2006-10-26

 

Ultimes photos de Bellaing

Deux mois plus tard, il n'est que temps d'offrir aux intéressés mes ultimes photos de la convention de Bellaing, dont j'ai déjà eu l'occasion de parler... Pour les profanes, cependant, il faut sans doute présenter un peu la chose. La Convention nationale française est un rassemblement annuel d'amateurs français de science-fiction. En août 2006, il se tenait dans la commune de Bellaing, petit planétoïde verdoyant que Valenciennes retient dans son orbite nordique. En quoi consiste un tel rassemblement? Commençons par une photo...Cette vue d'ensemble permet de tout voir en un coup d'œil. À gauche, au fond, l'entrée. Le comptoir du bar se trouvait à gauche de la porte. Au sommet de la photo, on aperçoit au grenier le lieu réservé aux rôlistes et aux ateliers d'écriture. Au fond, à droite, les étagères d'un libraire venu de loin pour l'occasion d'écouler une partie de ses stocks sf — ou de rencontrer des copains. Au centre, occupant l'essentiel de la salle, des tables accueillant des bouquinistes, micro-éditeurs, auteurs, etc.

Une seconde photo, prise de la lucarne au sommet de la photo précédente, nous montre la même salle sous l'angle diamétralement opposé. Cette fois, on distingue au fond une estrade qui accueille l'exposition des œuvres d'Antonio Buondelmonte. Au pied de l'estrade, des tables dressées attirent à elles un assortiment hétéroclite d'objets qui deviendront les enjeux d'une mise aux enchères terrifiante le samedi soir... (En revanche, je n'ai pas l'impression que la table dans laquelle on fera un trou soit visible, à moins que ce soit celle qu'Alain le Bussy et Alain Huet utilisent pour un conciliabule.) Dans ces deux photos, un examen minutieux permettrait d'identifier des têtes connues, de Jean-Pierre Laigle à Jérôme Lamarque ou Pascal Thomas. Mais je laisse cet exercice aux passionnés. Il suffit que ces photos donnent une idée du principe d'une convention française, mais une idée seulement, car l'essence d'un congrès, ce sont toujours les rencontres que l'on fait, les amitiés qui se nouent, les retrouvailles avec de vieux copains, le sucre que l'on casse sur le dos des absents, les conversations avec des visiteurs venus de loin, les achats qui gonflent les sacs et dégonflent les porte-monnaie, les repas... et, bien entendu, les prix littéraires décernés sur place aux auteurs méritants.

Mais avant d'en venir au clou de la chose, parlons de charbon. Bellaing se trouve en effet à deux pas d'Arenberg, site minier exploité de la fin du dix-neuvième siècle à la fin du vingtième siècle. Les chevalements remis en état par l'État gaullien sont impressionnants. Quand j'ai rejoint le groupe qui faisait le tour du site, j'ai découvert un décor du tournage de La compagnie des glaces. La récitation d'une partie des textes composés pour la Convention (sur le thème d'une planète minière dont j'oublie déjà le nom) tirait à a sa fin. Les plus braves, qui n'ont pas reculé devant l'ascension des chevalements, ont eu droit à une visite guidée des lieux, conduite par un ancien mineur. Celui-ci avait d'ailleurs participé un peu au tournage de Germinal, le film de Berri inspiré par le roman de Zola. Gravissant à la queue leu leu les escaliers abrupts du chevalement, les Conventionnels de Bellaing avaient eu droit à une vue superbe. Le manque de relief du Nord offre du moins cette compensation : il ne faut pas monter si haut pour jouir d'un panorama. Notre guide nous expliqua que le paysage avait changé au fil des ans. Plus d'un terril avait disparu, arasé pour réduire les risques d'effondrement. L'habitat avait été rénové (et même en deux fois, puisque la première restauration des corons avait été déficiente). Et l'environnement était plus vert que jamais.Haut-lieu de la technique maintenant abandonné et même un peu délabré, la fosse d'Arenberg pouvait inspirer des pensées pessimistes sur l'état de la science-fiction française. Sauf que la science-fiction n'a pas encore fermé boutique, même si certains auteurs nostalgiques ont un peu trop tendance à nous inviter à revenir sur les réussites d'autrefois... Mais la jeunesse et la vitalité des lauréats des prix n'ont pas tardé à couper court aux réflexions déprimantes. D'ailleurs, profitant de l'absence de pluie, les remises de prix ont eu lieu à l'extérieur, au vert. (On peut voir ici quelques auteurs attendant de savoir s'ils avaient obtenu les faveurs des votants. Ils ont vraiment l'air de s'en faire!)

