2012-09-26

 

Festival Québec en toutes lettres : mes conférences

En guise de préambule au festival Québec en toutes lettres à Québec, je donne des conférences dans les bibliothèques sur le sujet de l'histoire de la science-fiction au Québec.  Ce soir, j'en serai à ma cinquième et il était donc temps que je fournisse ici la liste complète de celles qui restent.  (J'indiquerai plus tard mon emploi durant le festival proprement dit.)  En principe, les conférences sont réservées aux abonnés et il faut s'inscrire à l'avance, mais nous n'avons pas encore manqué de place...

Mercredi 26 septembre
Les Asimov québécois : pionniers de la SF au Québec
conférence
Adolescents et adultes, gratuit avec réservation téléphonique ou sur place
Bibliothèque Saint-André (2055, boul. Bastien), à 19 h (durée : 75 min)
Les débuts de la science-fiction au Québec vous intéressent? Bien avant Isaac Asimov, des auteurs de science-fiction québécois ont marqué l’histoire. Napoléon Aubin signe dès 1839 le premier texte de science-fiction au Québec. En 1895, Jules-Paul Tardivel imagine l'indépendance du Québec au XXe siècle. En 1960, le célèbre agent IXE-13 part pour une série d'aventures spatiales en imitant les héros des premières séries télévisées de science-fiction pour jeunes de Radio-Canada. Depuis 1974, des revues et des collections accueillent les ouvrages d'une constellation d'auteurs. L’écrivain Jean-Louis Trudel vous raconte l’histoire de ces pionniers en prélude au festival Québec en toutes lettres.




Lundi 1er octobre
Les Asimov québécois : pionniers de la SF au Québec
conférence
Adolescents et adultes, gratuit avec réservation téléphonique ou sur place
Bibliothèque Monique-Corriveau (999, ave. Roland-Beaudin), à 19 h (durée : 75 min)




Mardi 9 octobre
Les Asimov québécois : pionniers de la SF au Québec
conférence
Adolescents et adultes, gratuit avec réservation téléphonique ou sur place une semaine avant l'activité
Bibliothèque Félix-Leclerc (1465, rue de l'Innovation), à 19 h (durée : 75 min)




Mercredi 10 octobre
Les Asimov québécois : pionniers de la SF au Québec
conférence
Adolescents et adultes, gratuit avec réservation téléphonique ou sur place
Bibliothèque Gabrielle-Roy, salle Gérard-Martin, à 14 h (durée : 75 min)

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2012-09-25

 

Virus et cyberpunk canadiens

Le roman de Nina Munteanu, Darwin's Paradox (Dragon Moon Press, 2007), est si dense qu'il est difficile de le caractériser.   Dans un futur moyennement éloigné, transformé par les changements climatiques et la conversion des villes en forteresses claquemurées qui tournent le dos à la campagne, Julie Crane a survécu à un passé chargé.  Capable d'interagir directement avec les IA de sa communauté d'origine moyennant un scan rétinien, elle a été infectée par un virus qui lui permet de communiquer avec les IA de manière plus ou moins télépathique.  Le problème, c'est que le virus s'est propagé de manière meurtrière dans la population et qu'elle a dû fuir sa ville d'origine après un accrochage avec les forces de l'ordre.  En compagnie d'un amant qui est devenu le père de sa fille, Julie a trouvé refuge en rase campagne dans la vallée du Saint-Laurent.  Hors des villes, il ne reste plus personne ou presque.  Pourtant, le roman débute alors que la petite famille de Julie bénéficie de la compagnie d'un mystérieux vagabond, Aard, qui s'avère n'être autre qu'un agent secret de leur cité d'origine.

Julie décide de retourner dans la ville qu'elle a quitté.  Et l'action commence...  Le nombre de personnages importants qui s'intéressent à l'ancienne patiente zéro est assez effarant.  Il y a ceux qui veulent se servir d'elle, ceux qui l'aiment et ceux qui la détestent.  Sans parler des IA qui attendent son retour.

