2019-06-25
L'Atlantide et la SFCF
Le mythe de l'Atlantide raconté par Platon fait rêver depuis des siècles, si bien qu'il ne faut pas se surprendre que les genres de l'imaginaire se soient emparé d'une histoire aussi dramatique et mystérieuse. Équivalent grec de la tour de Babel, parabole platonicienne inachevée ou vague réminiscence de l'éruption du volcan de Santorin, l'Atlantide n'est pas aisément circonscrite, reléguée au rang des légendes, comme celle de la ville d'Ys, ou adoptée comme le compte rendu d'une catastrophe ancienne.
Néanmoins, la présence de l'Atlantide dans les lettres canadiennes-françaises n'a pas encore été étudiée, il me semble. Au XIXe siècle, Jules Verne mentionne l'Atlantide dans L'Île mystérieuse, ce qui n'est peut-être pas sans intention puisque les naufragés ont sous leurs pieds le capitaine Nemo qui a visité les ruines de l'Atlantide dans Vingt mille lieues sous les mers. Ces deux romans sont bien connus au Canada français.
Le roman français L'Atlantide (1919) de Pierre Benoît connaît un grand succès à sa sortie et il n'est pas douteux qu'il soit lu en terre canadienne.
Au Québec, la plupart des références atlantes dans la fiction sont assez tardives. Dans Rien que des hommes, la suite inédite (et sans date) de La Fin de la Terre (1931), Emmanuel Desrosiers imagine que les Martiens sont des humains originaires de la Terre. Va-t-il jusqu'à en faire des réfugiés atlantes, comme Tolstoï dans Aelita en 1923 ? Il faudrait que je relise l'ouvrage.
En 1935, dans le petit recueil de contes Au douze coups de minuit, Emma-Adèle Bourgeois signe « L'Atlantide », une version plus féerique de la disparition de l'Atlantide. (C'est aussi à cette époque que Tolkien travaille sur l'histoire de la chute de Númenor, sa version de l'Atlantide, qui l'aidera à édifier la version finale de la Terre du Milieu et à fonder incidemment la fantasy moderne.) Quant à Georges Bugnet, il signe « Une version de l'Atlantide » encore plus tardivement, dans un numéro de 1944 de la revue Gants du ciel.
Parmi les auteurs postérieurs, il faut citer Guy Bouchard pour son roman jeunesse Vénus via Atlantide (1961). Selon mes notes de recherche, Azade Harvey signe également un conte de science-fiction, « Des traces de pas dans le sable », qui se sert de l'Atlantide dans le tome 4 des Contes et légendes des îles de la Madeleine (1983), de même que Yolande Villemaire dans sa nouvelle « L'unité rythmique » pour le numéro 55 des Écrits du Canada français en 1985. Dans certains cas, l'Atlantide devient une référence utile pour imaginer le déclin de nos cités et civilisations, autant dans le poème « La Nouvelle Atlantide » (1983) de Dean Dussault (paru dans le numéro 1 de L'Apropos), où c'est Ottawa qui déguste, que dans la nouvelle « Le Paradis perdu » (2013) de Robin Gravel (paru dans C'est la fin du monde !), où c'est Montréal qui sombre...
Dans le genre ésotérique, Claude-Gérard Sarrazin a multiplié les publications, livrant Le Retour des Atlantes en trois tomes de 1984 à 1989, puis enchaînant avec deux autres romans aux éditions Atlantéennes en 1990. À la même époque, je donnais mon avis sur le sujet en signant Le Ressuscité de l'Atlantide (1985-1987) sous la forme d'un feuilleton dans la revue imagine… où l'Atlantide était présentée comme une escroquerie cynique. Depuis, l'Atlantide ressurgit à l'occasion dans la littérature jeunesse, par exemple dans la série « Les Enfants de Poséidon » de Sylvie-Catherine de Vailly, qui inclut un premier tome intitulé La Malédiction des Atlantes (2007) et un troisième intitulé Le Retour des Atlantes (2008). Sinon, on retiendra, du côté de l'édition à compte d'auteur probable, le roman Magelle d'Agaria (2008) de Diane Bourdon aux éditions Incalia comme premier tome d'une série, « Les héritiers de l'Atlantide », qui n'en a pas enregistré d'autres.
La durabilité du mythe est impressionnante, mais la rareté de ses exploitations littéraires avant la Seconde Guerre mondiale est indéniable. Il serait pourtant possible de citer des articles sur l'Atlantide dans les journaux canadiens-français dès le XIXe siècle. Si les écrivains et les poètes ont dédaigné le thème à l'époque, c'est peut-être bien parce qu'il fallait que la Première Guerre mondiale ébranle les certitudes occidentales, ce dont témoignait Paul Valéry dans ces lignes célèbres de La Crise de l'esprit (1919) :
« Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles.
« Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d’empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins ; descendus au fond inexplorable des siècles avec leurs dieux et leurs lois, leurs académies et leurs sciences pures et appliquées, avec leurs grammaires, leurs dictionnaires, leurs classiques, leurs romantiques et leurs symbolistes, leurs critiques et les critiques de leurs critiques. Nous savions bien que toute la terre apparente est faite de cendres, que la cendre signifie quelque chose. Nous apercevions à travers l’épaisseur de l’histoire, les fantômes d’immenses navires qui furent chargés de richesse et d’esprit. Nous ne pouvions pas les compter. Mais ces naufrages, après tout, n’étaient pas notre affaire. »
On sait à quel point Tolkien fut marqué par la Grande Guerre. Même si Valéry ne mentionne pas l'Atlantide dans ce passage, on la devine en filigrane, décrite à demi-mot et s'imposant au souvenir du lecteur... Et même si le Canada français était resté loin de ce conflit, ses auteurs ressentaient une émotion et un étonnement apparentés face au cataclysme et à la dévastation.
Ainsi, si je reproduis ci-dessous le grand poème de Jean Charbonneau (1875-1960), animateur et poète mystique de l'École littéraire de Montréal, c'est en tant que témoignage possible de la réaction littéraire à la guerre. Publié en 1922 dans son recueil L'Âge de sang (Paris, Lemerre), c'est une épopée un peu obscure et brouillonne, mais qui a un souffle étonnant. Elle fait écho à d'autres textes de sa plume où se manifeste une sensibilité cosmique (et en partie religieuse, évidemment), comme son poème « Aux étoiles », inclus dans son premier recueil en 1912, Les Blessures (Paris, Lemerre). Compte tenu de la concordance de dates, son poème « L'Atlantide » pourrait également avoir été inspiré par le livre de Benoît, même si ce roman opte pour une version moins stéréotypée du mythe platonicien.
L'Atlantide
(poème)
I
VOIX DANS LE TEMPS
Ils avaient entendu dans l'espace une voix
Qui proclama : « Je suis un monde légendaire
Dont la science humaine ignore les exploits.
J'existe quelque part, entouré de mystère,
Et toujours insoumis à d'étrangères lois.
« Je porte dans mes flancs d'innombrables richesses
Dont je garde jalousement tous les secrets.
Je prodigue à longs flots le don de mes largesses ;
J'élève fièrement mes augustes sommets
Qui procurent aux sens les plus pures ivresses.
« Le Rythme sur mes bords, largement inspiré,
Apporte des chansons aux feuilles de mes chênes
Que les échos du soir viennent me murmurer ;
Une intense lumière illumine mes plaines,
Et d'un bonheur sans fin je me sens pénétré.
« Un parfum inconnu s'échappe de mes roses
Coutumières des plus chatoyantes couleurs
Qu'on ne voit nulle part, et des métamorphoses
Qu'on ne peut rencontrer parmi les autres fleurs
Sur les coteaux joyeux divinement écloses.
« Les plus rares oiseaux égayent mes vieux bois :
J'entends chanter en eux l'âme de l'Harmonie.
Mes jardins apaisés contiennent à la fois
Des effluves d'amour et la grâce infinie
De me remémorer les choses d'autrefois.
« Sans cesse, mes printemps, depuis les origines,
Par un souffle divin se sont vivifiés.
Les branches de mes pins, des étoiles voisines,
Au cours des âges morts se sont multipliés,
Et des fleuves géants contournent mes collines.
« Je suis, ainsi qu'un temple aux péristyles d'or,
Ouvert sur l'infini des temps que j'émerveille :
Je rayonne au milieu d'un féerique décor;
Pour moi seule une paix perpétuelle veille,
Et je la garde en moi comme un pieux trésor.
« Je ne redoute pas la vie inexorable.
Les privilégiés qui fouleront mes bords
Ignoreront les coups de l'âge redoutable ;
J'éloigne les humains de l'empire des morts,
Car je demeure, en mon essence, impérissable. »
II
VER5 LA CONQUÊTE
Ses voiles maintenant par la brise gonflées,
Le navire, ébloui d'air pur et de soleil,
Vogue majestueux sur les mers ondulées.
Il s'en va libre et fier, de par le jour vermeil,
Vers des rives que nul n'a jamais contemplées.
Les vagues ont blanchi sa proue à qui les dieux
Prodiguent des rayons de fierté surhumaine.
Il porte des haubans et des mâts vigoureux ;
L'ivresse du désir le domine et l'entraîne :
Il répond aux appels d'un songe impérieux.
Assoiffés de bonheurs aussi grands qu'impossibles,
Les conquérants, les yeux vers les astres des nuits,
Entendent autour d'eux des voix irrésistibles,
Alors qu'en leur pensée étrangère aux vains bruits.
Ils entrevoient au loin des plaines invisibles.
