2006-04-01
Vrai cinéma et faux cinéma
Journée occupée. Entre autres, j'ai été aux premières loges d'une intervention à main armée — et ce n'est pas un poisson d'avril.
Pas plus que n'était un poisson d'avril le Festival international du livre mangeable, encore que je me sois posé la question... Événement pas nécessairement sérieux à l'origine, si j'ai bien compris, il est devenu une activité internationale qui a fait appel à la participation des élèves pâtissiers de l'ITHQ à Montréal. Plusieurs romans jeunesse dont Le maître des bourrasques de Laurent McAllister faisaient partie des livres métamorphosés en confections gastronomiques. Le dessert créé par une future pâtissière reproduisait assez platement la couverture illustrée par Laurine Spehner et, de fait, il n'a pas figuré parmi les créations honorées aujourd'hui. Mais Laurent M. McAllister a quand même rapporté à la maison l'effigie en pâte d'amandes du Moloch. J'ignore quel sort est réservé au démon enchaîné — et comestible.
Éric Gauthier de Fractale Framboise était également présent. L'œuvre d'art culinaire inspirée par Terre des pigeons était particulièrement superbe, mais elle n'a pas gagné. Nous n'avons pas parlé du Prix Solaris 2006 pour lequel nous avions soumis des textes qui n'ont pas remporté non plus les grands honneurs... François-Xavier Liagre, qui publie dans Solaris de temps à autre, était aussi de passage, ainsi que Robert Soulières. Sylvie Rheault de Médiaspaul est passée se rendre compte et il ne faudrait pas oublier les personnalités présentes, dont Gilles Duceppe, Jean Fugère et Patrice Demers.
En attendant une séance au Cinéma du Parc, la vie en ville m'a réservé un petit moment de cinéma qui n'en était pas. Les Montréalais ne seront pas surpris; on sait bien qu'il est dangereux de s'arrêter pour lire le journal du samedi et boire un café dans un Second Cup depuis Rhéal Mathieu, ce terroriste indépendantiste québécois qui voulaient les réaménager au moyen de bombes incendiaires...
Aujourd'hui, piquant du nez sur mon journal, j'ai été tiré de mon assoupissement par une exclamation. « Look, they've got guns! » Ou l'équivalent. Je me retourne et, par les baies vitrées de la devanture, je découvre des policiers de l'autre côté de la rue, qui me tournent le dos et qui ont effectivement dégainé leurs armes de service. Ils surveillent la ruelle derrière les maisons de l'avenue du Parc, s'abritant qui derrière le coin d'un édifice qui derrière une mini-fourgonnette.
Ce qui me donne assez nettement l'impression d'être dans la ligne de tir, sinon de mire, de la personne ou des personnes qui justifient ce déploiement policier. À côté de moi, les jeunes étudiantes de McGill désertent leurs tables dans le coin le plus exposé du café — le coin où je me retrouve donc à peu près seul avec deux autres curieux. Des gars. Il y a dans l'air comme une réticence masculine à battre en retraite...
Entre les branches dénudées des arbres, j'aperçois des policiers débouchant sur un balcon d'une façade arrière. Ils enfoncent une porte tandis qu'une ambulance arrive en pimponnant. Mais le suspense s'arrête là. Quelques instants plus tard, les policiers rengainent et les piétons peuvent désormais circuler sans encombre. (Quelques minutes plus tôt, une policière brandissant son arme avait stoppé une vieille dame qui allait traverser la ruelle sans un regard pour les agents embusqués, et l'avait obligée à rebrousser chemin...)
Ce qui n'était qu'un prélude à mon visionnement d'un nouveau documentaire étatsunien à traiter de la guerre en Irak, Why We Fight d'Eugen Jarecki. Malgré les commentaires favorables et le Grand Prix du Jury du Festival Sundance 2005, le film ne m'apprend pas grand-chose de neuf. J'ai même été un peu choqué de découvrir que, selon les reporters locaux, Jarecki aurait découvert très récemment le propos des adieux présidentiels du président Eisenhower qui avait prévenu les États-Unis contre l'influence du complexe militaro-industriel. (Que la notion de complexe militaire-industriel ne soit pas un lieu commun pour une personne raisonnablement cultivée aux États-Unis est singulièrement édifiant...) L'intérêt principal du film, pour quelqu'un comme moi qui suit surtout l'actualité par l'intermédiaire d'internet et de l'imprimé, c'est de mettre des images et des visages sur des réalités que je connais par des descriptions plus désincarnées.
Dans Why We Fight, l'histoire de Wilton Sekzer est le cœur battant de la narration. Il y a exactement trois ans aujourd'hui, un bombardier américain larguait sur une cible irakienne une bombe qui portait le nom du fils de Sekzer, mort dans une des tours du World Trade Center le 11 septembre 2001. Sekzer croyait venger son fils en soutenant l'invasion de l'Irak. Comme beaucoup d'autres de ses concitoyens, il avait cru comprendre que Saddam Hussein avait trempé dans les attaques du 11 septembre. Quand Bush a nié plus tard avoir jamais soutenu cela, la déconvenue de ce policier et vétéran de la guerre au Viêt-Nam a été terrible.
Ce qui permet à Jarecki de rappeler comment Eisenhower avait préconisé la vigilance citoyenne pour contrer l'influence de la pensée militariste. Vigilance qui est peut-être devenue impossible dans un univers médiatique dominé par une poignée de grands conglomérats. Ou qui pourrait obtenir les moyens de sa résurrection d'internet, cette création de la recherche... militaire.
