2014-06-07

 

Le retour du Ressuscité de l'Atlantide

Le ressuscité de l'Atlantide ressuscite.  Mon premier roman connaît une troisième vie, cette fois en format numérique aux éditions Multivers.  Pour 1,50 euros, on peut avoir dans sa collection une des premières briques de mon histoire du futur qui inclut aussi le roman Pour des soleils froids, dix-huit romans pour jeunes et de nombreuses nouvelles.

Pour la petite histoire, je n'avais pas prévu d'écrire un feuilleton quand j'ai soumis à la revue imagine... ce qui était censé être une nouvelle, la troisième de ma jeune carrière littéraire.  Le directeur littéraire, Jean-Marc Gouanvic, s'est montré intéressé par cette soumission et il m'est revenu en suggérant que j'en fasse le premier épisode d'un feuilleton.  Nous sommes en 1984 ou 1985, la revue imagine... existe depuis 1979 et, dès le début, la rédaction a privilégié les expériences et expérimentations littéraires de tout acabit.  Un récit d'Esther Rochon, L'Épuisement du soleil, est déjà paru en quatre livraisons dans imagine... en 1979-1980, l'autrice en tirant un roman en 1985.  En 1982-1984, la revue a également publiée une bande dessinée de Raymond Dupuis, Zolt, sous une forme épisodique un peu irrégulière.  Néanmoins, il faut une certaine audace à Gouanvic pour donner carte blanche à un jeune auteur de dix-sept ans et lui garantir la publication des épisodes subséquents dont il n'existe à peu près rien.

Ainsi, ce qui est actuellement le prologue du roman est pour l'essentiel le texte d'origine de cette nouvelle.  En fin de compte, j'ai signé huit épisodes publiés d'août 1985 — alors que je venais d'avoir dix-huit ans — à août 1987.  Chaque épisode était illustré par un dessin d'Olivier Morissette, un jeune créateur aussi à cette époque.  Des traces du feuilleton subsistent dans le texte actuel puisque le début de plusieurs chapitres inclut un résumé de la situation ou un rappel des événements antérieurs.  Pourtant, j'ai révisé le texte d'origine quand je l'ai soumis au Fleuve Noir vers 1993, mais je ne crois pas qu'il s'agissait d'une réécriture complète.  (Je laisse aux exégètes le soin de comparer en détail le feuilleton d'origine et le texte de 1994.)  Du coup, quand ce roman est paru dans la collection Anticipation fin 1994, son inspiration première remontait dix ans plus tôt.  Même si j'étais à l'université quand j'ai signé les derniers épisodes en 1986-1987, je me souviens encore d'avoir rédigé certains passages des premiers épisodes en classe à l'école secondaire, pratiquement sous le nez de mes enseignants d'alors.  (À l'époque, l'école secondaire en Ontario allait jusqu'à la 13e année.)  Un des personnages, Julio Quarry, doit d'ailleurs son nom à un copain de classe, Jules Carrière, et une jeune fille qui faisait battre mon cœur un peu plus vite a donné son nom de famille, Coyles, à un autre personnage.

En 2014, par conséquent, l'inspiration première du roman remonte maintenant à trente ans dans le passé.  On notera au fil des pages des allusions à des dates — 1998, 2010 — qui étaient futuristes en 1985-1987, mais qui relèvent aujourd'hui de notre passé.  Toutefois, comme le roman se passe en 2215 et que je laisse planer un grand flou sur les événements du vingt-et-unième siècle d'avant la Troisième Guerre mondiale, ce ne sont pas les quelques contradictions qui risquent de déranger le plus les lecteurs modernes.

Par contre, il devrait être clair qu'il s'agit d'une œuvre de jeunesse, avec tous les défauts que cela peut entraîner quand l'auteur n'est pas un génie, décalque le style de la littérature d'aventures qu'il préfère et manque singulièrement d'expérience de la vie.  De plus, je n'étais pas non plus à la pointe de ce qui se faisait de plus révolutionnaire en science-fiction à l'époque.  Du côté français, je ne découvrirais le groupe Limite et les ouvrages de ses auteurs qu'à partir de 1989 environ.  Du côté anglophone, même si Jean-Marc Gouanvic avait trouvé dans ce feuilleton des éléments qui lui rappelaient le cyberpunk de Gibson, je n'allais lire les classiques du genre qu'à partir de 1987 environ.