Ô l'impuissant désir ! Ô sort des lendemains !
Depuis les temps passés qui les obsède encore,
Le mystère a toujours tourmenté les humains ;
Et sans cesse attiré par ce que l'on ignore,
On cherche à déchiffrer l'énigme des Destins.
On leur avait appris que tout projet s'achève
Souvent dans l'insuccès ; que la joie, ici-bas,
Se trouve dans le charme unique de la grève
Natale où nous laissons la trace de nos pas,
Et qu'on y peut enfin satisfaire son rêve.
Que leur importe ! Ils croient à la réalité
D'une terre inconnue, à leur désir ravie,
Où l'on doit découvrir une autre humanité ;
Et que dans le problème étrange de la vie
Se cache en sa splendeur l'ardente Vérité...
Librement, le voilier file, file, rapide
Sur la mer dont la vague est un grand reposoir.
Il méprise l'horreur et la crainte du vide ;
Et son orgueil l'emporte avec l'intime espoir
D'aborder aux pays lointains de l'Atlantide !
Il vogue. Et lorsque enfin, par la lune éclairé,
L'éblouissant fantôme avec sa blanche voile
Laisse sur les flots bleus comme un sillon moiré,
On croit apercevoir une filante étoile
Emportée au hasard du grand soir inspiré !
III
LA DÉCOUVERTE
Au sein de l'Atlantide où les hommes n'ont pas
Souillé la terre vierge et transformé les grèves,
Où jamais la conquête et les sanglants combats
N'ont détourné les monts recueillis de leurs rêves,
Et terni la pudeur sauvage des lilas ;
Où jamais ne souffla le vent de la tempête,
Où s'élèvent ainsi que de blancs Parthénons
D'incomparables pics, cyclopes dont le faîte
Au ciel comme un flambeau fait rayonner les noms,
Et dont nul ne troubla l'imposante retraite ;
Loin du bruit insolite et des mornes rumeurs,
Debout dans une pose insigne et prophétique,
Offrant ses escaliers aux hardis voyageurs,
L'Atlantide apparaît avec son grand portique,
Dans la profusion des parfums et des fleurs.
« Je te salue, ô blonde Atlantide, parure
Incomparable, écrin perdu sur l'océan,
Déesse de beauté, joyau de la nature,
Terre promise issue un jour du noir néant,
Et que ne connut pas l'humaine créature !
« Déjà t'avait louée en chants harmonieux
Homère s'inspirant de la lyre d'Orphée ;
Les âges de vertus, où tous les demi-dieux,
De tes mortelles sœurs te proclamant la fée,
Te comblaient sans compter de dons miraculeux.
« Sans cesse éblouissant en des saisons plus belles,
Le Temps te prodiguait de joyeux renouveaux :
Aux hardis conquérants, Terre, tu te révèles!
Et dans les doux accords venus de tes ruisseaux
Ils apprendront un jour des hymnes immortelles !
« Tu vis de l'impassible et dédaigneux oubli,
Loin des mornes laideurs que les gouffres fécondent.
Le penchant de tes monts est de marbre poli ;
Et dans tes flancs où l'or et le porphyre abondent
Tu gardes en secret le chef-d'œuvre accompli.
« L'océan peut vouloir effriter pierre à pierre
Tes rivages nombreux qu'il attaque en passant;
Mais malgré la grandeur de son âpre colère,
A ta voix il devient l'esclave obéissant,
Et s'épuise à tes pieds en une humble prière ! »
IV
PAYS ENCHANTÉ
Ils vivaient dans la paix et la mansuétude.
Le cœur était plus pur que le lis, et l'amour
Comblait la vie entière ou, dans la quiétude,
S'écoulaient librement la nuit après le jour,
Ou le bonheur semblait une calme habitude.
Ô pays enchanté ! Voir s'écouler les ans
Sans vieillir. Exister dans la splendeur première !
Ne pas se soucier des maux, ces noirs passants
Qui souillent sous nos pas la route coutumière ;
Passer sans redouter les coups mortels du Temps !
Respirer sous des cieux sans rides et sans voiles ;
Partager à la fois tous les enivrements ;
Devant les bois songeurs frissonner jusqu'aux moelles ;
Et dans les soirs nombreux remplis d'apaisements,
Participer au rêve éternel des étoiles !
Ô le charme imposant dont se parent les nuits,
Lorsqu'on entend la mer qui lentement déferle...
Tu rayonnes, ô mont, et tu nous éblouis !
Vous ressemblez, aurore, à la plus blanche perle !
Matins, vous réveillez en nous l'âme des bruits !
Ô pays enchantés où l'ombre est sans mystère,
Où le cœur tout vibrant s'est senti rajeunir !
Parfums dont les senteurs nous viennent de la terre,
Forêts qui conservez le plus doux souvenir,
Sentiers dont le beau nom demeure légendaire !
