2008-08-09
Dans la maison de la science-fiction, il y a plusieurs demeures
Lire Mathematicians in Love de Rudy Rucker après avoir lu The Burning Girl de Holly Phillips, c'est changer complètement d'univers sans quitter celui de la science-fiction, ou même le thème des univers voisins. Et pourtant...
N'ayons pas peur de le dire : chacun de ces romans correspond à un extrême dans son genre. La prose de Phillips est allusive, poétique, recherchée, riche de couleurs et d'émotions... La prose de Rucker est efficace, bourrée d'explications et assaisonnée de plaisanteries parfois douteuses. Le cadre de Phillips est aux confins de la science-fiction et de la fantasy, sans qu'on puisse assigner son ouvrage à une catégorie précise : même si tout s'explique dans le contexte de la métaphysique du roman, l'écriture de Phillips entretient un flou qui suggère l'existence de zones d'ombres. Le roman de Rucker est de la science-fiction de bout en bout, pas toujours sérieuse, mais excluant vigoureusement l'ineffable. Le récit de Phillips débute in medias res et s'arrête plus qu'il ne conclut. Le récit de Rucker est relaté par le protagoniste, qui choisit le début de l'action et la mène jusqu'à son aboutissement. Bref, modernisme d'une part, classicisme de l'autre...
À chacun aussi sa façon de passer d'un univers parallèle à l'autre. Chez Phillips, il faut du sexe, beaucoup de sang et un bel étranger ténébreux — on patauge au plus profond des mystères de l'éternel féminin, quoi! Chez Rucker, ce sont des mathématiciens qui carburent aux algorithmes et aux théorèmes, des fanas de surf et de bière dont le petit côté sex, drugs and rock'n roll fait merveille pour brancher un univers sur l'autre, avec l'aide de quelques extraterrestres plus ou moins gluants. Les deux héros ne sont pas tout à fait des ingénieurs armés de règles à calcul comme dans la sf traditionnelle, mais on n'en est pas loin...
L'héroïne de Phillips tente de comprendre qui elle est et si elle aime ou non un ex-policier appelé Dan Bardo (nom mystique s'il en est). Les deux héros de Rucker essaient de comprendre ce qu'ils font et de se faire aimer de la volage Alma, quand ce n'est pas de l'excitante Cammy...
Bref, si les stéréotypes ont la vie dure, c'est parce qu'on imagine difficilement un homme écrivant le roman de Phillips et une femme signant celui de Rucker. C'en est presque caricatural, et je dois avouer que j'ai préféré le roman de Rucker qui enchaîne au pas de course les péripéties et les rebondissements, sans jamais négliger la lisibilité. C'est un peu frénétique, mais on ne s'ennuie pas. La narration de Phillips retarde les révélations et refuse d'énoncer clairement les enjeux de l'action, ou même de décrire ce qui se passe ou s'est passé : la brume ne se dissipe jamais entièrement.
J'avais eu le roman de Rucker en primeur, étant de passage dans les bureaux de Tor à New York en novembre 2006. Mais il a longuement traîné dans ma pile de livres à livre, et assez injustement. Le plaisir que j'en retire est sans doute magnifié par la déception qu'a constitué pour moi le roman de Phillips, dont j'avais pourtant beaucoup aimé le recueil. Dans un autre contexte, l'approche un peu primaire de Rucker aurait pu m'horripiler. Mais voilà la recette : lire Rucker après Phillips... À moins de tenter le contraire, pour voir, et de lire Phillips après Rucker!
N'ayons pas peur de le dire : chacun de ces romans correspond à un extrême dans son genre. La prose de Phillips est allusive, poétique, recherchée, riche de couleurs et d'émotions... La prose de Rucker est efficace, bourrée d'explications et assaisonnée de plaisanteries parfois douteuses. Le cadre de Phillips est aux confins de la science-fiction et de la fantasy, sans qu'on puisse assigner son ouvrage à une catégorie précise : même si tout s'explique dans le contexte de la métaphysique du roman, l'écriture de Phillips entretient un flou qui suggère l'existence de zones d'ombres. Le roman de Rucker est de la science-fiction de bout en bout, pas toujours sérieuse, mais excluant vigoureusement l'ineffable. Le récit de Phillips débute in medias res et s'arrête plus qu'il ne conclut. Le récit de Rucker est relaté par le protagoniste, qui choisit le début de l'action et la mène jusqu'à son aboutissement. Bref, modernisme d'une part, classicisme de l'autre...
