2008-05-13
Le futur de Paris... en 1803
Dans Le Nouveau Diable boiteux (1799, 1803), Pierre-Jean-Baptiste Chaussard (1766-1823) signe un grand tour du Paris de l'époque, en s'inspirant sans doute du Tableau de Paris (1781) de Louis-Sébastien Mercier. Il exprime dans un passage futuriste son agacement face à la manie des monuments de Paris, au détriment d'ouvrages plus humbles mais plus utiles. Notons qu'en s'en prenant aux architectes de son temps, il rejetait son père, Jean-Baptiste Chaussard (1729-1818), lui-même architecte de métier.
Dans le roman, le bachelier qui visite Paris en compagnie d'un démon s'exclame : « Paris, toujours infect, manque d'eau et une rivière le traverse! » Le démon réplique : « Mais vous avez les pompes à feu, chef-d'œuvre de mécanisme et de spéculation ; mais le métier de porter de l'eau dans l'intérieur des habitations, offre un moyen d'existence à dix mille hommes enlevés à l'agriculture et aux métiers. » La machine à vapeur commençait tout juste à être appliquée au pompage de l'eau pour alimenter les aqueducs, mais Londres avait montré l'exemple un bon demi-siècle plus tôt. Depuis 1782, les frères Périer alimentait en eau une partie de Chaillot et des environs du quai d'Orsay grâce à des machines plus modernes, mais ils étaient bien seuls.
Le bachelier se lamente sur l'absence de monuments utiles tandis que les travailleurs se consacrent à autre chose : « Blanchir des palais, élever des colosses de plâtre, des obélisques de planches, des décorations de toiles, sublime emploi des arts! » Quant aux architectes, leurs projets n'impressionnent pas plus : « Les uns ont proposé de réunir le Louvre et les Tuileries par une galerie parallèle à celle du Muséum; de prolonger une rue jusqu'à la porte Antoine, etc. [...] D'autres ont tracé des cirques, des amphithéâtres, etc. ... Mais, avant ces magnifiques entreprises, vous êtes-vous occupé des cloaques, qui formèrent une partie du luxe de Rome naissante, qui fixèrent l'attention de Tarquin le superbe, consacrèrent sa mémoire, et dont les débris et la construction sont un objet d'admiration pour l'artiste qui les visite? »
« Vous êtes-vous occupé des fontaines? Et il ne s'agit pas seulement d'élever des rochers ou de creuser des bassins, de dessiner des cascades, des fleuves, des dieux marins, des naïades coifées de roseaux, des tritons, jeux charmans de l'imagination, tableaux poétiques et pittoresques. Je vous demande un monument plus simple. Qu'une machine hydraulique élève et verse de l'eau sur nos pas dans nos promenades; pour nos plaisirs, pour tous les besoins domestiques, dans l'intérieur des habitations; dans les rues, pour entretenir leur propreté. Si j'étais administrateur, ou si j'avais l'honneur de gouverner un état, je préférerais l'artiste qui ferait couler un pouce d'eau de plus, à l'artiste qui m'offrirait le plan d'un arc de triomphe. » (1803, III:170-173)
Les égouts de Paris comptaient alors une vingtaine de kilomètres; leur expansion ne datera que du milieu du XIXe siècle. Par contre, Napoléon semble avoir écouté Chaussard ou ceux qui partageaient ses vues. Si l'empereur a approuvé la construction d'un arc de triomphe, il place tous les services d'adduction d'eau dans la région parisienne sous juridiction municipale en 1803 et lance en 1805 la construction du canal de l'Ourcq qui apportera plus d'eau à Paris..
Dans le roman, le bachelier qui visite Paris en compagnie d'un démon s'exclame : « Paris, toujours infect, manque d'eau et une rivière le traverse! » Le démon réplique : « Mais vous avez les pompes à feu, chef-d'œuvre de mécanisme et de spéculation ; mais le métier de porter de l'eau dans l'intérieur des habitations, offre un moyen d'existence à dix mille hommes enlevés à l'agriculture et aux métiers. » La machine à vapeur commençait tout juste à être appliquée au pompage de l'eau pour alimenter les aqueducs, mais Londres avait montré l'exemple un bon demi-siècle plus tôt. Depuis 1782, les frères Périer alimentait en eau une partie de Chaillot et des environs du quai d'Orsay grâce à des machines plus modernes, mais ils étaient bien seuls.
Le bachelier se lamente sur l'absence de monuments utiles tandis que les travailleurs se consacrent à autre chose : « Blanchir des palais, élever des colosses de plâtre, des obélisques de planches, des décorations de toiles, sublime emploi des arts! » Quant aux architectes, leurs projets n'impressionnent pas plus : « Les uns ont proposé de réunir le Louvre et les Tuileries par une galerie parallèle à celle du Muséum; de prolonger une rue jusqu'à la porte Antoine, etc. [...] D'autres ont tracé des cirques, des amphithéâtres, etc. ... Mais, avant ces magnifiques entreprises, vous êtes-vous occupé des cloaques, qui formèrent une partie du luxe de Rome naissante, qui fixèrent l'attention de Tarquin le superbe, consacrèrent sa mémoire, et dont les débris et la construction sont un objet d'admiration pour l'artiste qui les visite? »
« Vous êtes-vous occupé des fontaines? Et il ne s'agit pas seulement d'élever des rochers ou de creuser des bassins, de dessiner des cascades, des fleuves, des dieux marins, des naïades coifées de roseaux, des tritons, jeux charmans de l'imagination, tableaux poétiques et pittoresques. Je vous demande un monument plus simple. Qu'une machine hydraulique élève et verse de l'eau sur nos pas dans nos promenades; pour nos plaisirs, pour tous les besoins domestiques, dans l'intérieur des habitations; dans les rues, pour entretenir leur propreté. Si j'étais administrateur, ou si j'avais l'honneur de gouverner un état, je préférerais l'artiste qui ferait couler un pouce d'eau de plus, à l'artiste qui m'offrirait le plan d'un arc de triomphe. » (1803, III:170-173)
Les égouts de Paris comptaient alors une vingtaine de kilomètres; leur expansion ne datera que du milieu du XIXe siècle. Par contre, Napoléon semble avoir écouté Chaussard ou ceux qui partageaient ses vues. Si l'empereur a approuvé la construction d'un arc de triomphe, il place tous les services d'adduction d'eau dans la région parisienne sous juridiction municipale en 1803 et lance en 1805 la construction du canal de l'Ourcq qui apportera plus d'eau à Paris..
Libellés : France, Futurisme, Histoire