Ils vivaient au milieu d'un immortel décor
Où, dès la profondeur des siècles, une race,
Exempte des mauvais désirs et du remord [sic],
Proclamait son bonheur aux souffles de l'espace,
Et filait de longs jours sans redouter la mort !
La Beauté, rayonnant dans sa blancheur féconde,
Leur dévoilait sa grâce et ses plus chers secrets ;
Et, comme le soleil qui là-haut nous inonde,
Sans jamais les compter, d'éblouissants reflets,
Ils s'étaient déclarés les seuls maîtres du monde.
Ô pays enchanté ! Pays des fictions !
De quelque rare nom qu'ici-bas on vous nomme,
Vous remplissez l'esprit de nobles visions !
Par vous, on était fier de vivre et d'être un homme,
Sol des enchantements et des illusions!
V
LE CATACLYSME
Ambition humaine ! Ô désirs effrénés :
Tous les malheurs dont nous demeurons solidaires,
De notre seul orgueil sur la terre sont nés.
Nous portons en nos cœurs des tares séculaires,
Et dès notre berceau nous sommes condamnés.
Ils étaient revenus de la blonde Atlantide
Plongée un jour au sein des abimes [sic] pervers ;
Et tous ces conquérants à l'esprit intrépide,
Si longtemps attentifs aux sirènes des mers,
Devant l'œuvre du Temps qui s'en va si rapide,
Se disaient maintenant : « Ô rêves du passé !
Atlantide où germaient de fières harmonies,
Ô pays par la brise ardemment caressé,
Et qui nous révélas des beautés infinies,
Un cruel châtiment devant toi s'est dressé.
« L'océan dont le flot lamentablement gronde
T'environne à présent de son obscurité.
Ta peine grandira de plus en plus profonde ;
Tu porteras ton deuil pendant l'éternité,
Et tu n'entendras plus les vains appels du monde.
« Tout de tes projets morts, tout ce que l'on vécut,
Tout de ta majesté vibrante de lyrisme,
Les palais de tes bords et ton peuple vaincu,
Ont dû subir l'horreur d'un brusque cataclysme ;
Et de tous tes enfants, nul n'aura survécu !
« On ne pourra trouver, par le chemin des âges,
La place où ta splendeur éclipsait le soleil ;
Et les penchants joyeux qui bordaient tes rivages
Ne nous hanteront plus que dans notre sommeil,
Ne nous laissant que l'ombre inerte des mirages !
« Tu ne surgiras plus de ton gouffre infini
Pour proclamer ton nom aux souffles de l'espace,
Ayant été pourtant un pays rajeuni
Où vivait dans l'amour la plus antique race,
Et pour qui le malheur semblait être banni.
« Et comme les bonheurs, dont l'existence est brève,
Demeureront parmi les choses d'autrefois,
Tu resteras pour nous l'harmonieuse grève
D'où revient par hasard le bruit des grandes voix,
Comme un écho perdu dans l'océan d'un rêve. »
VI
VOIX DE L'ABIME
À ces mots, une voix, pleine encore d'orgueil,
Du fond de l'océan est tout à coup montée.
Elle disait : « Les dieux, me couvrant d'un linceul.
M'ont plongée au hasard de l'onde épouvantée
Où je dors, étendue ainsi qu'en un cercueil.
« Morte autant que la mort, désormais oubliée,
Plus profond m'apparaît l'impérieux chaos
Où la nuit sur mon front, toujours multipliée,
Sans cesse appesantit mon éternel repos,
Pour une faute ancienne et jamais expiée.
« Je ne reverrai plus maintenant de mes yeux
L'insigne majesté des flots et des tempêtes,
Les roses, le soleil et les firmaments bleus
Où, ceints de leur fierté, se dessinaient les faîtes
De mes palais de marbre aux galbes somptueux.
« Oh ! ne plus respirer les vastes étendues
Qui se parent pour nous de mirages divins ;
Se nourrir chaque jour d'illusions perdues,
De stériles désirs ; sentir ses rêves vains ;
Ne plus se réjouir de choses entendues.
« Ne plus revoir autour la blancheur des matins,
Les crépuscules roux et les blondes aurores,
Le paradis perdu des féeriques jardins ;
Ne plus entendre en moi les musiques sonores
Que me chantait le vent dans les beaux soirs sereins !...
« Ma torture pourtant, qui toujours se prolonge,
N'est pas d'avoir perdu les douces voluptés
Dont les instants si brefs s'effacent comme un songe ;
Ou de me savoir loin des bonheurs enchantés.
Mais l'obsédant regret qui sans cesse me ronge
« C'est de ne plus pouvoir, du sein des profondeurs,
Te soulever, ô flot qui sur moi t'amoncelles !
De me voir interdite au rayon des splendeurs
Portant avec fierté toute la vie en elles ;
C'est de subir le gouffre en ses noires laideurs.