À chacun aussi sa façon de passer d'un univers parallèle à l'autre. Chez Phillips, il faut du sexe, beaucoup de sang et un bel étranger ténébreux — on patauge au plus profond des mystères de l'éternel féminin, quoi! Chez Rucker, ce sont des mathématiciens qui carburent aux algorithmes et aux théorèmes, des fanas de surf et de bière dont le petit côté sex, drugs and rock'n roll fait merveille pour brancher un univers sur l'autre, avec l'aide de quelques extraterrestres plus ou moins gluants. Les deux héros ne sont pas tout à fait des ingénieurs armés de règles à calcul comme dans la sf traditionnelle, mais on n'en est pas loin...
L'héroïne de Phillips tente de comprendre qui elle est et si elle aime ou non un ex-policier appelé Dan Bardo (nom mystique s'il en est). Les deux héros de Rucker essaient de comprendre ce qu'ils font et de se faire aimer de la volage Alma, quand ce n'est pas de l'excitante Cammy...
Bref, si les stéréotypes ont la vie dure, c'est parce qu'on imagine difficilement un homme écrivant le roman de Phillips et une femme signant celui de Rucker. C'en est presque caricatural, et je dois avouer que j'ai préféré le roman de Rucker qui enchaîne au pas de course les péripéties et les rebondissements, sans jamais négliger la lisibilité. C'est un peu frénétique, mais on ne s'ennuie pas. La narration de Phillips retarde les révélations et refuse d'énoncer clairement les enjeux de l'action, ou même de décrire ce qui se passe ou s'est passé : la brume ne se dissipe jamais entièrement.
J'avais eu le roman de Rucker en primeur, étant de passage dans les bureaux de Tor à New York en novembre 2006. Mais il a longuement traîné dans ma pile de livres à livre, et assez injustement. Le plaisir que j'en retire est sans doute magnifié par la déception qu'a constitué pour moi le roman de Phillips, dont j'avais pourtant beaucoup aimé le recueil. Dans un autre contexte, l'approche un peu primaire de Rucker aurait pu m'horripiler. Mais voilà la recette : lire Rucker après Phillips... À moins de tenter le contraire, pour voir, et de lire Phillips après Rucker!
Libellés : Livres, Science-fiction
Comments:
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Lire le "ware" series de Rucker avec une réaction mélangée . . . parfois il est presque "cartoonish" . . . mais certainement ce livre me intérêts! Je suis curieux s'il est toujours "a bit nuts"...et aussi je donnerai le à mi compangnon pour ce anniversaire.
Oui, je n'avais pas beaucoup aimé le seul roman de Rucker que j'avais lu auparavant, mais comme celui-ci était un cadeau, euh, échantillon, euh, service de presse... enfin, je n'ai pas eu à l'acheter, c'est le plus important.
Même si c'était parfois léger, j'ai aimé celui-ci.
Même si c'était parfois léger, j'ai aimé celui-ci.
Quelle roman de Rucker vous lûtes auparavant? "Realware" est le plus mauvais du la série "Ware" quoi je sais, mais "Freeware" et "Software" sont un peu intéressant . . . . le développement de la technologie au cettes livres est trés "cool", le même si les livres sont un peu bourré avec bizarres choses non pertinent...
C'était Software, mais je ne me souviens pas de grand-chose, à part cette impression de lire le roman de quelqu'un qui avait pris des drogues presque aussi dures que Philip K. Dick...
Oui! J'ai pensé aussi, trop drogues et "gross-outs" en ses romans obscur ses idées intéressants de technologie, mathematiques et société . . . mais les idées sont anciennes aujourd'hui probablement, et sont plus intelligible à mon compagnon, (etudiant de l'informatique) que moi, j'admete.
Oui, les idées de Mathematicians in Love ne sont pas particulièrement neuves... Il y avait un article connexe dans le Scientific Americain en 2003, mais qui remonte à des travaux de Bekenstein trente ans plus tôt. Mais c'est toujours utile pour un auteur de science-fiction de voir la culture "générale" rattraper un peu le savoir des spécialistes. (Je considère que si quelque chose paraît dans le Scientific American, on peut tenir pour acquis que ce ne sera plus inconnu pour la frange la mieux informée du public de la science-fiction.
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