2006-03-16

 

Portrait de l'artiste en jeune homme, bis

Je n'enseigne qu'un cours à l'Université d'Ottawa, mais, comme il compte de 145 à plus de 170 étudiants selon les semestres, je trouve que ce n'est pas exagéré de dire qu'il compte double, ou triple. De plus, comme je fais l'aller-retour entre Ottawa et Montréal, il est assez juste de dire que mon milieu de semaine est entièrement pris par la préparation du cours, l'enseignement du cours... et la récupération subséquente. Autrement dit, je n'ai pas fait grand-chose aujourd'hui.

Comme j'étais un peu indisposé, j'ai poursuivi sur ma lancée de la veille en exhumant quelques vieilles photos familiales de plus. Celle-ci peut faire pendant à celle que j'avais retrouvée précédemment. Après le fils, le père. Eh oui, il s'agit de mon père, installé à la machine à écrire, dans un sous-sol de Westmount (au 1019 Greene Avenue, à cinq minutes à pied de l'ancien Forum selon la carte... il faudra que j'aille faire un tour un de ces jours) le 28 juin 1950. Il faut savoir qu'à cette époque, l'écriture, que ce soit pour les journaux ou pour l'édition, avait un cachet qu'elle a un peu perdu...

Rappelez-vous que nous sommes encore à l'époque des pulps et des épais supplements dominicaux des journaux. Les écrivains peuvent encore circuler assez facilement entre la presse, la radio et même la télévision plus ou moins embryonnaire — et se faire payer pour ce qu'ils écrivent. Il y a quelque chose de plus artisanal et, disons-le, de plus normal à vouloir publier dans un contexte où cela peut devenir un métier, et même faire de vous une vedette susceptible de marier Marilyn Monroe. (J'anticipe un peu : Arthur Miller n'allait épouser Monroe qu'en 1956.)

Ainsi, cigarette au bec, la machine à écrire calée sur une chaise, mon père écrit, assis dans un caveau à charbon reconverti.

Une boîte de Players trône sur le dictionnaire, un réveil est visible sur la pile de livres sous la radio et une lampe est posée sur la chaufferette. Est-ce une bouteille de bière à moitié vide devant la radio dans le coin de la pièce? Est-ce qu'il écrit quelque chose pour la Gazette de Montréal? Je sais qu'il avait espéré se faire embaucher par la Gazette à une époque, mais que cela n'avait pas marché. Mais il a si bien le look de l'écrivain de cette époque (look que certains de ses contemporains ont conservé longtemps) que la photo suffit à exprimer son ambition. Photo qui, compte tenu de l'angle de la lampe qui éclaire non la page mais le visage, a dû être assez soigneusement posée...

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Comments:
Comme je l'ai indiqué dans ma réponse sur mon blog, je trouve cette photo superbe, très caractéristique de la décennie 50. Le décor est dans le mythe. Le vieux poste de TSF, la machine à écrire. C'est toute la mythologie de Chandler, Irish, D. Simak, mais aussi Simenon. Le tout dans les senteurs des Players Navy Cut. Tout un programme, toute une époque.
 
On peut aussi comparer cette photo à celle-ci du poète Allan Ginsberg en 1955...
 
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