2008-12-03
L'effet de fronde
J'ai déjà connu une crise de foi scientifique.
Pendant dix ans environ, j'ai baigné dans le milieu de la physique et de l'astronomie. J'ai décroché deux diplômes, entamé un autre. J'ai fait paraître un article, j'ai côtoyé des scientifiques, confirmés ou non, j'ai travaillé dans des laboratoires ou des observatoires et j'ai trimé sur des problèmes d'astronomie ou de physique. Ma vision du monde reste encore aujourd'hui profondément façonnée par cette partie de ma vie.
C'est pourquoi j'ai été renversé quand je suis tombé sur un article du Journal of the British Interplanetary Society qui présentait un programme d'ordinateur capable de calculer l'excès de vitesse obtenu grâce à l'effet de fronde, et qui appliquait ce programme au cas d'un vaisseau spatial frôlant le Soleil pour s'élancer vers les étoiles avec un surcroît de vitesse (sans nécessairement allumer ses moteurs au périhélie, ce qui offre un certain intérêt). Or, l'effet de fronde n'est intéressant que si l'astre qu'un vaisseau frôle est en mouvement par rapport à la destination du vaisseau — et que si le vaisseau n'est pas captif de cet astre. C'est le cas d'une sonde interplanétaire qui, sur le chemin d'une autre planète, s'approche d'une planète afin d'être accélérée ou ralentie par l'attraction de cette planète par rapport au Soleil. Mais, à l'intérieur du système solaire, on ne retire aucun avantage balistique d'un passage à proximité du Soleil. (Et si on a déjà la vélocité requise pour échapper à l'attraction solaire, je ne suis pas sûr que le gain soit tellement significatif.)
Mais il n'était question que de vaisseaux dotés de vitesses orbitales. Par conséquent, s'attendre à accélérer en faisant le tour du Soleil en chute libre, c'était une violation de la loi de la conservation de l'énergie. Comme si un joueur de hockey expédiant, d'un bon coup, la rondelle le long de la bande dans la zone adverse verrait ressortir la rondelle de la zone, de l'autre côté de la patinoire, avec une vitesse supérieure à celle dont il l'avait dotée au départ...
Très grossièrement, on peut comparer l'effet de fronde à une activité très canadienne, le ski-bottine. Celle-ci consiste (consistait?), pour les gamins qui n'ont pas froid aux yeux l'hiver, à courir derrière un autobus ou un camion qui démarre afin de s'accrocher au pare-choc arrière et de se laisser traîner pendant quelques instants sur la chaussée glacée d'une rue canadienne. (Dans cette vidéo, on voit une vache jouer le rôle de l'autobus... et cette vidéo montre une version moins dangereuse.) En frôlant une planète en mouvement, la sonde spatiale est plus ou moins remorquée par l'attraction de la planète et, selon la géométrie des corps en interaction, peut en retirer un excédent de vitesse.
Certes, à première vue, on ne devrait pas gagner de la vitesse en rattrapant une planète dans son orbite puisque la vitesse acquise en tombant dans son puits gravitationnel serait nécessairement rendue en ressortant de l'entonnoir. Du point de vue de la planète, c'est effectivement le cas. Comme l'explique cette page, toutefois, il faut se placer du point de vue du soleil. Cette autre page fournit une animation pour illustrer l'effet de fronde.
Ainsi, cet article paru dans le Journal of the British Interplanetary Society m'obligeait à remettre en question ma compréhension des principes les plus fondamentaux de la physique et de la mécanique céleste. Pendant quelques moments, j'ai connu un vertige intellectuel comme je n'en ai jamais connu... puis j'ai continué à feuilleter les volumes de la revue et je suis tombé quelques numéros plus loin sur une rétraction des auteurs de l'article, expliquant qu'ils s'étaient trompés... Comme quoi il vaut mieux placer sa foi dans la science que dans l'informatique.
Pendant dix ans environ, j'ai baigné dans le milieu de la physique et de l'astronomie. J'ai décroché deux diplômes, entamé un autre. J'ai fait paraître un article, j'ai côtoyé des scientifiques, confirmés ou non, j'ai travaillé dans des laboratoires ou des observatoires et j'ai trimé sur des problèmes d'astronomie ou de physique. Ma vision du monde reste encore aujourd'hui profondément façonnée par cette partie de ma vie.
C'est pourquoi j'ai été renversé quand je suis tombé sur un article du Journal of the British Interplanetary Society qui présentait un programme d'ordinateur capable de calculer l'excès de vitesse obtenu grâce à l'effet de fronde, et qui appliquait ce programme au cas d'un vaisseau spatial frôlant le Soleil pour s'élancer vers les étoiles avec un surcroît de vitesse (sans nécessairement allumer ses moteurs au périhélie, ce qui offre un certain intérêt). Or, l'effet de fronde n'est intéressant que si l'astre qu'un vaisseau frôle est en mouvement par rapport à la destination du vaisseau — et que si le vaisseau n'est pas captif de cet astre. C'est le cas d'une sonde interplanétaire qui, sur le chemin d'une autre planète, s'approche d'une planète afin d'être accélérée ou ralentie par l'attraction de cette planète par rapport au Soleil. Mais, à l'intérieur du système solaire, on ne retire aucun avantage balistique d'un passage à proximité du Soleil. (Et si on a déjà la vélocité requise pour échapper à l'attraction solaire, je ne suis pas sûr que le gain soit tellement significatif.)
Mais il n'était question que de vaisseaux dotés de vitesses orbitales. Par conséquent, s'attendre à accélérer en faisant le tour du Soleil en chute libre, c'était une violation de la loi de la conservation de l'énergie. Comme si un joueur de hockey expédiant, d'un bon coup, la rondelle le long de la bande dans la zone adverse verrait ressortir la rondelle de la zone, de l'autre côté de la patinoire, avec une vitesse supérieure à celle dont il l'avait dotée au départ...
Très grossièrement, on peut comparer l'effet de fronde à une activité très canadienne, le ski-bottine. Celle-ci consiste (consistait?), pour les gamins qui n'ont pas froid aux yeux l'hiver, à courir derrière un autobus ou un camion qui démarre afin de s'accrocher au pare-choc arrière et de se laisser traîner pendant quelques instants sur la chaussée glacée d'une rue canadienne. (Dans cette vidéo, on voit une vache jouer le rôle de l'autobus... et cette vidéo montre une version moins dangereuse.) En frôlant une planète en mouvement, la sonde spatiale est plus ou moins remorquée par l'attraction de la planète et, selon la géométrie des corps en interaction, peut en retirer un excédent de vitesse.
Certes, à première vue, on ne devrait pas gagner de la vitesse en rattrapant une planète dans son orbite puisque la vitesse acquise en tombant dans son puits gravitationnel serait nécessairement rendue en ressortant de l'entonnoir. Du point de vue de la planète, c'est effectivement le cas. Comme l'explique cette page, toutefois, il faut se placer du point de vue du soleil. Cette autre page fournit une animation pour illustrer l'effet de fronde.
Ainsi, cet article paru dans le Journal of the British Interplanetary Society m'obligeait à remettre en question ma compréhension des principes les plus fondamentaux de la physique et de la mécanique céleste. Pendant quelques moments, j'ai connu un vertige intellectuel comme je n'en ai jamais connu... puis j'ai continué à feuilleter les volumes de la revue et je suis tombé quelques numéros plus loin sur une rétraction des auteurs de l'article, expliquant qu'ils s'étaient trompés... Comme quoi il vaut mieux placer sa foi dans la science que dans l'informatique.
Libellés : Philosophie, Sciences