2007-11-25
Du rêve à l'imagination
La rêverie était autrefois puissante. Les chasseurs du néolithique ou du paéolithique vivaient dans un monde d'une complexité que nous avons oubliée — leurs sages connaissaient et reconnaissaient des centaines de plantes et d'animaux, une performance qui ne serait plus à la portée de la plupart des citadins actuels — et d'une simplicité circonscrite par les besoins fondamentaux. Chasse, pêche, cueillette, jardinage... Si l'une de ces ressources venait à manquer, la tribu mourrait de faim avant la fin de l'hiver.
Les actions à la portée d'un individu restaient peu nombreuses, leur variété bornée par les combinaisons possibles de l'arsenal technique. Les gestes significatifs étaient encore moins nombreux. S'unir à une compagne ou un compagnon. Abattre l'animal dont la peau ou la chair garantirait la survie. Voir naître un enfant. Prévoir sa mort...
Dans un pays giboyeux, rêver qu'on va tuer un castor, puis le faire, n'a rien de miraculeux si le chasseur a justement choisi ses stratégies de chasse en fonction du rêve. Et comme le rêve ne fixe pas d'échéance, sa réalisation peut attendre un jour ou trois sans nuire à sa valeur. En moyenne, donc, le rêve se réalisera et si les rêves deviennent des réalités plus souvent qu'autrement, il n'existera plus aucune raison objective de distinguer le rêve de la réalité. C'était en partie cela le dreamtime des aborigènes australiens.
L'imagination moderne entretient un rapport plus compliqué avec la réalité. Le rêve doit incorporer une part de travail pour se rapprocher de la réalité. Le monde moderne construit et produit par le travail a éloigné le désir habitant la rêverie de sa réalisation et obligé le travail à infiltrer même le songe. Il ne suffit plus de sortir de chez soi et de se mettre en route. Il faudra planifier, organiser et mobiliser avant d'exécuter, et il sera beaucoup plus probable qu'un obstacle quelconque surgisse pour nous priver de nos désirs. (C'est pourquoi la société de consommation nous offre de réaliser des désirs beaucoup plus simples, dont nous ne rêverions jamais, mais qu'une réclame habile peut nous mettre en tête.) Dans cette optique, les auteurs de science-fiction sont des rêveurs modernes : ils rêvent non seulement d'une réalisation à faire, mais des moyens à mettre en œuvre pour la réaliser...
Les actions à la portée d'un individu restaient peu nombreuses, leur variété bornée par les combinaisons possibles de l'arsenal technique. Les gestes significatifs étaient encore moins nombreux. S'unir à une compagne ou un compagnon. Abattre l'animal dont la peau ou la chair garantirait la survie. Voir naître un enfant. Prévoir sa mort...
Dans un pays giboyeux, rêver qu'on va tuer un castor, puis le faire, n'a rien de miraculeux si le chasseur a justement choisi ses stratégies de chasse en fonction du rêve. Et comme le rêve ne fixe pas d'échéance, sa réalisation peut attendre un jour ou trois sans nuire à sa valeur. En moyenne, donc, le rêve se réalisera et si les rêves deviennent des réalités plus souvent qu'autrement, il n'existera plus aucune raison objective de distinguer le rêve de la réalité. C'était en partie cela le dreamtime des aborigènes australiens.
L'imagination moderne entretient un rapport plus compliqué avec la réalité. Le rêve doit incorporer une part de travail pour se rapprocher de la réalité. Le monde moderne construit et produit par le travail a éloigné le désir habitant la rêverie de sa réalisation et obligé le travail à infiltrer même le songe. Il ne suffit plus de sortir de chez soi et de se mettre en route. Il faudra planifier, organiser et mobiliser avant d'exécuter, et il sera beaucoup plus probable qu'un obstacle quelconque surgisse pour nous priver de nos désirs. (C'est pourquoi la société de consommation nous offre de réaliser des désirs beaucoup plus simples, dont nous ne rêverions jamais, mais qu'une réclame habile peut nous mettre en tête.) Dans cette optique, les auteurs de science-fiction sont des rêveurs modernes : ils rêvent non seulement d'une réalisation à faire, mais des moyens à mettre en œuvre pour la réaliser...
Libellés : Réflexion