Citons d'abord le Prix Pépin des nouvelles ultra-courtes. Certes, il est possible de faire plus court, comme le montre ces jours-ci la revue Wired en offrant des nouvelles ne comptant que six mots. Mais les textes signés par Jérôme Lavadou (Pépin d'Or) et les autres concurrents savent aussi être percutants. Dans la photo ci-contre, Pierre Gevart lit (je crois) un des textes primés. Et si vous vous demandez quelles sont ces étranges statuettes sur la table devant lui, il faut savoir qu'il s'agit des Prix Rosny Aîné, qui n'attendent que le dévoilement du nom des gagnants. Avant, toutefois, nous avons eu droit au dévoilement du récipiendaire du Prix Merlin. Qui serait une récipiendaire, d'ailleurs, signe prémonitoire...

Si les Prix Rosny Aîné couronnent les meilleurs textes francophones de science-fiction (à comprendre parfois au sens large), les Prix Merlin sont conférés aux meilleures œuvres francophones dans le domaine de la fantasy ou du fantastique, dans les genres du roman et de la nouvelle. Cette année, le Prix Merlin du meilleur roman a été décerné à Murielle H. Essling pour Le temps de l'accomplissement (Éditions 5e Saison). Dans la catégorie de la nouvelle, le Prix Merlin est allé à Nathalie Dau pour « Le violon de la fée » (in Faeries 17). Dans la photo ci-contre, on voit justement Nathalie Dau accepter la toile qui matérialise le Prix Merlin 2006 de la meilleure nouvelle.

Enfin, ce fut le tour des Prix Rosny aîné. Dans la catégorie de la nouvelle, le prix est allé à Sylvie Lainé pour « Les yeux d'Elsa » (in Galaxies 37), une nouvelle que je n'ai pas encore eu l'occasion de lire. (Les retards accumulés durant la fin de mon doctorat ne m'ont pas encore permis de lire tous les numéros de Galaxies qui s'étaient pareillement accumulés dans l'intervalle.) Dans la photo ci-contre, Sylvie a justement enlevé ses verres fumés pour qu'on puisse voir ses yeux... À gauche, Joseph Altairac, grand secrétaire des Prix Rosny aîné, l'écoute remercier ses fans et exprimer sa joie. Dans la catégorie du meilleur roman, le prix a été décerné à Catherine Dufour pour son livre Le goût de l'immortalité (Mnémos). Je n'ai pas encore eu l'occasion de lire ce roman sur la mémoire, sa rémanence sous des formes de plus en plus technologiques et l'aventure de la recherche du temps perdu... (Après tout, c'est un sujet qui m'intéresse depuis longtemps et je me demande un peu si j'aurai l'impression que Catherine Dufour m'a anticipé. Jusqu'à maintenant, le manque de temps m'a empêché de jeter un coup d'œil au roman qui figure en bonne place dans ma pile de lectures en attente.) Dans la photo ci-dessous, Dufour prend la pose, tenant la figurine bleue du Prix Rosny aîné d'un air de dire qu'on ne la lui enlèvera pas si facilement!Enfin, les plus attentifs auront remarqué que le Prix Rosny aîné est décerné aux meilleures œuvres dans les catégories du roman et de la nouvelle — mais qu'il y avait trois statuettes sur la table ci-dessus, d'abord posées devant Pierre Gevart. Alors? Eh bien, j'ai menti. Il ne s'agissait pas seulement des trophées du Prix Rosny aîné, mais aussi du trophée du Prix Cyrano. Ce dernier est remis à une personnalité de la science-fiction (pas nécessairement francophone) pour l'ensemble de son œuvre. Cette année, on aurait pu croire que le prix avait été été créé expressément pour éviter un balayage féminin, car il a été remis à Jean-Pierre Fontana, homme-orchestre de la science-fiction française, comme en témoigne son site. Dans son cas, j'ai applaudi non seulement par amitié, mais en connaissance de cause puisque j'ai déjà eu l'occasion de lire certains de ses romans, dont les deux tomes de « La geste du Halaguen » parus chez L'Atalante en 1997 et 2001... L'an prochain, les Prix Rosny aîné et le Prix Cyrano seront remis à Montréal dans le cadre de l'hébergement par le congrès Boréal de la Convention nationale française. (Ou devrons-nous dire la Convention nationale nouvelle-française ou néo-française puisque c'est l'ancienne Nouvelle-France qui va l'accueillir?) En tout cas, nous pourrions ouvrir les paris tout de suite : à qui donc sera remis le Prix Cyrano en 2007, très exactement 350 ans après la parution de l'Histoire comique de Cyrano de Bergerac, qui inclut « Estats et Empires de la Lune », le récit par Cyrano de son voyage en Nouvelle-France d'abord et à la Lune ensuite ?

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