2005-11-10

 

Productivité canadienne, le retour

Lundi, le Globe and Mail revenait sur le sujet de la productivité au Canada en réclamant des mesures. L'éditorialiste s'appuie pour ce faire sur le rapport de l'Institut C. D. Howe qui s'inquiétait du fait que le taux d'imposition canadien sur les investissements commerciaux des grandes et moyennes entreprises serait le deuxième plus élevé d'un groupe de 36 pays dont les États-Unis.

L'éditorial propose donc de sabrer dans ces charges et de s'attaquer ensuite à l'impôt sur le capital. S'il propose aussi de réduire l'impôt des particuliers dont le revenu annuel va de vingt à cinquante mille dollars, il s'étonne en plus que le taux d'imposition des individus s'élève à son niveau maximal dès que l'on gagne 115 739 $ par an : un seuil « comparatively low », selon le journal.

Autres recommandations : unifier la régulation des marchés boursiers et encourager l'investissement étranger.

Tout ceci pour aider la productivité canadienne. Personnellement, je suis un peu sceptique. Si le taux d'imposition est si élevé, faut-il en conclure que la productivité canadienne serait en 35e place dans un classement des mêmes pays considérés? Eh bien, en 2003, le PIB par habitant du Canada se classait en cinquième place des pays riches comparables. (Même le Québec se classait tout de même en quinzième place, dans les mêmes eaux que la France ou la Suède.) Ce n'est pas si mal. En ce qui concerne plus spécifiquement la productivité du travail, le Canada se classerait à la même hauteur approximativement — très loin donc du 35e rang.

Évidemment, le Canada doit d'abord se comparer à son voisin et principal partenaire commercial, les États-Unis. C'est en raison des comparaisons répétées du Canada et des États-Unis sur le plan de la productivité du travail, et de la croissance annuelle de la productivité du travail dans ces deux pays que les soi-disant experts s'en prennent aux taux d'imposition. Mais si le Canada a des charges si élevées, on peut en tirer deux conséquences presque contradictoires. D'abord, que si nous traînons vraiment la patte à ce point, il serait sans doute assez facile d'agir sur ce front dans l'espoir de rattraper un peu les États-Unis. Mais, ensuite, si nous traînons à ce point la patte tout en maintenant une productivité élevée, une baisse des taux d'imposition est-elle si urgente?

Et s'il était pertinent de s'intéresser à d'autres variables que l'imposition? Depuis 1989, comme le rappelait récemment Anthony Giles, le PIB par habitant au Canada a augmenté de 22%, mais les salaires réels n'ont augmenté que de 4%. Faut-il incriminer les charges ou la cupidité des cadres et des gestionnaires qui ont souvent accaparé pour eux-mêmes ou pour leurs actionnaires les plus-values réalisées par les entreprises? Qui sait? Le travail serait peut-être plus productif si les employés jouissaient d'une sécurité au moins financière plus grande ou si les employeurs investissaient plus dans l'équipement pour rendre le travail plus productif. Ou si les gouvernements investissaient un peu plus dans les infrastructures et un peu moins dans la santé. Mais ce serait un autre débat...

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