Pas plus que n'était un poisson d'avril le Festival international du livre mangeable, encore que je me sois posé la question... Événement pas nécessairement sérieux à l'origine, si j'ai bien compris, il est devenu une activité internationale qui a fait appel à la participation des élèves pâtissiers de l'ITHQ à Montréal. Plusieurs romans jeunesse dont Le maître des bourrasques de Laurent McAllister faisaient partie des livres métamorphosés en confections gastronomiques. Le dessert créé par une future pâtissière reproduisait assez platement la couverture illustrée par Laurine Spehner et, de fait, il n'a pas figuré parmi les créations honorées aujourd'hui. Mais Laurent M. McAllister a quand même rapporté à la maison l'effigie en pâte d'amandes du Moloch. J'ignore quel sort est réservé au démon enchaîné — et comestible.
Éric Gauthier de Fractale Framboise était également présent. L'œuvre d'art culinaire inspirée par Terre des pigeons était particulièrement superbe, mais elle n'a pas gagné. Nous n'avons pas parlé du Prix Solaris 2006 pour lequel nous avions soumis des textes qui n'ont pas remporté non plus les grands honneurs... François-Xavier Liagre, qui publie dans Solaris de temps à autre, était aussi de passage, ainsi que Robert Soulières. Sylvie Rheault de Médiaspaul est passée se rendre compte et il ne faudrait pas oublier les personnalités présentes, dont Gilles Duceppe, Jean Fugère et Patrice Demers.
En attendant une séance au Cinéma du Parc, la vie en ville m'a réservé un petit moment de cinéma qui n'en était pas. Les Montréalais ne seront pas surpris; on sait bien qu'il est dangereux de s'arrêter pour lire le journal du samedi et boire un café dans un Second Cup depuis Rhéal Mathieu, ce terroriste indépendantiste québécois qui voulaient les réaménager au moyen de bombes incendiaires...
Aujourd'hui, piquant du nez sur mon journal, j'ai été tiré de mon assoupissement par une exclamation. « Look, they've got guns! » Ou l'équivalent. Je me retourne et, par les baies vitrées de la devanture, je découvre des policiers de l'autre côté de la rue, qui me tournent le dos et qui ont effectivement dégainé leurs armes de service. Ils surveillent la ruelle derrière les maisons de l'avenue du Parc, s'abritant qui derrière le coin d'un édifice qui derrière une mini-fourgonnette.
Ce qui me donne assez nettement l'impression d'être dans la ligne de tir, sinon de mire, de la personne ou des personnes qui justifient ce déploiement policier. À côté de moi, les jeunes étudiantes de McGill désertent leurs tables dans le coin le plus exposé du café — le coin où je me retrouve donc à peu près seul avec deux autres curieux. Des gars. Il y a dans l'air comme une réticence masculine à battre en retraite...
Entre les branches dénudées des arbres, j'aperçois des policiers débouchant sur un balcon d'une façade arrière. Ils enfoncent une porte tandis qu'une ambulance arrive en pimponnant. Mais le suspense s'arrête là. Quelques instants plus tard, les policiers rengainent et les piétons peuvent désormais circuler sans encombre. (Quelques minutes plus tôt, une policière brandissant son arme avait stoppé une vieille dame qui allait traverser la ruelle sans un regard pour les agents embusqués, et l'avait obligée à rebrousser chemin...)
Ce qui n'était qu'un prélude à mon visionnement d'un nouveau documentaire étatsunien à traiter de la guerre en Irak, Why We Fight d'Eugen Jarecki. Malgré les commentaires favorables et le Grand Prix du Jury du Festival Sundance 2005, le film ne m'apprend pas grand-chose de neuf. J'ai même été un peu choqué de découvrir que, selon les reporters locaux, Jarecki aurait découvert très récemment le propos des adieux présidentiels du président Eisenhower qui avait prévenu les États-Unis contre l'influence du complexe militaro-industriel. (Que la notion de complexe militaire-industriel ne soit pas un lieu commun pour une personne raisonnablement cultivée aux États-Unis est singulièrement édifiant...) L'intérêt principal du film, pour quelqu'un comme moi qui suit surtout l'actualité par l'intermédiaire d'internet et de l'imprimé, c'est de mettre des images et des visages sur des réalités que je connais par des descriptions plus désincarnées.
Dans Why We Fight, l'histoire de Wilton Sekzer est le cœur battant de la narration. Il y a exactement trois ans aujourd'hui, un bombardier américain larguait sur une cible irakienne une bombe qui portait le nom du fils de Sekzer, mort dans une des tours du World Trade Center le 11 septembre 2001. Sekzer croyait venger son fils en soutenant l'invasion de l'Irak. Comme beaucoup d'autres de ses concitoyens, il avait cru comprendre que Saddam Hussein avait trempé dans les attaques du 11 septembre. Quand Bush a nié plus tard avoir jamais soutenu cela, la déconvenue de ce policier et vétéran de la guerre au Viêt-Nam a été terrible.
Ce qui permet à Jarecki de rappeler comment Eisenhower avait préconisé la vigilance citoyenne pour contrer l'influence de la pensée militariste. Vigilance qui est peut-être devenue impossible dans un univers médiatique dominé par une poignée de grands conglomérats. Ou qui pourrait obtenir les moyens de sa résurrection d'internet, cette création de la recherche... militaire.
Libellés : Films, Livres, Montréal, Société
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Pour ceux qui s'inquiètent du sort du Moloch, il repose en ce moment au frais, avant d'être dégagé de sa gangue de délicieuse crème au beurre. Quant à son destin ultime, impensable que si une moitié de McAllister le consomme, l'autre n'en ait aucun morceau...
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