« C'est que je fais entendre une vaine prière ;
C'est que, pour augmenter mon cruel châtiment,
L'ombre devient plus lourde à ma couche dernière ;
Et que je tente en vain, dans mon âpre tourment,
De relever mes yeux meurtris vers la lumière ! »
Néanmoins, la présence de l'Atlantide dans les lettres canadiennes-françaises n'a pas encore été étudiée, il me semble. Au XIXe siècle, Jules Verne mentionne l'Atlantide dans L'Île mystérieuse, ce qui n'est peut-être pas sans intention puisque les naufragés ont sous leurs pieds le capitaine Nemo qui a visité les ruines de l'Atlantide dans Vingt mille lieues sous les mers. Ces deux romans sont bien connus au Canada français.
Le roman français L'Atlantide (1919) de Pierre Benoît connaît un grand succès à sa sortie et il n'est pas douteux qu'il soit lu en terre canadienne.
Au Québec, la plupart des références atlantes dans la fiction sont assez tardives. Dans Rien que des hommes, la suite inédite (et sans date) de La Fin de la Terre (1931), Emmanuel Desrosiers imagine que les Martiens sont des humains originaires de la Terre. Va-t-il jusqu'à en faire des réfugiés atlantes, comme Tolstoï dans Aelita en 1923 ? Il faudrait que je relise l'ouvrage.
En 1935, dans le petit recueil de contes Au douze coups de minuit, Emma-Adèle Bourgeois signe « L'Atlantide », une version plus féerique de la disparition de l'Atlantide. (C'est aussi à cette époque que Tolkien travaille sur l'histoire de la chute de Númenor, sa version de l'Atlantide, qui l'aidera à édifier la version finale de la Terre du Milieu et à fonder incidemment la fantasy moderne.) Quant à Georges Bugnet, il signe « Une version de l'Atlantide » encore plus tardivement, dans un numéro de 1944 de la revue Gants du ciel.
Parmi les auteurs postérieurs, il faut citer Guy Bouchard pour son roman jeunesse Vénus via Atlantide (1961). Selon mes notes de recherche, Azade Harvey signe également un conte de science-fiction, « Des traces de pas dans le sable », qui se sert de l'Atlantide dans le tome 4 des Contes et légendes des îles de la Madeleine (1983), de même que Yolande Villemaire dans sa nouvelle « L'unité rythmique » pour le numéro 55 des Écrits du Canada français en 1985. Dans certains cas, l'Atlantide devient une référence utile pour imaginer le déclin de nos cités et civilisations, autant dans le poème « La Nouvelle Atlantide » (1983) de Dean Dussault (paru dans le numéro 1 de L'Apropos), où c'est Ottawa qui déguste, que dans la nouvelle « Le Paradis perdu » (2013) de Robin Gravel (paru dans C'est la fin du monde !), où c'est Montréal qui sombre...
Dans le genre ésotérique, Claude-Gérard Sarrazin a multiplié les publications, livrant Le Retour des Atlantes en trois tomes de 1984 à 1989, puis enchaînant avec deux autres romans aux éditions Atlantéennes en 1990. À la même époque, je donnais mon avis sur le sujet en signant Le Ressuscité de l'Atlantide (1985-1987) sous la forme d'un feuilleton dans la revue imagine… où l'Atlantide était présentée comme une escroquerie cynique. Depuis, l'Atlantide ressurgit à l'occasion dans la littérature jeunesse, par exemple dans la série « Les Enfants de Poséidon » de Sylvie-Catherine de Vailly, qui inclut un premier tome intitulé La Malédiction des Atlantes (2007) et un troisième intitulé Le Retour des Atlantes (2008). Sinon, on retiendra, du côté de l'édition à compte d'auteur probable, le roman Magelle d'Agaria (2008) de Diane Bourdon aux éditions Incalia comme premier tome d'une série, « Les héritiers de l'Atlantide », qui n'en a pas enregistré d'autres.
La durabilité du mythe est impressionnante, mais la rareté de ses exploitations littéraires avant la Seconde Guerre mondiale est indéniable. Il serait pourtant possible de citer des articles sur l'Atlantide dans les journaux canadiens-français dès le XIXe siècle. Si les écrivains et les poètes ont dédaigné le thème à l'époque, c'est peut-être bien parce qu'il fallait que la Première Guerre mondiale ébranle les certitudes occidentales, ce dont témoignait Paul Valéry dans ces lignes célèbres de La Crise de l'esprit (1919) :
« Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles.
« Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d’empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins ; descendus au fond inexplorable des siècles avec leurs dieux et leurs lois, leurs académies et leurs sciences pures et appliquées, avec leurs grammaires, leurs dictionnaires, leurs classiques, leurs romantiques et leurs symbolistes, leurs critiques et les critiques de leurs critiques. Nous savions bien que toute la terre apparente est faite de cendres, que la cendre signifie quelque chose. Nous apercevions à travers l’épaisseur de l’histoire, les fantômes d’immenses navires qui furent chargés de richesse et d’esprit. Nous ne pouvions pas les compter. Mais ces naufrages, après tout, n’étaient pas notre affaire. »
On sait à quel point Tolkien fut marqué par la Grande Guerre. Même si Valéry ne mentionne pas l'Atlantide dans ce passage, on la devine en filigrane, décrite à demi-mot et s'imposant au souvenir du lecteur... Et même si le Canada français était resté loin de ce conflit, ses auteurs ressentaient une émotion et un étonnement apparentés face au cataclysme et à la dévastation.
Ainsi, si je reproduis ci-dessous le grand poème de Jean Charbonneau (1875-1960), animateur et poète mystique de l'École littéraire de Montréal, c'est en tant que témoignage possible de la réaction littéraire à la guerre. Publié en 1922 dans son recueil L'Âge de sang (Paris, Lemerre), c'est une épopée un peu obscure et brouillonne, mais qui a un souffle étonnant. Elle fait écho à d'autres textes de sa plume où se manifeste une sensibilité cosmique (et en partie religieuse, évidemment), comme son poème « Aux étoiles », inclus dans son premier recueil en 1912, Les Blessures (Paris, Lemerre). Compte tenu de la concordance de dates, son poème « L'Atlantide » pourrait également avoir été inspiré par le livre de Benoît, même si ce roman opte pour une version moins stéréotypée du mythe platonicien.
L'Atlantide
(poème)
I
VOIX DANS LE TEMPS
Ils avaient entendu dans l'espace une voix
Qui proclama : « Je suis un monde légendaire
Dont la science humaine ignore les exploits.
J'existe quelque part, entouré de mystère,
Et toujours insoumis à d'étrangères lois.
« Je porte dans mes flancs d'innombrables richesses
Dont je garde jalousement tous les secrets.
Je prodigue à longs flots le don de mes largesses ;
J'élève fièrement mes augustes sommets
Qui procurent aux sens les plus pures ivresses.
« Le Rythme sur mes bords, largement inspiré,
Apporte des chansons aux feuilles de mes chênes
Que les échos du soir viennent me murmurer ;
Une intense lumière illumine mes plaines,
Et d'un bonheur sans fin je me sens pénétré.
« Un parfum inconnu s'échappe de mes roses
Coutumières des plus chatoyantes couleurs
Qu'on ne voit nulle part, et des métamorphoses
Qu'on ne peut rencontrer parmi les autres fleurs
Sur les coteaux joyeux divinement écloses.
« Les plus rares oiseaux égayent mes vieux bois :
J'entends chanter en eux l'âme de l'Harmonie.
Mes jardins apaisés contiennent à la fois
Des effluves d'amour et la grâce infinie
De me remémorer les choses d'autrefois.
« Sans cesse, mes printemps, depuis les origines,
Par un souffle divin se sont vivifiés.
Les branches de mes pins, des étoiles voisines,
Au cours des âges morts se sont multipliés,
Et des fleuves géants contournent mes collines.
« Je suis, ainsi qu'un temple aux péristyles d'or,
Ouvert sur l'infini des temps que j'émerveille :
Je rayonne au milieu d'un féerique décor;
Pour moi seule une paix perpétuelle veille,
Et je la garde en moi comme un pieux trésor.
« Je ne redoute pas la vie inexorable.
Les privilégiés qui fouleront mes bords
Ignoreront les coups de l'âge redoutable ;
J'éloigne les humains de l'empire des morts,
Car je demeure, en mon essence, impérissable. »
II
VER5 LA CONQUÊTE
Ses voiles maintenant par la brise gonflées,
Le navire, ébloui d'air pur et de soleil,
Vogue majestueux sur les mers ondulées.
Il s'en va libre et fier, de par le jour vermeil,
Vers des rives que nul n'a jamais contemplées.
Les vagues ont blanchi sa proue à qui les dieux
Prodiguent des rayons de fierté surhumaine.
Il porte des haubans et des mâts vigoureux ;
L'ivresse du désir le domine et l'entraîne :
Il répond aux appels d'un songe impérieux.
Assoiffés de bonheurs aussi grands qu'impossibles,
Les conquérants, les yeux vers les astres des nuits,
Entendent autour d'eux des voix irrésistibles,
Alors qu'en leur pensée étrangère aux vains bruits.
Ils entrevoient au loin des plaines invisibles.
Ô l'impuissant désir ! Ô sort des lendemains !
Depuis les temps passés qui les obsède encore,
Le mystère a toujours tourmenté les humains ;
Et sans cesse attiré par ce que l'on ignore,
On cherche à déchiffrer l'énigme des Destins.
