2006-08-17
Au Liban, la vraie RMA?
Avons-nous découvert la vraie RMA au Liban?
La RMA, c'était la grande mode des écoles militaires il n'y a pas si longtemps. La Revolution in Military Affairs devait profondément altérer la manière de faire la guerre. Une armée moderne, en exploitant les avantages procurés par sa maîtrise des technologies de l'information, des télécommunications et de l'espace, deviendrait capable de remporter la victoire contre une armée dépourvue des mêmes avantages rapidement et à peu de frais, en pratiquant une sorte de Blitzkrieg combinée à des frappes aussi précises qu'économes en moyens.
Or, même les rats quittent le navire maintenant, comme en témoigne cet article issu de la mouvance d'extrême-droite aux États-Unis. L'armée étatsunienne, qui est censée incarner la RMA depuis la fin de la Guerre froide et les réductions en effectifs associées à de nouveaux investissements en recherche et développement, a exécuté à la perfection l'invasion de l'Irak mais n'arrive pas à venir à bout de la résistance. Du coup, le concept plus ancien de guerre asymétrique reprend toute son importance, selon certains.
Toutefois, il est loin d'être clair que la guerre menée par Israël contre le Hezbollah ait été asymétrique. Certes, le Hezbollah n'est pas un État et il est vrai que les arsenaux modernes sont conçus en grande partie pour briser un État ennemi. De fait, le bombardement israélien a paralysé l'État libanais, ou du moins ce qui en tient lieu dans la partie sud. Les troupes du Hezbollah n'en ont pas moins continué à se battre.
Si on peut se fier à la description que donne le commentateur israélien Uri Avnery des résultats de l'ultime offensive de Tsahal dans la direction du fleuve Litani, les tactiques du Hezbollah relèvent tout simplement des tactiques fondamentales de l'infanterie. Quand on est attaqué en un point, on peut résister ou se replier, puis contre-attaquer. Aucun manuel rationnel ne préconise la défense à outrance, sauf dans le cadre de manœuvres plus larges. Les combattants du Hezbollah bénéficiaient sans doute de positions voisines (peut-être enterrées) qui leur facilitaient le repli et la ré-organisation avant une nouvelle attaque. Ils avaient sans doute aussi des caches d'armes et de nourritures qui leur permettaient de tenir malgré les dégâts infligés aux transports et aux communications dans le sud du Liban. Tout cela est parfaitement normal pour une armée désireuse d'offrir une défense en profondeur et n'est en rien propre à la guérilla.
La nouveauté la plus intéressante est sans doute l'emploi d'armes anti-char, que Mark Williams choisit d'interpréter comme le signe d'une démocratisation de la technologie des missiles. C'est aller un peu vite en affaires. On peut remonter à la guerre des Malouines quand les Argentins avaient tiré à bon escient deux des cinq Exocet en leur possession, détruisant ou endommageant deux navires de la Royal Navy, dont le Sheffield. En Tchétchénie, les défenseurs de Grozny avaient utilisé des armes anti-char russes pour repousser l'assaut des blindés russes en janvier 1995. En Irak, les lance-roquettes russes avaient également surpris les envahisseurs par leur efficacité, préfigurant les récents succès du Hezbollah contre le char israélien Merkava.
Cela dit, la performance des combattants libanais armés de telles armes pourrait annoncer un changement aussi significatif que l'amélioration des fusils qui permit aux armées européennes de passer de l'affrontement rangé, opposant des gros bataillons disposés en rangs tirant à tour de rôle, à l'affrontement de tirailleurs répartis en détachements autonomes beaucoup plus petits. De fait, c'est l'insuccès de l'infanterie israélienne au Liban qui est le plus frappant, mais il est difficile d'en tirer des conclusions puisque, sur d'autres plans, l'aviation israélienne l'a clairement emporté sur l'arsenal du Hezbollah.
Je rappelle mon pronostic d'il y a quelques semaines, que les statistiques de l'armée israélienne semblent confirmer : 4 000 fusées et missiles ont été tirés contre Israël, mais ils n'ont tué que 42 civils. Il s'agit presque du tiers de l'arsenal présumé du Hezbollah, qui aurait donc pu infliger, tout au plus, moins de 150 morts. Les pertes soi-disant collatérales au Liban dépassent le millier de morts. Et c'est sans parler des victimes militaires ou des dégâts infligés aux infrastructures. Dans un autre contexte, la disproportion serait entièrement à l'avantage d'Israël. Seulement, comme Israël s'attendait à vaincre sans encourir de pertes, obtenant le zéro mort pour les civils sinon pour les militaires, la déconvenue est brutale.
