2009-03-18

 

Le parti de l'ignorance

Décidément, les Conservateurs de Harper s'enfoncent. Comme d'habitude, dès qu'il est question de culture ou de science, il suffit de gratter pour retrouver les bons vieux Conservateurs de Mulroney, dont le fermier manitobain Felix Holtmann qui s'était retrouvé à présider le comité parlementaire sur les communications et la culture, avouant presque aussitôt « I don't understand art, but I do understand one thing—somewhere we've got to cut, cut, cut » (Toronto Star, 30 juin 1989).

Si je croyais à la transmigration des âmes (encore que Holtmann est toujours de ce monde), je dirais que le même mauvais esprit hante désormais le cerveau du ministre conservateur James Moore, qui affichait son inculture dimanche à l'émission télévisée Tout le monde en parle. Notons bien qu'il ne s'agissait pas seulement d'ignorance de la culture québécoise puisque Atom Egoyan lui était aussi inconnu que Félix Leclerc... Vingt ans après Holtmann, le programme est le même dans le camp retranché conservateur : coupures et inculture. Sauf que les incultes sont maintenant propulsés de la présidence d'un comité parlementaire au rang de ministre.

Pour compléter le portrait, l'inculture conservatrice est aussi crasse en science. Nous savions déjà qu'un ministre conservateur, Stockwell Day, croit que les premiers humains ont côtoyé les dinosaures (puisque le monde n'a que six mille ans!). Mais c'est pire quand le ministre conservateur chargé de la recherche scientifique, Gary Goodyear, s'embourbe sans arriver à nous convaincre qu'il accepte l'évolution des espèces par la sélection naturelle. (Évidemment, il est déjà arrivé au CRSH de donner le mauvais exemple en ce qui concerne la reconnaissance de la théorie de l'évolution, mais ce n'est pas une raison pour leur couper les fonds.)

En fait, on se souviendra que Stephen Harper nous avait déjà fait le coup en nommant comme ministre de l'Environnement une députée de l'Alberta bien mal placée pour admettre la réalité de l'effet de serre... En somme, dans les gouvernements d'allégeance conservatrice, il suffit de démontrer son ignorance dans un domaine pour en devenir le ministre .

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Comments:
C'est fou, mais l'ignorance de Moore m'inquiète moins que l'aveuglement de Goodyear.

L'ignorance, ça se corrige.
 
Si l'inculture du ministre de la culture pourrait être inquiétante, il faut toutefois relativiser le questionnaire de TLMEP: tu sais comme moi que
1) Il est impossible de tout connaître d'un domaine, je connais de nombreux "artistes" qui ignorent qui est Atom Egoyan.
2) Il est facile de coincer quelqu'un avec un questionnaire aussi court (même si nous connaissions probablement 99% des réponses nous-mêmes dans ce cas-ci).

Ceci dit, ça paraît mal, mais on savait déjà que le gouvernement Harper se foutait bien de la culture, autrement que pour y trouver des coupures à effectuer.

Enfin, inutile de dire que je partage ton opinion dans ce billet à 100%, avec un soupir de désolation.
 
J'ajouterai quelque chose à la défense du ministre, tiens, question de ne pas être démagogue:
Je pourrais probablement très facilement coincer n'importe quel fonctionnaire francophone (ou à peu près n'importe quel québécois-lambda) avec un questionnaire sur la culture anglo-canadienne, tiens.
Alors coincer un ministre de la CB avec beaucoup de questions sur la culture québécoise...
 
C'est le second argument de Chantal Hébert à ce sujet. D'abord, elle note que l'inculture de Moore est bien partagée, puis elle se demande si Josée Verner aurait été capable d'identifier des personnalités de la culture canadienne-anglaise. Sans doute que non, mais on pourrait s'entendre pour dire que l'ignorance québécoise du reste du Canada est abyssale et que le nombrilisme québécois est monumental sans que cela ne fasse que souligner encore plus que l'inculture de Moore semble bien partagée. Ni Lepage ni Egoyan, hein!

(Et cela n'excuse pas les Conservateurs que de citer l'ignorance probable d'une autre ministre conservatrice de la Culture... Je soupçonne que Liza Frulla ou Sheila Copps auraient mieux fait, dans leur temps.)

Le problème fondamental, c'est que Moore n'est pas un simple fonctionnaire fédéral ou un Canadien lambda, il est ministre de la Culture, et il est particulièrement inquiétant qu'il ne puisse citer ni Lepage (mais j'avoue que faire du Moulin à images le principal indice dans son cas était un peu réducteur — ou québéco-centrique) ni Egoyan.

Car, ce que Moore connaissait sans trop de mal, c'était la pop culture télévisuelle de notre temps : Mercer, Feist, Jean-René Dufort (même s'il avait oublié son nom) et Mansbridge. Lepage aussi, quoique assez vaguement.

Et le plus ironique, c'est qu'on lui a cité des noms de la culture canadienne qui s'exporte : Laliberté, Lepage, Egoyan sont connus au-delà du Canada. Mercer, Dufort, Mansbridge, pas vraiment. Or, son ministère tient mordicus à ses coupures dans le domaine de la promotion internationale de la culture canadienne. Peut-être bien parce que le ministre lui-même en sait si peu sur ce qu'on connaît de la culture canadienne à l'étranger...
 
J-Louis,
Je répète que je suis d'accord avec ton argument, c'est pas normal que le plus haut responsable de la culture soit aussi "inculte" quand on parle de culture canadienne (anglophone comme francophone), et je pense aussi que Lisa F et Sheila C aurait fait bien mieux. Je ne défends pas Moore, même si je trouve le "test de culture" de TLMEP réducteur (ou réduit), c'est tout.
Évidemment, il est effectivement inquiétant que ses bonnes réponses aient été sur les noms de la pop culture télé humoristique plutôt que sur des... artistes, justement.
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