2007-01-22

 

L'alibi de l'intolérance

Le fameux sondage de Québécor sur le « racisme » au Canada incluait (du moins dans sa version québécoise) des questions sur l'accommodement raisonnable, ou plus exactement sur l'application des lois canadiennes quand elles empêchent le respect ou la conservation des us et coutumes des immigrants. En fin de semaine, on a fait beaucoup de cas à l'émission Ouvert le samedi de Radio-Canada du fait que les trois quarts des répondants issus de l'immigration au Québec affirmaient que le Québec était trop tolérant et que la loi canadienne devait primer sur les habitudes culturelles des immigrants.

Soit. Mais il ne faudrait pas que cette opposition devienne l'alibi de l'intolérance. On saute un peu vite sur cette réponse pour donner raison aux sceptiques. (La jurisprudence en la matière est d'ailleurs plus complexe qu'on le pense parfois.)

Admettons que ces immigrants nous disent qu'ils ne veulent pas retrouver au Canada les contraintes des pays qu'ils ont quitté (ou fui). En faire automatiquement un blanc-seing pour mettre fin aux accommodements raisonnables reposerait sur la présupposition que les immigrants ont nécessairement raison et que la législation existante a tort. Curieusement, je soupçonne que si la réponse avait penché dans l'autre sens, elle n'aurait pas été prise au sérieux. On aurait haussé les épaules en laissant entendre qu'évidemment, les nouveaux Canadiens sont en faveur de l'accommodement raisonnable et de la tolérance.

Demandons-nous plutôt quelles sont les valeurs que nous voulons défendre. Si le Canada prenait des mesures répressives contraires à la liberté de culte, c'est bien dans ce cas qu'il deviendrait semblable aux pays d'origine des immigrants en question. Ceux-ci ne reproduisent-ils justement pas les valeurs illibérales de leur société d'origine, en souhaitant seulement que l'on change le bâton de main en inversant les valeurs imposées à tous? Simple basculement : l'opprimé deviendrait l'oppresseur, mais le mécanisme resterait le même.

Un jour ou l'autre, il faudra trancher. Croyons-nous à la charte des droits et à la protection des minorités contre l'arbitraire des majorités, ou voulons-nous revenir au XIXe siècle quand le Canada était un pays chrétien, protestant ou catholique au choix, sans qu'un troisième choix fût possible ?

Cela dit, il y aurait des choses à dire sur les accommodements raisonnables, mais ce sera pour une autre fois.

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