2008-10-18

 

Dans le noir, au fond d'un trou

L'autre soir, je suis allé voir City of Ember, un film de science-fiction pour jeunes tiré d'un roman de Jeanne DuPrau. Comme je l'ai indiqué précédemment, je me demandais entre autres si l'histoire devrait quelque chose au roman pour jeunes de Suzanne Martel, Surréal 3000.

En réalité, les parallèles que j'avais déjà relevés sont présents, mais l'atmosphère de la ville d'Ember est bien différente de celle de Surréal. Cela tient surtout au fait que les habitants de Surréal vivent bel et bien en l'an 3000, de sorte que leur mode de vie reflète une vision de l'avenir assez répandue il y a cinquante ans. (Comme Surréal existe depuis un millénaire, ce serait le monde de l'an 2000 que Martel transpose dans l'avenir.) Les citoyens de Surréal se nourrissent de pilules et de concentrés, emploient des moyens de transport perfectionnés (trottoirs roulants, etc.) et profitent de divertissements originaux. La seule ombre (!) au tableau, ce sont les pannes de plus en plus fréquentes qui coupent la ventilation et plongent la ville dans l'obscurité.

En revanche, les habitants d'Ember ont presque épuisé les ressources de leur refuge; ils vivent dans un monde usé où on bricole et on répare parce qu'on n'a pas le choix. En l'absence de radio ou de téléphones en état de fonctionner, la jeune Lina Mayfleet (jouée par la toujours captivante Saoirse Ronan, qui incarnait la jeune Bryony dans Atonement) devient une messagère, qui court et galope dans toute la ville pour livrer les messages qu'on lui confie de vive voix. Son ami Doon, lui, entre dans l'équipe chargée des conduits hydrauliques dans l'espoir de trouver un moyen de réparer le générateur principal.

Dans Surréal 3000, un accident permettait aux jeunes personnages de trouver le chemin de la surface. Par contre, dans City of Ember, ce sont les fondateurs qui ont prévu une issue secrète qui serait révélée au bout de deux siècles, de sorte que Lina et son ami Doon n'ont qu'à déchiffrer les instructions fragmentaires dont ils ont hérité pour trouver la sortie. La cupidité du maire et la peur de ce qui se trouve dans les ténèbres extérieures sont les seuls obstacles à leur départ.

Fondamentalement, l'idée à la base de City of Ember est idiote. Non seulement les fondateurs d'Ember ont-ils construit un refuge avec une date de péremption apparemment inflexible, mais ils ont caché la vérité aux habitants et laissé un seul exemplaire des instructions pour quitter la ville. (En plus, on constate qu'il faut trois éléments uniques et distincts pour sortir : les instructions et les deux pièces d'une clé apparemment irremplaçable. Si l'un d'eux se perd, les deux autres deviennent inutiles...) Le roman de Suzanne Martel est quand même plus intelligent : les habitants de Surréal ont renoncé pour de bon à la surface du globe dévasté et refait leur vie sous terre. S'ils choisissent de sortir, ce n'est pas en raison d'une contrainte arbitraire imposée par l'auteur, mais à cause de circonstances extérieures. En somme, si DuPrau plagiait inconsciemment le roman de Martel, elle n'a pas nécessairement retenu ce qu'il avait de meilleur...

Quant au film, il est bien réalisé. Les acteurs (dont Bill Murray et Tim Robbins) sont excellents. Les décors sont convaincants, quoique les monstres hypertrophiés qui hantent les abords de la ville le soient un peu moins. Et c'est sans doute parce que le film nous transporte de manière aussi efficace dans le monde déglingué d'Ember que les lacunes de l'intrigue (manque de suspense, construction déficiente) affaiblissent autant le résultat.

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