2006-08-06
Le progrès vu par Louis-Joseph Doucet
L'œuvre de Louis-Joseph Doucet (1874-1959) tombera bientôt dans le domaine public au Canada. On y trouve un peu de science-fiction légère mais précoce, soit « Lettre écrite de la lune » (1911 en livre, mais d'abord publiée dans Le Passe-temps musical, littéraire et fantaisiste le 10 septembre 1904), mais aussi des textes qui témoignent d'un observateur d'une société en mouvement et sensible aux nouveautés.
Dans Contes du vieux temps : çà et là (1911), il signe quelques lignes sur le progrès en commençant par admettre : « Nous sommes dans un siècle de progrès, tout le monde le dit, et non seulement tout le monde, mais même les journaux et les enfants le répètent à tue tête ».
La recherche de la vitesse et de l'amélioration est devenue évidente, alors même qu'ailleurs au Québec, Louis Hémon écrivait Maria Chapdelaine. Doucet, lui, écrit : « Tout va bien et va vite : les hommes et les choses se sont associés, et l'on peut faire le tour du monde connu et inconnu, physique et métaphysique en quelques heures, ma foi, les chars auront bientôt des ailes et les bateaux auront bon pied bon œil, et assez d'instinct pour laisser dormir les pilotes, "naturellement". On les tiendra responsables des accidents, un jury de leur caste assistera à leur procès, si on les trouvait en faute. »
Il ne s'agit pas exactement d'un texte de science-fiction, mais Doucet envisage quand même quelques innovations futuristes... et assez fantaisistes :
« La police sera représentée par des bâtons automobiles, au coin des rues, et l'homme pourra tout à son aise dormir à l'électricité ou au gaz, selon son goût et ses aptitudes.
Les grandes questions parlementaires seront discutées au graphophone et la télégraphie sans fils [sic] frappera l'oreille attentive des saints émus du céleste empire, et l'intelligence et le jugement, l'esprit et la mémoire seront vendus à cinq centins le boisseau ! Des journaux nous annonceront cette marchandise avec des réductions et des "pour-centages".
Bonnes gens du vingtième siècle naissant, je ne dis rien de surprenant, rien de drôle, rien de burlesque, on a déjà inventé quelque chose qui surpasse tout ça : on a inventé des canons qui peuvent détruire mille hommes à la fois, tandis que le tonnerre que le bon Dieu a trouvé n'en tue qu'un ou deux, par-ci par-là. Battu le tonnerre du bon Dieu! Tous les médecins sont enfoncés ! Sus aux microbes de mort ! La guerre a le meilleur record maintenant.
Toutes les maladies de l'univers, tous les maux humains se retirent vaincus, gueux et édentés, devant l'homme vainqueur de l'homme, et assez animal pour être toujours le roi des animaux qui ne se battent, eux, qu'avec leurs propres griffes et leurs propres dents. »
Dans Contes du vieux temps : çà et là (1911), il signe quelques lignes sur le progrès en commençant par admettre : « Nous sommes dans un siècle de progrès, tout le monde le dit, et non seulement tout le monde, mais même les journaux et les enfants le répètent à tue tête ».
La recherche de la vitesse et de l'amélioration est devenue évidente, alors même qu'ailleurs au Québec, Louis Hémon écrivait Maria Chapdelaine. Doucet, lui, écrit : « Tout va bien et va vite : les hommes et les choses se sont associés, et l'on peut faire le tour du monde connu et inconnu, physique et métaphysique en quelques heures, ma foi, les chars auront bientôt des ailes et les bateaux auront bon pied bon œil, et assez d'instinct pour laisser dormir les pilotes, "naturellement". On les tiendra responsables des accidents, un jury de leur caste assistera à leur procès, si on les trouvait en faute. »
Il ne s'agit pas exactement d'un texte de science-fiction, mais Doucet envisage quand même quelques innovations futuristes... et assez fantaisistes :
« La police sera représentée par des bâtons automobiles, au coin des rues, et l'homme pourra tout à son aise dormir à l'électricité ou au gaz, selon son goût et ses aptitudes.
Les grandes questions parlementaires seront discutées au graphophone et la télégraphie sans fils [sic] frappera l'oreille attentive des saints émus du céleste empire, et l'intelligence et le jugement, l'esprit et la mémoire seront vendus à cinq centins le boisseau ! Des journaux nous annonceront cette marchandise avec des réductions et des "pour-centages".
Bonnes gens du vingtième siècle naissant, je ne dis rien de surprenant, rien de drôle, rien de burlesque, on a déjà inventé quelque chose qui surpasse tout ça : on a inventé des canons qui peuvent détruire mille hommes à la fois, tandis que le tonnerre que le bon Dieu a trouvé n'en tue qu'un ou deux, par-ci par-là. Battu le tonnerre du bon Dieu! Tous les médecins sont enfoncés ! Sus aux microbes de mort ! La guerre a le meilleur record maintenant.
Toutes les maladies de l'univers, tous les maux humains se retirent vaincus, gueux et édentés, devant l'homme vainqueur de l'homme, et assez animal pour être toujours le roi des animaux qui ne se battent, eux, qu'avec leurs propres griffes et leurs propres dents. »
Libellés : Canada, Futurisme, Histoire, Québec, Science-fiction
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Louis-Joseph Doucet fut désigné "prince" des poètes québécois en 1924. Il notamment écrit que le passé était intéressant parce qu'il avait déjà été le futur... Un homme qui avait le sens de l'histoire.
Louis-Joseph Doucet fut mon grand-oncle. Il maniait le verbe et l'esprit avec suffisamment d'adresse pour écrire des livres de poésie en alexandrins.
Jean-Pierre Cristel
Petit-neveu de Louis-Joseph Doucet
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Louis-Joseph Doucet fut mon grand-oncle. Il maniait le verbe et l'esprit avec suffisamment d'adresse pour écrire des livres de poésie en alexandrins.
Jean-Pierre Cristel
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