Tout semble se liguer contre Julie, et c'est peut-être bien une des faiblesses du roman.  Même si les règles de la narration nord-américaine exigent de multiplier les embûches et les dangers qui doivent pousser un personnage à bout, il arrive un point où l'accumulation de malheurs fait verser une histoire dans le mélodrame.  Au fil des pages, Julie est séparée de son mari et de sa fille, obligée de tuer des assassins fanatiques lancés sur sa piste, trahie, violée et rendue responsable d'une épidémie qui a tué des millions de personnes.  Sa persévérance inspire l'incrédulité du lecteur plus que son empathie.  Néanmoins, avec l'aide de sa fille et d'alliés sur qui elle n'était plus certaine de pouvoir compter, Julie fait triompher la vérité et la justice.

Munteanu fait reposer son intrigue sur une innovation technique dont les conséquences sont imaginées avec rigueur, mais l'accumulation d'acteurs et d'éléments brouille la lisibilité de l'intrigue.  En définitive, le dénouement nous prend par surprise parce qu'il ressemble à une péripétie de plus, et non au résultat du point culminant de l'action.  Darwin's Paradox a le mérite de relever d'une forme exigeante de la science-fiction et de camper des personnages convaincants, mais la construction de l'intrigue, qui repose sur un passé foisonnant et des factions multiples, est le point faible de ce livre.  N'empêche que je lirai avec curiosité un autre roman de Munteanu.

2012-09-20

 

Les auteurs d'imagine...

Dans un billet précédent, j'avais examiné rapidement la productivité des auteurs les plus présents dans Solaris au fil des ans.  La revue imagine...  a existé durant plus de quinze ans et publié de nombreux auteurs dans près de quatre-vingt numéros — très précisément, 79.  La revue a aussi été l'œuvre de nombreuses personnes qui ont fait partie de son comité éditorial.  Dans le tableau ci-dessous, on retrouve la liste des hommes et des femmes qui ont été soit des rédacteurs ordinaires (et le nombre de numéros pour lesquels ils ont rempli ce rôle) soit la rédactrice ou le rédacteur en chef.  Jean-Marc Gouanvic et Michel Bélil ont été les rédacteurs les plus constants, fidèles au poste pour la production de 78 et 74 numéros respectivement.  En revanche, la rédaction en chef a été principalement assurée par deux personnes, après l'époque collégiale des débuts quand il n'y avait pas de rédaction en chef désignée : Catherine Saouter Caya pour 26 numéros et Marc Lemaire pour 32 numéros.  Selon les époques, en tenant compte du domicile des rédacteurs, on peut associer la rédaction de la revue à un nombre surprenant de localités.  Parmi celles-ci, il y avait des villes et villages du Québec (Montréal, Québec, Trois-Rivières, Sainte-Foy, Hull, La Pocatière, Norbertville, Saint-Laurent d'Orléans), mais aussi Winnipeg au Manitoba et Saint-Catharines en Ontario.


De même, la direction littéraire n'a été officialisée que tardivement.  Jusqu'au dix-huitième numéro, il faut supposer qu'elle était assumée de manière plus ou moins collégiale par le collectif de rédaction.  Du numéro 18 au 44, Jean-Marc Gouanvic a assumé seul cette charge, avant d'être remplacé par un collectif variable.  Frédérick Durand a mis fin à cette période en assumant seul la direction littéraire pour les deux derniers numéros de la revue. Au total, toutefois, c'est Marc Lemaire qui aura assuré la direction littéraire (partielle) du plus grand nombre de numéros (35), suivi de près par Jean-Marc Gouanvic (32).  


En ce qui concerne les auteurs des fictions publiées par imagine... (hors BD), l'analyse de leurs participations donne le tableau suivant, hautement synthétique.

Ce qu'il faut en comprendre, c'est qu'il y a eu 425 participations par 171 auteurs sous la forme de textes de fictions (à distinguer des quelques histoires en bandes dessinées), ce qui donne en moyenne presque 2,5 participations par auteur.  Environ 19,8% de ces textes ont été signés par des auteurs de l'extérieur du Canada, pour la plupart des Français.  Du fait que ces auteurs étrangers représentent une proportion plus élevée des auteurs (24,6%) que la proportion des textes d'origine étrangère, on peut en conclure que les récidivistes ont publié un peu moins souvent que les auteurs canadiens, pour une moyenne de 2 participations par auteur étranger comme de juste.


