ait des catégories d'emploi autant pour les débutants que pour les finissants. (Des exit-level jobs...) Si les jeunes ont l'énergie et le savoir, mais pas l'expérience, tandis que les quinquagénaires et sexagénaires en fin de course ont l'expérience, mais pas toujours l'énergie ou la capacité de se renouveler, ne serait-il pas logique que les quasi-retraités soient sous-payés en conséquence?

Mais il faudrait une révolution...

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