2008-03-16

 

Teatro Universale (11)

Le 16 mars 1839, alors que l'année est presque entièrement entamée au quart, la modernité technologique a enfin droit aux honneurs de la première page. Comme de raison, l'illustration d'un nouveau tunnel ferroviaire arrive de la Grande-Bretagne, via le Penny Magazine et le Penny Cyclopaedia, à première vue. Il s'agit du tunnel de Primrose Hill au nord de Londres, construit par William Budden sous la supervision de Robert Stephenson, à qui on doit aussi la conception du pont Victoria de Montréal. Le tunnel faisait partie de la ligne ferroviaire reliant Londres à Birmingham, complétée en 1837. Sa construction achevait d'unir pour la première fois par le rail les quatre villes les plus importantes de l'Angleterre, Londres, Birmingham, Manchester et Liverpool. La première phrase de l'article révèle en un sens pourquoi le Teatro Universale ne sentait pas l'urgence de s'intéresser prioritairement à la Révolution industrielle : « L'arte di fare le strade di ferro, cioè con le guide delle ruote o i rotedotti (rails) di ferro, benchè nata appena l'altr'jeri, è già cresciuta gigante. » Sans compter les tentatives avortées ou les expériences privées, les trains à vapeur circulaient pourtant depuis déjà quatorze ans sur des lignes commerciales. Pourtant, pour la rédaction du Teatro Universale, c'était à peine hier. Évidemment, Davide Bertolotti avait cinquante-cinq ans environ en 1839. Il avait vu neiger et il avait passé l'âge des enthousiasmes. C'est ce qui pourrait expliquer sa réserve...

Néanmoins, il n'ignore pas que les voies ferrées font maintenant partie d'un débat international sur l'avenir des transports et l'article se termine sur un tableau des performances obtenues pour le transport des marchandises par canal, par voie ferrée et par la route. L'auteur indique : « noi riporteremo il paragone fatto in Inghilterra tra l'utilità delle strade di ferro e quella de' canali navigabili, argomento ormai divenuto assai grave anche per l'Italia. » Les ouvrages d'art monumentaux associés aux voies ferrées retiennent néanmoins l'intérêt de par leurs qualités propres et ce numéro du Teatro Universale inclut aussi une gravure d'un viaduc ferroviaire sur la rivière Avon, sans doute celui-ci tel que représenté dans Rides on Railways de Samuel Sidney vers 1851.N'était-ce de cette mention de l'Italie, il serait tentant de penser que l'inclusion occasionnelle de nouvelles industrielles en provenance de la Grande-Bretagne ne prêterait pas à conséquence. Il s'agirait en quelque sorte de l'équivalent ethnologique pour la Grande-Bretagne des descriptions des mœurs et des cadres de vie d'autres pays exotiques. Si les Circassiens avaient des coutumes étranges, les Britanniques aussi...

Dans le reste du numéro, on trouve un poème du poète Cesare Arici (1782-1836) tiré de La Pastorizia (Brescia, 1814) sur les bergers qui se réfugient à l'ombre durant les heures chaudes.

Le premier article d'une série sur la mythologie des Alpes promet de se nourrir des textes de Tullio Dandolo et d'Alexandre Dumas. (Mary Shelley aussi avait, en son temps, recueilli quelques légendes des Alpes.) Toutefois, le rédacteur emprunte surtout à Dandolo — sans doute de son Viaggio nella Svizzera Orientale (1836) — dans cette première livraison. Le texte porte d'abord sur les nains du folklore alpin : de petits êtres serviables, mais qui détestent être épiés ou ridiculisés. Visibles de l'Annonciation à la Toussaint, ils se terrent pendant le reste de l'année dans leurs palais souterrains. Mais il est aussi question de quelques autres légendes : malédiction qui font dévaler un glacier, source miraculeuse qui coule uniquement pour les bergers et les troupeaux quand ils séjournent sur l'alpage, tarissant autrement... L'auteur cité offre une explication prosaïque de ce prodige, lié au dégel printanier des névés et aux premiers gels de l'automne qui forcent le départ des troupeaux...

La suite de la notice sur la niellure voisine avec une livraison des Effemeridi istoriche universali consacrée à Carlo Boucheron (1773-1838), qui venait tout juste de mourir un an auparavant. Deux anecdotes complètent le numéro, l'une sur Napoléon qui fit don de vingt canons pris à Austerlitz à Martin-Michel-Charles Gaudin (1756-1841), duc de Gaëte, pour fabriquer un balancier en bronze pour la frappe de la monnaie et l'autre sur Dante, dont le sel m'échappe.

Table des matières : Teatro Universale 235, 236, 237, 238 (janvier); 239, 240, 241, 242 (février); 243, 244 (mars).

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