2011-08-22

 

L'humain et le robot

Durant la dernière élection, l'affrontement politique a opposé un être humain authentique, ouvert à toutes les expériences et soucieux des gens plutôt que des idées, et un automate qui répétait ses convictions toutes faites sans jamais prendre le risque d'entendre une question de trop ou de croiser un regard sceptique.

Harper l'a emporté sur Layton, mais de peu, car Jack Layton (1950-2011) avait fait la campagne de sa vie, comme il l'avait annoncé. La différence entre les deux hommes transcendait les programmes politiques, car les détails retiennent rarement l'attention des électeurs, plus sensibles à la question de savoir si un chef politique est dans leur camp — et s'il est de taille à tenir tête aux difficultés. En faisant campagne, Jack faisait déjà preuve de courage (ou d'obstination), mais la différence tenait aussi à l'humanité de la personne, qui avait peut-être l'avantage, en un sens, s'il se savait déjà miné, d'être un homme libéré des peurs mesquines et des considérations stratégiques. Un homme qui pouvait se donner entièrement à sa passion de la politique, et donc à sa passion des gens, car la politique n'est que la vie de la collectivité, au fond.

À Toronto, il y a vingt ans, j'habitais dans un quartier représenté, entre autres, par Olivia Chow, l'épouse depuis peu de Jack Layton. Tous les deux militaient sur la scène municipale, mais Jack Layton était à l'époque un conseiller municipal qui ne se détachait pas autant qu'on l'a dit puisque la vie municipale au cœur de Toronto comportait une dimension progressiste très marquée. (Durant mon séjour dans la métropole ontarienne, une étudiante de l'Université de Toronto qui écrivait pour le journal étudiant allait commencer à signer une chronique pour un quotidien de la ville et sans doute préparer petit à petit l'ouvrage qui allait la rendre célèbre : le No Logo de Naomi Klein.) C'est plus tard, quand il est devenu le chef du NPD, qu'il s'est imposé pour la première fois à l'attention de nombreux Canadiens, dont moi-même. Une fois, après la dernière élection, j'ai eu l'occasion de serrer la main de Jack Layton et je l'ai vu ensuite parler aux journalistes — déjà pâle, amaigri, blanchi, la peau translucide... mais encore habité par une flamme qui faisait fi de la fragilité du corps humain.

Mais si les robots durent longtemps, les simples humains meurent. Et parfois trop tôt. Cruellement. Et si tristement.

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Comments:
Un bel hommage et bien des voix qui s'élèvent aujourd'hui pour en parler. Que son exemple servent à ses successeurs. :)
 
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