2010-01-02

 

Le désir et la vie

La vie est désir, mais est-ce que le désir renferme et embrasse tout de nos vies? Dans Lust for Life: Tales of Sex & Love (Vehicle Press, 2006), Claude Lalumière et Elise Moser ont réuni 21 nouvelles sur le thème de l'amour et du désir amoureux. Le résultat est souvent savoureux, parfois comique, plus rarement émoustillant et occasionnellement touchant. Le fantastique et la science-fiction sont exploités par certains des auteurs, comme Ashok Banker et Nalo Hopkinson, qui signent respectivement un texte très achevé mais un peu prévisible, « Serpent's Tale », et une nouvelle aussi onirique qu'ébouriffante, « A Raggy Dog, a Shaggy Dog ». La nouvelle de science-fiction qui conclut le recueil, « The Penis of My Beloved », est le fruit d'une collaboration percutante entre Ian Watson et Roberto Quaglia, qui s'éclatent dans tous les sens pour le plus grand plaisir des pervers polymorphes... De fait, les auteurs les plus professionnels ne déçoivent jamais entièrement : même si la nouvelle « Virgin of the Sands » de Holly Phillips a quelque chose d'inachevé, elle reste mémorable de par ses hardiesses et la singularité de la situation imaginée par l'autrice.

Quelques textes jouissifs vont jusqu'au bout de leur fantasmatique, et au-delà, mais sans la transcender : « Sucksluts Anonymous » de Scott D. Pomfret tout particulièrement, mais aussi « Jingle Balls » de Barry Webster. Et dans une veine très littéraire, mais tout aussi délirante à sa façon, il y a « Words to Flesh » de Tess Fragoulis.

D'autres nouvelles illustrent de manière plus réaliste les complexités douces-amères du désir et du plaisir en s'attachant à des moments particuliers, sous la forme de vignettes un tantinet cruelles comme dans le cas des nouvelles « Had a Lover » de Neil Kroetsch, « The IGA Kissing Bandit » de Mark Paterson, « Lost Cause » de Joel Hynes ou « First Time » de Maya Stein.

Malgré le titre, l'amour et la tendresse ne sont guère présents dans l'anthologie. En fin de compte, en cette aube du troisième millénaire, ce n'est pas si difficile d'écrire sur le désir sexuel et le coït. Le vrai défi, c'est toujours de voir clair dans nos sentiments et dans ceux des autres, et c'est peut-être pourquoi les critiques en ont fait une pierre de touche de la littérature la plus sérieuse depuis au moins La Princesse de Clèves. Le vrai don de soi n'apparaît que trop rarement dans cette anthologie, à la faveur d'un texte comme « Running » de Harold Hoefle, par exemple.

Bref, il s'agit d'un ouvrage collectif audacieux de par sa conception, mais qui donne la priorité au sexe plutôt qu'à l'amour. La majorité des textes valent le détour, ce qui permet de ne pas regretter l'achat de l'anthologie même si je ne peux pas la recommander plus chaudement. Peut-être parce qu'elle ne m'a pas assez échauffé, quoi...

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