2009-12-19

 

L'éducation universitaire des Canadiens

Dans un discours (.PDF) du mois d'octobre, David Naylor, le nouveau président de l'Université de Toronto (le précédent s'étant fait offrir un poste en Californie juste avant les coupures, il a coupé court à son mandat), a sonné l'alarme au sujet des taux de diplomation des jeunes Canadiens, que ce soit au niveau du premier cycle universitaire :

« The number of Canadians who earn bachelor’s degrees is clearly below the OECD average and well behind many other nations. »

ou au niveau des cycles suivants :

« About 1% of the population in the relevant age cohort graduate from university with a PhD or similar advanced degree, again below the OECD average, with many countries running far ahead of us. »

Il s'appuyait sur un rapport de l'OCDE, Education at a Glance 2009: OECD Indicators. C'est ce qui a justifié le débat qui a suivi sur l'opportunité de réorganiser le financement universitaire au Canada en concentrant la recherche au sein d'une poignée d'universités plus compétitives dans ce domaine que les autres.

Mais avait-il raison?

Tout d'abord, notons que le classement historique, si je puis dire, est plus favorable pour le Canada. La proportion de Canadiens adultes (de 25 à 64 ans) qui ont bénéficié d'une forme quelconque d'éducation post-secondaire est très élevée. Et ce sont 87% des Canadiens adultes qui ont au moins une éducation secondaire supérieure (la moyenne de l'OCDE étant de 70%). Ceci reflète en partie l'avance historique du Canada sur plusieurs autres pays en matière d'accessibilité aux études post-secondaires et en partie la diversité plus grande qu'ailleurs des formes disponibles d'éducation post-secondaire au fil des ans au Canada (cégeps québécois, 13e année, DEC). En Europe, on a longtemps contingenté l'accès aux études post-secondaires ou on l'a réservé à des élites sélectionnées. La figure ci-dessous (données de 2007) illustre ces effets pour le Canada comparé à quelques pays de l'OCDE.Le Canada ne démérite pas non plus au niveau de la participation à l'éducation dite tertiaire (essentiellement collégiale et universitaire) : la proportion de 48% des adultes à y avoir accédé est la plus élevée de l'OCDE et la tendance est à la hausse de 1997 à 2007. Par contre, les choses se gâtent au niveau de la diplomation strictement dite et le Canada se place, à première vue, loin derrière l'Australie (49,8%), la Nouvelle-Zélande (47,6%) ou même les États-Unis (36,5%), au chapitre de la diplomation (30,6%) pour tous les programmes du tertiaire (en excluant les doctorats). Toutefois, ce que Naylor et ses recherchistes ont négligé, c'est l'effet de l'apport d'étudiants étrangers. Si on exclut ceux-ci, le taux de diplomation passe à 35,8% pour l'Australie et 37,3% pour la Nouvelle-Zélande. Les statistiques ne sont pas disponibles pour tous les pays dans cette catégorie, mais on peut examiner les données disponibles pour les seconds diplômes universitaires. S'ils n'existent pas de la même façon dans tous les cas, la comparaison des taux bruts et des taux ajustés en éliminant les étudiants étrangers est éclairante. Le Canada n'est plus aussi nettement à la traîne et les différences sont moins accusées...Le phénomène s'observe aussi au niveau du doctorat et le resserrement de l'écart entre les pays est encore plus patent. Bref, il n'est pas aussi évident que le prétend Naylor qu'il faille paniquer. Et la démonstration reste à faire que la solution passerait par les réformes qu'il propose.

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Comments:
De toute façon, en tant que diplômée du deuxième cycle universitaire qui avait le choix entre occuper un emploi dans son domaine à 11$ l'heure ou hors de son domaine (emploi demandant un diplôme technique) pour le double, je me dis que l'accent mis sur la formation universitaire est vraiment trop important.

La plupart de nos techniques collégiales offrent désormais de meilleures perspectives d'emploi que les diplômes universitaires. Alors il ne faut pas s'étonner que notre taux de diplomation soit bas et je crois que la solution passerait davantage par une revalorisation des emplois en recherche que par un refinancement.

Payer cher pour des études débouchant sur un emploi payant n'est pas, je crois, un problème. Payer cher pour des études qui nous offrent ensuite de vivoter... C'est bien beau de ne pas être matérialiste, mais mettre 20 ans à rembourser un prêt étudiant, ce n'est pas une perspective d'avenir très réjouissante.
 
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