2008-12-09
Et c'est le plus jeune qui débarque!
On se plaint du manque de participation électorale au Québec, en particulier chez les jeunes. Et qu'arrive-t-il? La moyenne d'âge des chefs de parti vient d'augmenter. Cherchez l'erreur!
En effet, de tous les chefs (ou porte-parole) de parti, c'est Mario Dumont (né en 1970) qui se retire, et non Guy Rainville (né en 1963), Amir Khadir (né en 1961), Jean Charest (né en 1958), Pauline Marois (né en 1949) ou Françoise David (né en 1948)... Bref, avec le départ de Dumont, toutes les directions de partis provinciaux restent entre les mains des baby-boomers. Certes, contrairement à Dumont, Khadir est un visage neuf et non une vieille godasse, mais s'il est traité avec une telle complaisance, c'est peut-être parce qu'il incarne des idées de gauche familières aux têtes vieillissantes qui dominent les médias et dont a vu la nostalgie soixante-huitarde cette année.
Bref, le renouvellement se fait attendre et il ne faudrait pas s'étonner qu'une partie grandissante de la population (comme à Montréal-Nord) se sente déconnectée d'une société qui les ignore. Si la baisse de la participation électorale hier correspond à une désaffection des jeunes électeurs adéquistes de la dernière fois, c'est peut-être parce que, une fois l'ADQ éliminée pour cause d'impéritie, ils ne se retrouvaient pas dans les autres partis.
En effet, comme on l'a fait remarquer hier soir, ce sont 730 477 votes de moins qu'en 2007 qui ont été exprimés. Le Parti Libéral du Québec a obtenu 49 137 voix de plus et le Parti Québécois 13 639 voix de plus (toute une renaissance!). Malgré l'élection de Khadir, Québec Solidaire a perdu 21 357 voix et le Parti Vert 82 200 voix. Bref, on a au moins le droit de soupçonner que les abstentionnistes avaient voté en grande partie pour l'ADQ et les deux petits partis en 2008.
Ceci suggère qu'il existe une réserve substantielle de votes pour un parti capable d'offrir un programme plus inclusif et plus à l'écoute des nouvelles forces du Québec. Car, si l'analyse initiale suggère une désaffection du vote adéquiste, un second regard suggère surtout une désaffection du vote urbain, en particulier montréalais.
Taux de participation provincial : 57.33%
Moyenne des taux de participation dans les villes du Québec, selon mon propre calcul qui retient les villes québécoises parmi les 100 plus peuplées au Canada et les circonscriptions associées : 55.54%
Moyenne des taux de participation sur l'île de Montréal, selon mon propre calcul : 48.89%
Certes, les jeunes sont souvent plus nombreux dans les villes et dans certains centre-villes, mais ils ne sont pas les seuls. Les souverainistes québécois fantasment toujours au sujet du « vote ethnique », mais ce vote semble s'exprimer beaucoup moins lourdement qu'ils le croient. Pourquoi?
Selon ce site (.PDF), les immigrants représentaient 9,9% de la population québécoise en 2001 et les minorités visibles représentaient 6,9% de la population. Ces deux chiffres ne se confondent pas entièrement mais doivent s'additionner au moins en partie. Or, chez les nouveaux élus, si je cherche des représentants des nouveaux immigrants et des minorités visibles, je ne vois guère qu'Amir Khadir, Maka Kotto, Fatima Houda-Pépin, Emmanuel Dubourg, Yolande James et Sam Hamad, soit 5% de l'Assemblée nationale. Ce n'est pas tant un problème de sous-représentation humaine (car la participation dans les circonscriptions correspondantes a généralement été au-dessous de la moyenne provinciale) que de sous-représentation des priorités de cette population urbaine dans les programmes politiques, encore dominés par les besoins des circonscriptions rurales qui, rappelons-le encore, sont souvent sur-représentées.
Bref, j'ai l'impression que la piètre participation signifie surtout que le Québec attend son Obama...