La RMA, c'était la grande mode des écoles militaires il n'y a pas si longtemps. La Revolution in Military Affairs devait profondément altérer la manière de faire la guerre. Une armée moderne, en exploitant les avantages procurés par sa maîtrise des technologies de l'information, des télécommunications et de l'espace, deviendrait capable de remporter la victoire contre une armée dépourvue des mêmes avantages rapidement et à peu de frais, en pratiquant une sorte de Blitzkrieg combinée à des frappes aussi précises qu'économes en moyens.
Or, même les rats quittent le navire maintenant, comme en témoigne cet article issu de la mouvance d'extrême-droite aux États-Unis. L'armée étatsunienne, qui est censée incarner la RMA depuis la fin de la Guerre froide et les réductions en effectifs associées à de nouveaux investissements en recherche et développement, a exécuté à la perfection l'invasion de l'Irak mais n'arrive pas à venir à bout de la résistance. Du coup, le concept plus ancien de guerre asymétrique reprend toute son importance, selon certains.
Toutefois, il est loin d'être clair que la guerre menée par Israël contre le Hezbollah ait été asymétrique. Certes, le Hezbollah n'est pas un État et il est vrai que les arsenaux modernes sont conçus en grande partie pour briser un État ennemi. De fait, le bombardement israélien a paralysé l'État libanais, ou du moins ce qui en tient lieu dans la partie sud. Les troupes du Hezbollah n'en ont pas moins continué à se battre.
Si on peut se fier à la description que donne le commentateur israélien Uri Avnery des résultats de l'ultime offensive de Tsahal dans la direction du fleuve Litani, les tactiques du Hezbollah relèvent tout simplement des tactiques fondamentales de l'infanterie. Quand on est attaqué en un point, on peut résister ou se replier, puis contre-attaquer. Aucun manuel rationnel ne préconise la défense à outrance, sauf dans le cadre de manœuvres plus larges. Les combattants du Hezbollah bénéficiaient sans doute de positions voisines (peut-être enterrées) qui leur facilitaient le repli et la ré-organisation avant une nouvelle attaque. Ils avaient sans doute aussi des caches d'armes et de nourritures qui leur permettaient de tenir malgré les dégâts infligés aux transports et aux communications dans le sud du Liban. Tout cela est parfaitement normal pour une armée désireuse d'offrir une défense en profondeur et n'est en rien propre à la guérilla.
La nouveauté la plus intéressante est sans doute l'emploi d'armes anti-char, que Mark Williams choisit d'interpréter comme le signe d'une démocratisation de la technologie des missiles. C'est aller un peu vite en affaires. On peut remonter à la guerre des Malouines quand les Argentins avaient tiré à bon escient deux des cinq Exocet en leur possession, détruisant ou endommageant deux navires de la Royal Navy, dont le Sheffield. En Tchétchénie, les défenseurs de Grozny avaient utilisé des armes anti-char russes pour repousser l'assaut des blindés russes en janvier 1995. En Irak, les lance-roquettes russes avaient également surpris les envahisseurs par leur efficacité, préfigurant les récents succès du Hezbollah contre le char israélien Merkava.
Cela dit, la performance des combattants libanais armés de telles armes pourrait annoncer un changement aussi significatif que l'amélioration des fusils qui permit aux armées européennes de passer de l'affrontement rangé, opposant des gros bataillons disposés en rangs tirant à tour de rôle, à l'affrontement de tirailleurs répartis en détachements autonomes beaucoup plus petits. De fait, c'est l'insuccès de l'infanterie israélienne au Liban qui est le plus frappant, mais il est difficile d'en tirer des conclusions puisque, sur d'autres plans, l'aviation israélienne l'a clairement emporté sur l'arsenal du Hezbollah.
Je rappelle mon pronostic d'il y a quelques semaines, que les statistiques de l'armée israélienne semblent confirmer : 4 000 fusées et missiles ont été tirés contre Israël, mais ils n'ont tué que 42 civils. Il s'agit presque du tiers de l'arsenal présumé du Hezbollah, qui aurait donc pu infliger, tout au plus, moins de 150 morts. Les pertes soi-disant collatérales au Liban dépassent le millier de morts. Et c'est sans parler des victimes militaires ou des dégâts infligés aux infrastructures. Dans un autre contexte, la disproportion serait entièrement à l'avantage d'Israël. Seulement, comme Israël s'attendait à vaincre sans encourir de pertes, obtenant le zéro mort pour les civils sinon pour les militaires, la déconvenue est brutale.