2008-08-29

 

Un complexe d'infériorité gros comme une montagne

Aux États-Unis, les Démocrates s'entêtent à présenter des candidats intelligents à la présidence. À première vue, le programme (.PDF) de Barack Obama est plutôt soporifique. Les premières pages sont consacrées à l'éthique et à un changement des pratiques et des mœurs politiques à Washington. Encadrement du lobbying, fin des contrats de gré à gré, augmentation de la transparence... Quoi de plus ennuyeux? Mais si Obama est sincère, c'est que ces choix sont informés par l'échec du Congrès issu des élections de 2006, qui a prouvé qu'une simple majorité de Démocrates ne suffit pas à imposer les orientations souhaitées par leurs électeurs. Le diagnostic posé par Obama, c'est que le problème est à la fois culturel et structurel, et qu'il faut donc modifier les structures des institutions pour modifier la culture des institutions et permettre aux choix populaires de s'exercer. Autrement dit, la transparence doit précéder tout changement de cap, sinon celui-ci sera impossible.

A-t-il raison? Eh bien, on n'a pas souvent fait remarquer les ressemblances entre cette partie du programme d'Obama et les réformes de Gorbatchev, pour qui la glasnost était un élément essentiel de la perestroïka. Ce n'était pas le but de Gorbatchev, mais ces réformes ont conduit à la chute de l'empire soviétique. Je ne dis pas que l'aboutissement sera le même aux États-Unis, mais on aurait tort de sous-estimer l'importance potentielle de cet élément du programme d'Obama.

Le reste du programme ne surprendrait guère de la part d'un parti de centre-gauche (ou même de centre-droite) dans la plupart des autres pays occidentaux. Un système de santé pour tous, une plus grande protection des droits des travailleurs, un déplacement du fardeau fiscal, des mesures en faveur de l'égalité de tous et de la réduction des inégalités collectives, la défense du droit à l'avortement... Des aides ponctuelles pour certains secteurs — l'éducation, l'armée et les vétérans, l'économie rurale, les aînés — complètent le tableau. L'environnement n'apparaît que dans le cadre de promesses sur la réorientation de la consommation d'énergie aux États-Unis, ce qui n'est pas encourageant.

J'ai écouté plusieurs des discours démocrates prononcés dans le stade de Denver. Ce qui était frappant, c'était la détermination éperdue, et même un brin désespérée, des orateurs. Al Gore a livré un vibrant plaidoyer en faveur de l'environnement et de l'importance de ne pas céder à l'illusion que tous les candidats se valent. Même Obama a réagi aux critiques qu'on lui adressait en prononçant un discours plus terre-à-terre, qui recyclait au moins une critique utilisée par un des orateurs précédents ainsi qu'une suggestion d'un commentateur du New York Times (Brooks?), et qui combinait les promesses électorales et les critiques de John McCain.

Un des orateurs a tenté de soulever la foule en invoquant la Bible et en l'appelant à faire preuve de la foi grosse comme un grain de moutarde citée par les Évangiles. La foi qui déplace les montagnes. (Comme les Rocheuses visibles de Denver.) Ce qui laisse croire qu'aux yeux des Démocrates, l'obstacle qui les sépare de la Maison blanche est gros comme une montagne. Ou sinon c'est la taille de leur complexe d'infériorité face au parti qui a remporté la plupart des élections depuis Nixon...

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