En effet, de tous les chefs (ou porte-parole) de parti, c'est Mario Dumont (né en 1970) qui se retire, et non Guy Rainville (né en 1963), Amir Khadir (né en 1961), Jean Charest (né en 1958), Pauline Marois (né en 1949) ou Françoise David (né en 1948)... Bref, avec le départ de Dumont, toutes les directions de partis provinciaux restent entre les mains des baby-boomers. Certes, contrairement à Dumont, Khadir est un visage neuf et non une vieille godasse, mais s'il est traité avec une telle complaisance, c'est peut-être parce qu'il incarne des idées de gauche familières aux têtes vieillissantes qui dominent les médias et dont a vu la nostalgie soixante-huitarde cette année.
Bref, le renouvellement se fait attendre et il ne faudrait pas s'étonner qu'une partie grandissante de la population (comme à Montréal-Nord) se sente déconnectée d'une société qui les ignore. Si la baisse de la participation électorale hier correspond à une désaffection des jeunes électeurs adéquistes de la dernière fois, c'est peut-être parce que, une fois l'ADQ éliminée pour cause d'impéritie, ils ne se retrouvaient pas dans les autres partis.
En effet, comme on l'a fait remarquer hier soir, ce sont 730 477 votes de moins qu'en 2007 qui ont été exprimés. Le Parti Libéral du Québec a obtenu 49 137 voix de plus et le Parti Québécois 13 639 voix de plus (toute une renaissance!). Malgré l'élection de Khadir, Québec Solidaire a perdu 21 357 voix et le Parti Vert 82 200 voix. Bref, on a au moins le droit de soupçonner que les abstentionnistes avaient voté en grande partie pour l'ADQ et les deux petits partis en 2008.
Ceci suggère qu'il existe une réserve substantielle de votes pour un parti capable d'offrir un programme plus inclusif et plus à l'écoute des nouvelles forces du Québec. Car, si l'analyse initiale suggère une désaffection du vote adéquiste, un second regard suggère surtout une désaffection du vote urbain, en particulier montréalais.
Taux de participation provincial : 57.33%
Moyenne des taux de participation dans les villes du Québec, selon mon propre calcul qui retient les villes québécoises parmi les 100 plus peuplées au Canada et les circonscriptions associées : 55.54%
Moyenne des taux de participation sur l'île de Montréal, selon mon propre calcul : 48.89%
Certes, les jeunes sont souvent plus nombreux dans les villes et dans certains centre-villes, mais ils ne sont pas les seuls. Les souverainistes québécois fantasment toujours au sujet du « vote ethnique », mais ce vote semble s'exprimer beaucoup moins lourdement qu'ils le croient. Pourquoi?
Selon ce site (.PDF), les immigrants représentaient 9,9% de la population québécoise en 2001 et les minorités visibles représentaient 6,9% de la population. Ces deux chiffres ne se confondent pas entièrement mais doivent s'additionner au moins en partie. Or, chez les nouveaux élus, si je cherche des représentants des nouveaux immigrants et des minorités visibles, je ne vois guère qu'Amir Khadir, Maka Kotto, Fatima Houda-Pépin, Emmanuel Dubourg, Yolande James et Sam Hamad, soit 5% de l'Assemblée nationale. Ce n'est pas tant un problème de sous-représentation humaine (car la participation dans les circonscriptions correspondantes a généralement été au-dessous de la moyenne provinciale) que de sous-représentation des priorités de cette population urbaine dans les programmes politiques, encore dominés par les besoins des circonscriptions rurales qui, rappelons-le encore, sont souvent sur-représentées.
Bref, j'ai l'impression que la piètre participation signifie surtout que le Québec attend son Obama...
Comments:
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Par un curieux hasard, je devais lire la lucidité de José Saramago (c'est un genre de suite à L'aveuglement, qui est sorti en film il n'y a pas longtemps) et j'ai eu le temps de le lire seulement lundi, soit le jour des élections. Et lire la lucidité un jour d'élection, c'est quand même assez spécial. En gros, une crise politique éclate dans la capitale, parce que 83% des bulletins sont blancs, et presque 100% de la population a voté. Le gouvernement cherche des responsables, déclare l'état de siège, toutes sortes de choses...
