2008-04-02

 

Le futur de Québec... en 1900

En avril 1900, à l'occasion d'une causerie à Québec, Ulric Barthe rappelait son activité de journaliste dans une revue de Québec du nom de La Semaine commerciale : « Dès 1894, j'écrivais en faveur du tramway électrique; depuis 1895, sans relâche, j'ai dépensé de l'encre en faveur du raccordement du Québec avec le Parry Sound. La "Semaine Commerciale" désignait dès l'automne de 1896 Son Honneur le maire Parent comme le futur président de la Compagnie du Pont de Québec, et en mars 1897 il entrait à la direction de la Compagnie et me faisait l'honneur de m'appeler comme secrétaire. »

Hélas, le projet du pont de Québec, mal financé, mal conçu et mal supervisé, aboutira à la catastrophe d'août 1907, quand l'effondrement d'une moitié du pont en construction tuera près de soixante personnes, dont un tiers de travailleurs de Kahnawake. Ulric Barthe lui-même échappe de peu à la mort, ayant visité le chantier et arpenté le tablier moins d'une heure avant l'effondrement. Dans le numéro du 31 août 1907 de La Presse de Montréal, il en témoigne en ces termes :

« J'allai visiter les travaux du pont en compagnie du professeur G. Couture, de MM. Lavigne, Vézina et Burke. Après une inspection des chantiers, je profitai de l'offre qui m'était faite pour monter sur la locomotive qui s'en allait chercher des matériaux sur les chantiers de la Chaudière, pour faire voir à mes amis les travaux d'approche.

Nous revînmes sur le convoi, et arrivés à l'entrée du pont lui-même, nous descendîmes.

Le mécanicien, M. McNaughton, le même qui, quelques minutes après, a si miraculeusement échappé à la mort, insista auprès de nous pour aller jusqu'à l'extrémité du pont où il se rendait avec son convoi de matériaux.

Étant pressé de rentrer, je déclinai l'offre, et après avoir serré la main du jeune M. Birks, l'un des officiers de la compagnie ``Phoenix", nous descendîmes par la grève, pour retourner.

Hélas! je ne me doutais guère que je venais de serrer la main, pour la dernière fois, à ce pauvre jeune homme qui est au nombre des disparus. Il y avait cinq minutes environ que nous étions partis et nous longions la grève, nous dirigeant vers le pont Garneau, lorsque nous entendîmes un grand bruit, comme une détonation de mine.

L'un de mes compagnons s'écria:

"C'est le pont!" mais l'idée me parut impossible.

"C'est une mine qui vient de partir," lui dis-je.

"Mais non, me répondit-il, je vous dis que c'est le pont". Et retournant de quelques pas en arrière:

"C'est le pont, cria-t-il; il s'écroule." »

Heureusement, Barthe a eu des idées aux suites plus heureuses. Lors de la même causerie en 1900, il se vante : « Comme remède à l'alcoolisme, je conseillais alors la consommation du vin, de la bière et du cidre; voyez aujourd'hui le nombre de brasseries et de cuveries qui ont surgi depuis quelques années en ville et dans les campagnes environnantes. » Si la logique du raisonnement nous échappe au premier abord, c'est que nous avons parfois oublié qu'en Amérique du Nord, l'alcoolisme si condamné et combattu, c'était d'abord la consommation d'alcools de grain, d'eau-de-vie, bref, de whiskey. Pour réduire les méfaits de l'ivresse, Barthe prônait donc une consommation plus modérée. Qu'il ait été écouté ou non, il plaidait clairement dans le sens de l'histoire des politiques québécoises en la matière, tandis que les autres provinces du pays allaient plutôt opter pour des formes de prohibition afin de réagir aux mêmes problèmes.

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