On leur avait appris que tout projet s'achève
Souvent dans l'insuccès ; que la joie, ici-bas,
Se trouve dans le charme unique de la grève
Natale où nous laissons la trace de nos pas,
Et qu'on y peut enfin satisfaire son rêve.
Que leur importe ! Ils croient à la réalité
D'une terre inconnue, à leur désir ravie,
Où l'on doit découvrir une autre humanité ;
Et que dans le problème étrange de la vie
Se cache en sa splendeur l'ardente Vérité...
Librement, le voilier file, file, rapide
Sur la mer dont la vague est un grand reposoir.
Il méprise l'horreur et la crainte du vide ;
Et son orgueil l'emporte avec l'intime espoir
D'aborder aux pays lointains de l'Atlantide !
Il vogue. Et lorsque enfin, par la lune éclairé,
L'éblouissant fantôme avec sa blanche voile
Laisse sur les flots bleus comme un sillon moiré,
On croit apercevoir une filante étoile
Emportée au hasard du grand soir inspiré !
III
LA DÉCOUVERTE
Au sein de l'Atlantide où les hommes n'ont pas
Souillé la terre vierge et transformé les grèves,
Où jamais la conquête et les sanglants combats
N'ont détourné les monts recueillis de leurs rêves,
Et terni la pudeur sauvage des lilas ;
Où jamais ne souffla le vent de la tempête,
Où s'élèvent ainsi que de blancs Parthénons
D'incomparables pics, cyclopes dont le faîte
Au ciel comme un flambeau fait rayonner les noms,
Et dont nul ne troubla l'imposante retraite ;
Loin du bruit insolite et des mornes rumeurs,
Debout dans une pose insigne et prophétique,
Offrant ses escaliers aux hardis voyageurs,
L'Atlantide apparaît avec son grand portique,
Dans la profusion des parfums et des fleurs.
« Je te salue, ô blonde Atlantide, parure
Incomparable, écrin perdu sur l'océan,
Déesse de beauté, joyau de la nature,
Terre promise issue un jour du noir néant,
Et que ne connut pas l'humaine créature !
« Déjà t'avait louée en chants harmonieux
Homère s'inspirant de la lyre d'Orphée ;
Les âges de vertus, où tous les demi-dieux,
De tes mortelles sœurs te proclamant la fée,
Te comblaient sans compter de dons miraculeux.
« Sans cesse éblouissant en des saisons plus belles,
Le Temps te prodiguait de joyeux renouveaux :
Aux hardis conquérants, Terre, tu te révèles!
Et dans les doux accords venus de tes ruisseaux
Ils apprendront un jour des hymnes immortelles !
« Tu vis de l'impassible et dédaigneux oubli,
Loin des mornes laideurs que les gouffres fécondent.
Le penchant de tes monts est de marbre poli ;
Et dans tes flancs où l'or et le porphyre abondent
Tu gardes en secret le chef-d'œuvre accompli.
« L'océan peut vouloir effriter pierre à pierre
Tes rivages nombreux qu'il attaque en passant;
Mais malgré la grandeur de son âpre colère,
A ta voix il devient l'esclave obéissant,
Et s'épuise à tes pieds en une humble prière ! »
IV
PAYS ENCHANTÉ
Ils vivaient dans la paix et la mansuétude.
Le cœur était plus pur que le lis, et l'amour
Comblait la vie entière ou, dans la quiétude,
S'écoulaient librement la nuit après le jour,
Ou le bonheur semblait une calme habitude.
Ô pays enchanté ! Voir s'écouler les ans
Sans vieillir. Exister dans la splendeur première !
Ne pas se soucier des maux, ces noirs passants
Qui souillent sous nos pas la route coutumière ;
Passer sans redouter les coups mortels du Temps !
Respirer sous des cieux sans rides et sans voiles ;
Partager à la fois tous les enivrements ;
Devant les bois songeurs frissonner jusqu'aux moelles ;
Et dans les soirs nombreux remplis d'apaisements,
Participer au rêve éternel des étoiles !
Ô le charme imposant dont se parent les nuits,
Lorsqu'on entend la mer qui lentement déferle...
Tu rayonnes, ô mont, et tu nous éblouis !
Vous ressemblez, aurore, à la plus blanche perle !
Matins, vous réveillez en nous l'âme des bruits !
Ô pays enchantés où l'ombre est sans mystère,
Où le cœur tout vibrant s'est senti rajeunir !
Parfums dont les senteurs nous viennent de la terre,
Forêts qui conservez le plus doux souvenir,
Sentiers dont le beau nom demeure légendaire !
Ils vivaient au milieu d'un immortel décor
Où, dès la profondeur des siècles, une race,
Exempte des mauvais désirs et du remord [sic],
Proclamait son bonheur aux souffles de l'espace,
Et filait de longs jours sans redouter la mort !
