2007-03-27

 

Le Parti vert écrase Québec solidaire!

Malgré la couverture éhontée dont Québec solidaire continue à jouir dans les médias francophones du Québec, c'est bel et bien le Parti vert qui a coiffé Québec solidaire dans la course des petits partis.

Cette nuit, l'ADQ passe du statut de petit parti à celui de parti de l'Opposition; il entre dans la cour des grands, mais ce sera peut-être le tour un jour d'un autre petit parti. C'est pourquoi je trouve intéressant que le Parti vert ait obtenu 6% plus de voix que la machine de Québec Solidaire. Il pourrait annoncer la... couleur de l'avenir.

C'est peut-être aussi le signe de l'émergence d'un autre Québec, qui expliquerait pourquoi le gouvernement sera minoritaire (ou sera une coalition de partis minoritaires). Si le Parti vert n'a pas retenu l'attention, c'était en partie faute de porte-parole capable de s'imposer dans les médias francophones. Son existence s'enracine en partie dans un terreau linguistique différent, mais elle reflète justement la réalité d'un bastion urbain et non-francophone qui a permis aussi aux Libéraux de survivre malgré leur impopularité chez les francophones. Historiquement, la majorité francophone choisissait le gouvernement. Les Libéraux avaient leur base anglophone et montréalaise, mais il fallait conquérir la majorité à l'extérieur.

Quelque chose a changé. Est-ce seulement la présence d'un troisième larron? Peut-être, mais l'ADQ est absent de Montréal et Laval. S'il avait fait la moindre percée dans cette partie du Québec, c'est Mario Dumont qui aurait le droit de former un gouvernement. Par conséquent, il faut bien admettre que le clivage entre Montréal et les régions change la donne. La base montréalaise des Libéraux peut leur permettre de tirer leur épingle du jeu quand le vote francophone se déchire entre villes et régions. Même en ne conservant qu'une poignée de régions comme l'Outaouais, ils peuvent se faufiler entre les deux autres grâce au bastion libéral de l'archipel montréalais. Ainsi, malgré l'effacement libéral d'une partie de la carte du Québec francophone, Jean Charest aura quand même le plus grand nombre de députés.

C'est ce qui déjoue en partie la grogne évidente d'une partie de l'électorat. Malgré le désir manifeste d'infliger une rebuffade aux Libéraux, les électeurs n'ont pas sorti les sortants. Surtout qu'il y a sans doute eu un ressaisissement de certains électeurs tentés par les petits partis. La victoire du Parti vert permet donc de reconnaître qui sont les vrais fidèles et on en retient qu'il y a plus de vrais environnementalistes au Québec que de vrais sociaux-démocrates tendance utopiste, car les uns ont soutenu le Parti vert, quatrième de la province, tandis que les autres ont sans doute déserté la formation bicéphale pour revenir au bercail du PQ...

Les points tournants

Pourtant, on ne peut nier que l'élection a été perdue par le PQ. L'impopularité des Libéraux permettait tous les espoirs et, malgré la supposée tradition de la réélection pour un second mandat, les élections récentes avaient surtout illustré la volatilité du vote au Québec. À mon avis, le premier point tournant remonte à la campagne à la chefferie du PQ. La révélation de la consommation de cocaïne de Boisclair aurait dû couler sa candidature : on peut se demander dans quelle mesure le soutien qu'il a reçu à cette occasion n'a pas repoussé une partie de l'électorat potentiel qui trouvait, au mieux, que c'était un mauvais exemple à donner et qui pouvait voir dans l'indulgence des médias un autre signe de la perte des vraies valeurs favorisée par une certaine élite.

L'affaire Zéroville a joué un rôle aussi. Il convient toutefois de prendre un certain recul : ce n'est pas tout le Québec qui s'est montré solidaire hier des valeurs de Zéroville. L'ADQ a obtenu moins du tiers du vote populaire. Et les autres partis, tout en faisant de leur mieux pour désamorcer le débat, n'ont pas donné de gages aux intolérants comme Mario Dumont a pu le faire à mots couverts.

La décision de Charest de convertir les largesses d'Ottawa en réductions d'impôts passe pour un point tournant, mais je ne suis pas sûr qu'elle lui ait coûté beaucoup de votes au Québec. Au fond, le principe même du déséquilibre fiscal, c'était qu'Ottawa et non Québec décide de l'attribution de fonds que les Québécois considéraient comme leur dû. Les Québécois étaient-ils si offusqués qu'un parti du Québec décide de consacrer les sommes récupérées d'Ottawa à réduire les impôts?

Dans quelle mesure la promesse d'un référendum durant un premier mandat du PQ a-t-elle été le clou dans le cercueil? Faut-il croire que la tentative in extremis de Boisclair d'accrocher le grelot au cou de l'ADQ en fin de semaine — et le refus sans ambages de Mario Dumont de se faire piéger — a scellé la victoire adéquiste? La souveraineté reste désirable, selon les sondages, mais cela ne signifie pas que les Québécois soient pressés de connaître de nouveau les joies d'un référendum...

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Comments:
Note qu'Hérouxville est dans une circonscription qui n'est pas passé à l'ADQ.

Joël Champetier
 
C'est bien la seule dans cette ancienne région duplessiste. Et si je regarde la carte de Laviolette, on trouve Hérouxville à l'extrême sud de la circonscription. Il ne faudrait pas grand-chose pour qu'elle soit dans une circonscription désormais adéquiste...
 
Le _Nouvelliste_ précise en effet ce matin que le vote d'Hérouxville serait allé à l'ADQ. Pas avec une très forte majorité, cependant.

Joël Champetier
 
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