2009-02-03

 

Un budget à courte vue

Les commentateurs comme Jeffrey Simpson qui se plaignent du manque de vision du gouvernement Harper ont bien raison. Histoire de justifier le déficit de trente-quatre milliards de dollars, d'une taille dont on n'avait plus l'habitude, le nouveau budget fédéral prétend que, grâce « au Plan d’action économique, le Canada sortira de la récession en disposant d’une infrastructure plus moderne et plus écologique, d’une main-d’œuvre plus qualifiée, d’impôts et de taxes plus faibles et d’une économie plus concurrentielle. »

Mais parlons-en de cette infrastructure plus moderne et plus écologique! Le budget prévoit douze milliards de dépenses en infrastructures, mais que va-t-on faire? On va réparer les égouts, les systèmes d'aqueduc, les ponts, les ports, les installations de loisirs communautaires, les laboratoires fédéraux, les édifices universitaires et de nombreuses autres infrastructures locales existantes. On va investir dans les écoles, l'eau et les services communautaires des Premières Nations et installer l'internet à haute vitesse dans les régions. On augmentera la fréquence des services de Via Rail dans le corridor Québec-Windsor, et on mettra deux millions pour étudier l'avenir du Manège militaire de Québec...

On élargira aussi à quatre voies un tronçon de la Transcanadienne qui traverse le parc fédéral de Banff! Une infrastructure « plus écologique », hein?

La plupart de ces dépenses sont louables, mais cela fait longtemps qu'elles auraient dû être engagées. Et si on avait dépensé en temps et lieu, sans attendre que les infrastructures agonisent, les réfections auraient sans doute coûté moins cher. À long terme, l'effet sera sans doute réduit puisqu'on se borne à retaper ou remplacer des structures qui existent déjà. Et on cherche la dimension écologique promise dans la plupart des cas sans trouver en quoi des autoroutes et des ponts refaits à neuf réduiraient les émissions de gaz à effet de serre.

À quoi ressembleraient des investissements rentables à plus long terme et susceptibles de véritablement changer la donne économique et écologique? Eh bien, prenons donc ce rapport d'Anne Golden et Natalie Brender, Sustainable Urban Transportation: A Winning Strategy for Canada (.PDF), sorti en 2007, qui évoquait la possibilité de trains à vitesse élevée au pays...

Dans l'Ouest, entre Calgary et Edmonton, la combinaison sur la ligne existante d'un train à vitesse élevée et des trains de marchandises coûterait 1,7 milliards de dollars pour abaisser à deux heures dix minutes la durée du trajet sur une distance de 310 km. La construction d'une voie spéciale réservée à un TGV ou un JetTrain de Bombardier coûterait jusqu'à 3,4 milliards pour réduire la durée du trajet à 90 minutes.

Dans l'Est, entre Montréal et Toronto, les cas de figure correspondants coûteraient trois milliards (voie partagée) et cinq ou six milliards (voie réservée). Comme dans le cas d'une liaison Calgary-Edmonton, on pense que la nouvelle liaison couvrirait au moins ses frais. Les vrais problèmes sont politiques : résister aux pressions de Québec, Ottawa et Windsor pour faire partie du tracé dans l'Est, et gérer le mécontentement de WestJet, qui vivrait assez mal une concurrence subventionnée sur une de ses principales liaisons.

À l'échelle du budget fédéral, de tels investissements ne seraient pas exagérés. Mais il faudra attendre qu'on élise un gouvernement capable d'audace.

Libellés : ,


Comments: Publier un commentaire

<< Home

This page is powered by Blogger. Isn't yours?