L'influence initiale dont j'étais pleinement conscient est celle de Larry Niven, qui met en scène dans plusieurs textes des années 1970 des corpsicles, des personnes soumises à une congélation cryogénique pour être réveillées (parfois) dans un monde futuriste.  En particulier, dans A World Out of Time (1976), on a un personnage du vingtième siècle ressuscité au vingt-deuxième siècle dans un monde qui ne reconnaît pas ses droits.  Je suis parti de cette idée générale en rejetant d'abord la possibilité qu'on puisse ranimer des personnes congelées qui auraient conservé l'intégralité de leurs souvenirs et je me suis demandé ensuite ce qu'une société ferait de personnes ressuscitées qui seraient essentiellement amnésiques (atteintes d'amnésie rétrograde pour être précis).  Tout le reste a suivi, dans le contexte d'une histoire du futur que je développais depuis plusieurs années.

Longtemps après la parution initiale du Ressuscité de l'Atlantide, je me suis rendu compte que des influences inconscientes avaient également joué.  D'une part, il y a des réminiscences de plusieurs aventures de Ric Hochet.  Dans Piège pour Ric Hochet (1967) et dans La Piste rouge (1977), il y a un docteur Vogler.  Or, j'étais abonné au magazine Tintin et j'avais presque certainement lu dans ses pages la seconde aventure où ce médecin véreux fait croire qu'il est capable d'opérer des greffes de cerveau.  De la greffe de cerveau à l'implantation de faux souvenirs, il n'y a pas loin.  Enfin, dans Épitaphe pour Ric Hochet (1973), le héros a perdu la mémoire et on lui fait croire qu'il est quelqu'un d'autre.  Je me souviens d'avoir été marqué très jeune par cette aventure qui était parue dans un des tout premiers numéros du magazine Tintin que mon père m'achetait et que ma mère me lisait, du moins au début.

D'autre part, en relisant récemment Cette chère humanité (1976) de Philippe Curval, j'ai découvert plusieurs éléments (en particulier, la manie de la collection dans la société du Marcom) qui refont surface dans mon roman.  Dans ce cas comme dans celui des aventures de Ric Hochet, je crois bien qu'il faut parler de cryptomnésie, car je n'en avais aucun souvenir conscient, même si je sais que j'ai lu ce roman très tôt.  (J'étais un très gros lecteur dans ma jeunesse et j'avais sans doute lu plus d'un millier de livres, sans parler des numéros de Tintin ou Spirou, avant d'entamer l'écriture du Ressuscité de l'Atlantide.)  Néanmoins, l'avantage de la science-fiction, c'est que le travail de création de monde, s'il est réfléchi, empêche de réutiliser aveuglément les influences et implique plutôt un recyclage qui est, dans le pire des cas, une courtepointe ou un bricolage lévi-straussien, mais qui devient, dans le meilleur des cas, un amalgame suffisamment neuf pour être original en soi.

Même si le reste a vieilli, je reste justement assez fier du travail de création de monde et d'anticipation du roman.  Les personnages lisent les journaux sur un écran-éponge qui semble être une forme de papier électronique qu'on alimente par branchement dans une console — bref, une liseuse souple (très) grand format.  La plupart des transactions sont électroniques, mais les espèces sont encore utilisées, en particulier pour échapper à la surveillance des gouvernements....  Un gamin dans un avion suborbital fait ses devoirs avec un petit ordinateur sur ses genoux en lui branchant des unités de mémoire grosses comme le doigt — nos clés USB actuelles sont nettement plus petites, mais si la scène se trouvait dans le texte de 1987 (je n'ai pas vérifié), elle expliquerait pourquoi je me sens pas du tout dépaysé dans le monde d'aujourd'hui.


Cette nouvelle édition du Ressuscité de l'Atlantide incorpore quelques corrections mineures.  Même si j'ai été tenté de réviser le texte en profondeur, il aurait fallu une réécriture d'une telle ampleur que le roman n'aurait plus été le même.  Par conséquent, il s'agit à plus de 99% du même texte qu'en 1994.  Ce qui manque à la nouvelle édition, évidemment, c'est la très belle couverture de Gilles Francescano.


2014-06-01

 

Quelques capsules historiques de ma plume (1)

Dans une autre catégorie d'écriture, celle de la vulgarisation historique, j'ai récemment fait paraître des capsules portant sur de grandes figures de l'histoire des sciences dans le cadre de manuels de physique signés par René Lafrance et destinés au niveau collégial québécois (pré-universitaire, en fait).

Le premier volume, sur la mécanique, inclut des capsules consacrées à Galilée, Descartes, Newton et l'évolution des théories de la gravitation de Kepler à Einstein.  Le second volume, sur l'électricité et le magnétisme, inclut des capsules consacrées à Coulomb, Ørsted et Ampère, Gauss et Faraday.


Libellés : , ,


This page is powered by Blogger. Isn't yours?