Enfin, dans la situation actuelle (les élections fédérales, provinciales, celles aux États-Unis, la crise à Ottawa, le faible taux de participation...), lire un roman comme ça, on dirait presque que c'est arrangé.
Alice
Enfin, dans la situation actuelle (les élections fédérales, provinciales, celles aux États-Unis, la crise à Ottawa, le faible taux de participation...), lire un roman comme ça, on dirait presque que c'est arrangé.
Alice
Evoquer Obama en parlant d'Amir Khadir ou de Mario Dumont aurait du sens si Obama s'était hissé à la présidence des USA en fondant son parti. Ce n'est pas du tout ce qui s'est passé : il a été soutenu par la machine bien huilée d'un grand parti on ne peut plus traditionnel. Personne n'aurait jamais entendu parler de lui sinon, sauf comme d'un idéaliste sans importance à la Ralph Nader, voire même néfaste car, comme Nader, il aurait encore plus divisé le vote "liberal" généralement associé aux démocrates.
L'exemple d'Obama devrait plutôt inciter Khadir et Mario Dumont à s'intégrer dans un parti qui a déjà une base solide - le Parti Québécois en l'occurrence puisque les deux sont explicitement ou implicitement souverainistes - pour le revivifier par leur jeunesse.
Joël Champetier
L'exemple d'Obama devrait plutôt inciter Khadir et Mario Dumont à s'intégrer dans un parti qui a déjà une base solide - le Parti Québécois en l'occurrence puisque les deux sont explicitement ou implicitement souverainistes - pour le revivifier par leur jeunesse.
Joël Champetier
Salut, Joël,
Note que je n'ai pas parlé d'un nouveau « parti capable d'offrir un programme plus inclusif et plus à l'écoute des nouvelles forces du Québec », mais d'un parti tout court.
Ce qui n'exclurait donc pas qu'un nouveau chef, à l'instar d'Obama, puisse s'emparer d'un vieux parti et le dépoussiérer.
Note que je n'ai pas parlé d'un nouveau « parti capable d'offrir un programme plus inclusif et plus à l'écoute des nouvelles forces du Québec », mais d'un parti tout court.
Ce qui n'exclurait donc pas qu'un nouveau chef, à l'instar d'Obama, puisse s'emparer d'un vieux parti et le dépoussiérer.
Je me demande si le PQ est réformable. Il mange ses chefs les uns après les autres, abandonne ses deux raisons d'être et remplace ses dépoutés par de plus jeunes, certes, mais dont c'est à peu près la seule qualité.
Quant au PLC, il représente des intérêts, mais pas nécessairement ceux de la population.
Et je ne saurais m'attrister du reflux de l'ADQ, car ce parti défend des options qui ne sont pas les miennes. Mario est jeune, ou plus exactement récent, mais cela ne signifie pas qu'ils défende des idées d'avenir. Son repli stratégique est peut-être motivé par l'appel de meilleures finance - et de plus d'influence, dans un secteur d'activité moins cosmétique que la politique... TSPM.
Quant au PLC, il représente des intérêts, mais pas nécessairement ceux de la population.
Et je ne saurais m'attrister du reflux de l'ADQ, car ce parti défend des options qui ne sont pas les miennes. Mario est jeune, ou plus exactement récent, mais cela ne signifie pas qu'ils défende des idées d'avenir. Son repli stratégique est peut-être motivé par l'appel de meilleures finance - et de plus d'influence, dans un secteur d'activité moins cosmétique que la politique... TSPM.
En chiffres absolus, le vote du PQ a enregistré une petite augmentation et on remarque un rajeunissement des cadres. Donc, il n'est peut-être pas condamné à s'étioler avec le vieillissement de son électorat.
Ce qui est dommage. Je trouve franchement idiote l'existence de partis qui font de l'accession à l'indépendance, à plus ou moins court terme, leur raison d'être, car elle paralyse le débat politique. Cet objectif peut empêcher des partis de rechange d'accéder au pouvoir avec de nouvelles idées (je n'aime pas le populisme de l'ADQ, mais il a au moins le mérite de remettre en cause certains dogmes) et conforter les partisans du statu quo.