L'histoire éditoriale de la revue peut se diviser en trois époques d'importance approximativement égale : celle de la rédaction supervisée par Catherine Saouter Caya seule, celle de la rédaction supervisée par Marc Lemaire seul et celle de la rédaction assurée par une variété de personnes, pour des périodes inégales.  Pourtant, la répartition se fait de manière assez équitable.  Saouter Caya a supervisé la publication de 32,2% des fictions, Lemaire de 30,6% et les autres de 37,2%.  L'ère Saouter Caya, quand Jean-Marc Gouanvic était directeur littéraire, semble avoir favorisé certains auteurs puisque le nombre de participations par auteur est plus élevé qu'aux autres époques.  L'ère Lemaire est plus favorable aux nouveaux auteurs, sans doute, et aux participations ponctuelles.  Pour ce qui est des auteurs étrangers, l'ère Saouter Caya/Gouanvic est également la plus favorable aux participations par des auteurs d'outre-Atlantique, mais elle ne se démarque pas aussi nettement de l'ère Lemaire.


Sinon, comme dans le cas de Solaris, on peut se poser la question de savoir quels auteurs ont été publiés le plus souvent dans imagine... au fil des ans.  Si on ne compte que les fictions, trois auteurs seulement ont signé plus de quinze textes dans les numéros de la revue : Jean-Pierre April, Michel Bélil et moi-même.  En fait, cinq auteurs seulement ont publié plus de dix textes (dont des épisodes de feuilleton). 


Dans le tableau ci-dessus, les noms des auteurs étrangers sont surlignés en rose hachuré.  De cette liste de 21 noms, on peut soutenir que cinq auteurs tout au plus sont encore actifs dans le milieu canadien actuel (April, Trudel, Rochon, Pelletier et Meynard) tandis que Jean Pettigrew sévit maintenant comme éditeur et directeur littéraire.  La distribution de tous les auteurs d'imagine... en fonction du nombre de textes qu'ils ont signé dans les pages de la revue est illustrée par la figure suivante.

En apparence, la décroissance régulière du nombre d'auteurs ayant publié un nombre croissant de textes est interrompue par une bosse inattendue pour les auteurs ayant publié entre 5 et 9 fictions, mais cela s'explique bien sûr par le fait que cette catégorie embrasse des sous-catégories jusqu'alors traitées séparément. 

Comme dans le cas de Solaris, toutefois, il y a un pic un peu surprenant en queue de distribution, qui suggère que, pour chaque revue, une petite poignée d'écrivains a réussi à défier les probabilités en faisant publier un grand nombre de textes. Pour Solaris, en presque trente ans, neuf auteurs seulement ont publié plus de dix textes.  Pour imagine..., en quinze ans, seulement cinq auteurs l'ont fait — ce qui se ressemble, toutes proportions gardées.


Cela dit, le classement ci-dessus des auteurs d'imagine... les plus prolifiques n'incluait que les auteurs de fictions.  Si on tient compte des essais et des bandes dessinées, le classement change un peu et de nouveaux noms apparaissent dans ce bilan des participations à la revue.  Le tableau ci-dessous voit Jean-Marc Gouanvic apparaître en deuxième place tandis que je suis dépassé par Esther Rochon et Guy Bouchard, qui ont fait partie des chevilles ouvrières de la revue pendant de nombreuses années.

Ce qui ressort aussi de ce dernier tableau, c'est le nombre d'auteurs d'origine étrangère parmi les principaux artisans d'imagine..., si on ne compte pas seulement les auteurs européens, mais aussi les auteurs canadiens issus de l'immigration.  A priori, on en dénombre 13 sur 28.  En un sens, ce n'est guère étonnant.  Du point de vue des institutions et des structures, la science-fiction avait dans les années soixante-dix une histoire plus longue en France qu'au Canada francophone.  Pour lancer quelque chose de neuf au Canada, il fallait bien se nourrir d'une expérience venue d'ailleurs.  La source aurait pu être les États-Unis, mais, en raison de la barrière de la langue, c'est la France qui a fourni l'inspiration principale des premiers artisans du milieu institué de la SFCF à partir de 1974, en commençant par ses revues, Requiem/Solaris et imagine....

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