2017-05-27
Une dictée vernienne
Au Québec, que recommandait-on comme dictée aux élèves du primaire (entre la première et la huitième années d'instruction) en 1892 ? Un extrait des Indes noires de Jules Verne :
LA TERRE AUX ÉPOQUES GÉOLOGIQUES
Pendant les époques géologiques, lorsque le sphéroïde (1) terrestre était encore en voie de formation, une épaisse atmosphère l’entourait, toute saturée de vapeurs d’eau et largement imprégnée (2) d’acide carbonique (3). Peu à peu ces vapeurs se condensèrent (4) en pluies diluviennes (5), qui tombèrent comme si elles eussent été projetées du goulot de quelques millions de milliards de bouteilles d’eau de Seltz (6). C’était, on effet, un liquide chargé d’acide carbonique qui se déversait torrentiellement sur un sol pâteux, mal consolidé, sujet aux déformations brusques ou lentes, à la fois maintenu dans cet état semifluide autant par les feux du soleil que par les feux de la masse intérieure. C’est que la chaleur interne n’était pas encore emmagasinée au centre du globe. La croûte terrestre, peu épaisse et incomplètement durcie, la laissait s’épancher à travers ses pores (7). De là, une phénoménale végétation — telle, sans doute, qu’elle se produit peut-être à la surface des planètes inférieures. Vénus ou Mercure (8), plus rapprochées que la terre de l’astre radieux.
Le sol des continents, encore mal fixé, se couvrit donc de forêts immenses; l’acide carbonique, si propre au développement du règne végétal, abondait ; aussi les végétaux se développaient-ils sous la forme arborescente (9) : il n’y avait pas une seule plante herbacée ; c'étaient partout d’énormes massifs d’arbres, sans fleurs, sans fruits, d’un aspect monotone, qui n’auraient pu suffire à la nourriture d’aucun être vivant. La terre n’était pas prête encore pour l’apparition du règne animal.
(L'Enseignement primaire, décembre 1892)
LA TERRE AUX ÉPOQUES GÉOLOGIQUES
Pendant les époques géologiques, lorsque le sphéroïde (1) terrestre était encore en voie de formation, une épaisse atmosphère l’entourait, toute saturée de vapeurs d’eau et largement imprégnée (2) d’acide carbonique (3). Peu à peu ces vapeurs se condensèrent (4) en pluies diluviennes (5), qui tombèrent comme si elles eussent été projetées du goulot de quelques millions de milliards de bouteilles d’eau de Seltz (6). C’était, on effet, un liquide chargé d’acide carbonique qui se déversait torrentiellement sur un sol pâteux, mal consolidé, sujet aux déformations brusques ou lentes, à la fois maintenu dans cet état semifluide autant par les feux du soleil que par les feux de la masse intérieure. C’est que la chaleur interne n’était pas encore emmagasinée au centre du globe. La croûte terrestre, peu épaisse et incomplètement durcie, la laissait s’épancher à travers ses pores (7). De là, une phénoménale végétation — telle, sans doute, qu’elle se produit peut-être à la surface des planètes inférieures. Vénus ou Mercure (8), plus rapprochées que la terre de l’astre radieux.
Le sol des continents, encore mal fixé, se couvrit donc de forêts immenses; l’acide carbonique, si propre au développement du règne végétal, abondait ; aussi les végétaux se développaient-ils sous la forme arborescente (9) : il n’y avait pas une seule plante herbacée ; c'étaient partout d’énormes massifs d’arbres, sans fleurs, sans fruits, d’un aspect monotone, qui n’auraient pu suffire à la nourriture d’aucun être vivant. La terre n’était pas prête encore pour l’apparition du règne animal.
(L'Enseignement primaire, décembre 1892)