L'option d'une accession à l'indépendance est maintenant acquise et pourrait être invoquée par n'importe quel parti du Québec si les circonstances l'exigeaient. Mais en faire un projet de société quand une minorité seulement l'appuie, c'est se plonger dans le bourbier parce qu'on sera toujours soupçonné de gouverner en fonction de cet objectif qu'une majorité rejette et non en fonction des meilleurs intérêts actuels de la province.
Mais bon, il reste une fraction importante de la population qui y croit comme on croyait aux lendemains qui chantent — et qui rejettera tout attentisme (les fameux « purs et durs ») — tandis que je soupçonne une autre partie de l'électorat ploquiste d'en faire un simple test de vertu tout en espérant, au fond, n'avoir jamais à le soumettre à l'épreuve de la réalité, qui serait forcément décevante.
En attendant, les deux partis principaux sont de nouveau des partis de pouvoir. Du coup, comme on l'a bien vu dans la campagne électorale, les deux trouveront difficile de remettre en cause les pratiques gouvernementales. L'inexpérience de l'ADQ était à la fois son plus grand atout et son plus grand défaut. De par son absence du pouvoir, il était libre de critiquer la gestion des routes ou des hôpitaux, par ex., sans se faire remettre sous le nez sa propre performance dans le passé. (Ce qui semble avoir nui à Marois.) Mais son inexpérience lui faisait accepter des solutions souvent simplistes.
Si l'ADQ disparaît, c'est cette liberté de critiquer qui va nous manquer, car on se retrouvera avec les vieilles godasses qui connaissent trop bien les rouages du gouvernement pour jamais envisager d'ouvrir la mécanique afin d'y mettre un peu d'huile, gratter la corrosion ou carrément remplacer des pièces qui ne font plus leur boulot.
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Ce qui est dommage. Je trouve franchement idiote l'existence de partis qui font de l'accession à l'indépendance, à plus ou moins court terme, leur raison d'être, car elle paralyse le débat politique. Cet objectif peut empêcher des partis de rechange d'accéder au pouvoir avec de nouvelles idées (je n'aime pas le populisme de l'ADQ, mais il a au moins le mérite de remettre en cause certains dogmes) et conforter les partisans du statu quo.
L'option d'une accession à l'indépendance est maintenant acquise et pourrait être invoquée par n'importe quel parti du Québec si les circonstances l'exigeaient. Mais en faire un projet de société quand une minorité seulement l'appuie, c'est se plonger dans le bourbier parce qu'on sera toujours soupçonné de gouverner en fonction de cet objectif qu'une majorité rejette et non en fonction des meilleurs intérêts actuels de la province.
Mais bon, il reste une fraction importante de la population qui y croit comme on croyait aux lendemains qui chantent — et qui rejettera tout attentisme (les fameux « purs et durs ») — tandis que je soupçonne une autre partie de l'électorat ploquiste d'en faire un simple test de vertu tout en espérant, au fond, n'avoir jamais à le soumettre à l'épreuve de la réalité, qui serait forcément décevante.
En attendant, les deux partis principaux sont de nouveau des partis de pouvoir. Du coup, comme on l'a bien vu dans la campagne électorale, les deux trouveront difficile de remettre en cause les pratiques gouvernementales. L'inexpérience de l'ADQ était à la fois son plus grand atout et son plus grand défaut. De par son absence du pouvoir, il était libre de critiquer la gestion des routes ou des hôpitaux, par ex., sans se faire remettre sous le nez sa propre performance dans le passé. (Ce qui semble avoir nui à Marois.) Mais son inexpérience lui faisait accepter des solutions souvent simplistes.
Si l'ADQ disparaît, c'est cette liberté de critiquer qui va nous manquer, car on se retrouvera avec les vieilles godasses qui connaissent trop bien les rouages du gouvernement pour jamais envisager d'ouvrir la mécanique afin d'y mettre un peu d'huile, gratter la corrosion ou carrément remplacer des pièces qui ne font plus leur boulot.
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