La Beauté, rayonnant dans sa blancheur féconde,
Leur dévoilait sa grâce et ses plus chers secrets ;
Et, comme le soleil qui là-haut nous inonde,
Sans jamais les compter, d'éblouissants reflets,
Ils s'étaient déclarés les seuls maîtres du monde.
Ô pays enchanté ! Pays des fictions !
De quelque rare nom qu'ici-bas on vous nomme,
Vous remplissez l'esprit de nobles visions !
Par vous, on était fier de vivre et d'être un homme,
Sol des enchantements et des illusions!
V
LE CATACLYSME
Ambition humaine ! Ô désirs effrénés :
Tous les malheurs dont nous demeurons solidaires,
De notre seul orgueil sur la terre sont nés.
Nous portons en nos cœurs des tares séculaires,
Et dès notre berceau nous sommes condamnés.
Ils étaient revenus de la blonde Atlantide
Plongée un jour au sein des abimes [sic] pervers ;
Et tous ces conquérants à l'esprit intrépide,
Si longtemps attentifs aux sirènes des mers,
Devant l'œuvre du Temps qui s'en va si rapide,
Se disaient maintenant : « Ô rêves du passé !
Atlantide où germaient de fières harmonies,
Ô pays par la brise ardemment caressé,
Et qui nous révélas des beautés infinies,
Un cruel châtiment devant toi s'est dressé.
« L'océan dont le flot lamentablement gronde
T'environne à présent de son obscurité.
Ta peine grandira de plus en plus profonde ;
Tu porteras ton deuil pendant l'éternité,
Et tu n'entendras plus les vains appels du monde.
« Tout de tes projets morts, tout ce que l'on vécut,
Tout de ta majesté vibrante de lyrisme,
Les palais de tes bords et ton peuple vaincu,
Ont dû subir l'horreur d'un brusque cataclysme ;
Et de tous tes enfants, nul n'aura survécu !
« On ne pourra trouver, par le chemin des âges,
La place où ta splendeur éclipsait le soleil ;
Et les penchants joyeux qui bordaient tes rivages
Ne nous hanteront plus que dans notre sommeil,
Ne nous laissant que l'ombre inerte des mirages !
« Tu ne surgiras plus de ton gouffre infini
Pour proclamer ton nom aux souffles de l'espace,
Ayant été pourtant un pays rajeuni
Où vivait dans l'amour la plus antique race,
Et pour qui le malheur semblait être banni.
« Et comme les bonheurs, dont l'existence est brève,
Demeureront parmi les choses d'autrefois,
Tu resteras pour nous l'harmonieuse grève
D'où revient par hasard le bruit des grandes voix,
Comme un écho perdu dans l'océan d'un rêve. »
VI
VOIX DE L'ABIME
À ces mots, une voix, pleine encore d'orgueil,
Du fond de l'océan est tout à coup montée.
Elle disait : « Les dieux, me couvrant d'un linceul.
M'ont plongée au hasard de l'onde épouvantée
Où je dors, étendue ainsi qu'en un cercueil.
« Morte autant que la mort, désormais oubliée,
Plus profond m'apparaît l'impérieux chaos
Où la nuit sur mon front, toujours multipliée,
Sans cesse appesantit mon éternel repos,
Pour une faute ancienne et jamais expiée.
« Je ne reverrai plus maintenant de mes yeux
L'insigne majesté des flots et des tempêtes,
Les roses, le soleil et les firmaments bleus
Où, ceints de leur fierté, se dessinaient les faîtes
De mes palais de marbre aux galbes somptueux.
« Oh ! ne plus respirer les vastes étendues
Qui se parent pour nous de mirages divins ;
Se nourrir chaque jour d'illusions perdues,
De stériles désirs ; sentir ses rêves vains ;
Ne plus se réjouir de choses entendues.
« Ne plus revoir autour la blancheur des matins,
Les crépuscules roux et les blondes aurores,
Le paradis perdu des féeriques jardins ;
Ne plus entendre en moi les musiques sonores
Que me chantait le vent dans les beaux soirs sereins !...
« Ma torture pourtant, qui toujours se prolonge,
N'est pas d'avoir perdu les douces voluptés
Dont les instants si brefs s'effacent comme un songe ;
Ou de me savoir loin des bonheurs enchantés.
Mais l'obsédant regret qui sans cesse me ronge
« C'est de ne plus pouvoir, du sein des profondeurs,
Te soulever, ô flot qui sur moi t'amoncelles !
De me voir interdite au rayon des splendeurs
Portant avec fierté toute la vie en elles ;
C'est de subir le gouffre en ses noires laideurs.
« C'est que je fais entendre une vaine prière ;
C'est que, pour augmenter mon cruel châtiment,
L'ombre devient plus lourde à ma couche dernière ;
Et que je tente en vain, dans mon âpre tourment,
De relever mes yeux meurtris vers la lumière ! »
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