2009-09-20

 

La science sous l'anathème

Le roman Anathem de Neal Stephenson invente un monde entièrement consacré à un thème déjà présent dans certains de ses ouvrages antérieurs : la tension renouvelée dans le contexte actuel entre la raison et ses détracteurs, entre la technique et ses critiques, entre la science et ses ennemis... Cette Terre parallèle connue sous le nom d'Arbre a cantonné les intellectuels et les scientifiques dans des cloîtres à l'écart du monde profane. La première partie du récit plonge le lecteur dans la vie claustrale telle que vécue par le jeune Erasmas, mais celui-ci se retrouve propulsé hors des murs de son moutier par les événements qui bouleversent l'équilibre des forces sur sa planète. L'irruption dans le système d'Arbre d'un gigantesque vaisseau spatial au comportement hostile oblige les pouvoirs séculiers à rompre l'isolement des savants cloîtrés et à admettre l'établissement d'un pouvoir partagé entre deux magistères — ce qui rappelle une idée de Stephen Jay Gould quant à la meilleure façon d'harmoniser la foi et la science.

Comme roman, Anathem est plus maîtrisé que les premiers ouvrages de science-fiction de Stephenson que j'avais lus avant de me détourner des pavés que l'auteur enchaînait sans discontinuer. Le moteur de l'intrigue est un premier contact, ce qui n'est pas nouveau, mais les personnages ont beaucoup plus d'épaisseur que dans ces ouvrages antérieurs. En fin de compte, toutefois, l'intérêt du roman réside surtout dans la construction historique d'Arbre et de ses cloîtres, qui est tout à la fois vertigineuse, amusante et souvent riche de réflexions. Les allusions à notre réalité sont nombreuses, ce qui se justifie comme on le découvre en cours de route, et les jeux de mots intraduisibles aussi. Quand le récit bascule dans l'action purement spatiale, on tombe dans le convenu, mais l'amateur de science et de raison trouvera son miel dans l'histoire de ces cloîtres scientifiques où platoniciens, astronomes et historiens des idées se croisent, sous d'autres noms... (Statue de Platon à la Library of Congress. Photo prise par Carol M. Highsmith en 2007, LC-DIG-highsm-02117.)

Libellés : ,


Comments:
Very nice! J'achète.
 
Publier un commentaire

<< Home

This page is powered by Blogger. Isn't yours?